Question au Gouvernement n° 1766 :
maintien de l'ordre lors des manifestations

15e Législature

Question de : M. Christian Jacob
Seine-et-Marne (4e circonscription) - Les Républicains

Question posée en séance, et publiée le 20 mars 2019


MAINTIEN DE L'ORDRE LORS DES MANIFESTATIONS

M. le président. La parole est à M. Christian Jacob.

M. Christian Jacob. Monsieur le Premier ministre, je ne reviendrai ni sur le choix du Président de la République de passer son week-end au ski au moment où Paris brûlait (Vives exclamations sur les bancs des groupes LaREM et MODEM)

M. François Cormier-Bouligeon. Vous êtes hors pistes !

M. Christian Jacob. …ni sur les soirées animées de votre ministre de l'intérieur. (Nouvelles exclamations sur les bancs du groupe LaREM.)

Mme Valérie Beauvais. Il a raison !

M. Fabien Di Filippo. Eh oui !

M. Christian Jacob. Vous comprendrez que les Français soient atterrés par tant de légèreté, d'insouciance et d'incompétence. La profanation de l'Arc de Triomphe le 1er décembre, les pillages de magasins, les incendies de voitures, les saccages de restaurants, samedi après samedi, depuis dix-huit semaines, n'auront donc pas suffi.

Votre stratégie du maintien de l'ordre est un échec total, monsieur le Premier ministre. Vous devez donner à nos policiers des ordres clairs et précis, et arrêter de les mettre en danger face aux casseurs. Pour nous, l'intégrité physique d'un représentant de la loi vaut plus que celle d'un casseur ou d'un voyou qui ne respecte rien ni personne. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur quelques bancs du groupe UDI-Agir.)

Il est temps aussi que le Président de la République cesse l'hypocrisie consistant à proposer une loi anti-casseurs et, en même temps, à la déférer devant le Conseil constitutionnel. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

M. Pierre Cordier. Absolument ! C'est scandaleux !

M. Fabien Di Filippo. Président Tartuffe !

M. Christian Jacob. En réalité, voulez-vous vraiment cette loi ?

Monsieur le Premier ministre, depuis le mois de novembre, vous cherchez à gagner du temps en jouant le pourrissement du mouvement.

M. Maxime Minot. Très juste !

M. Christian Jacob. L'urgence est maintenant d'en finir, en proposant une véritable sortie de crise. Mais êtes-vous encore capable, vous et votre ministre de l'intérieur, de prendre les décisions courageuses qui s'imposent pour ramener l'ordre républicain dans notre pays ?

M. Pierre Cordier. Très bien !

M. Christian Jacob. C'est votre responsabilité. Pour une fois, assumez-la, sans vous abriter derrière un préfet de police ou des policiers, dont le seul tort est d'avoir appliqué vos instructions.

M. Pierre Cordier. Ce sont des fusibles !

M. Gilles Le Gendre. Votre temps de parole est écoulé, monsieur Jacob !

M. Christian Jacob. Si, comme vous l'avez fait à Notre-Dame-des-Landes, vous décidez de céder aux casseurs, Emmanuel Macron restera définitivement dans l'histoire comme le Président de la faiblesse et du désordre. (Applaudissements et « Bravo ! » sur les bancs du groupe LR.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Monsieur le président Jacob, samedi, à Paris, plusieurs dizaines de milliers de manifestants ont choisi d'occuper la rue. Plus de 36 000 l'ont fait pacifiquement, en défilant et en indiquant combien ils étaient attachés à la transition écologique et à la défense du climat. (M. Erwan Balanant applaudit.) De l'avis général, cette manifestation s'est passée sans aucun problème. Elle était déclarée, organisée ; accompagnée par les forces de l'ordre,…

M. Éric Straumann. … et par les députés de La République en marche !

M. Édouard Philippe, Premier ministre . …elle s'est déroulée sans problème.

Dans le même temps, se réunissaient sans l'avoir déclaré une petite dizaine de milliers de personnes, que je ne qualifie pas de manifestants, venues non pas revendiquer mais avec la violence pour seule revendication.

M. Pierre Cordier. Les faits, on les connaît !

M. Fabien Di Filippo. Mais qu'avez-vous fait ?

M. Édouard Philippe, Premier ministre . Elles se sont livrées à des pillages, des agressions contre les forces de l'ordre et des incendies, actes criminels qui doivent évidemment être condamnés et punis.

M. Éric Ciotti. Jusque-là, on est d'accord !

M. Édouard Philippe, Premier ministre . Samedi, tout n'a pas dysfonctionné car un des objectifs des forces de l'ordre, ce jour-là, était d'éviter l'infiltration par les casseurs du cortège pacifique des manifestants de la marche pour le climat. Or cet objectif a été atteint.

M. Meyer Habib. Il en faut peu pour vous satisfaire !

M. Édouard Philippe, Premier ministre . Mais vous avez raison, monsieur le président Jacob, nous avons constaté des dysfonctionnements. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.)

M. Patrick Hetzel. Le Président de la République au ski ?

M. Édouard Philippe, Premier ministre . Ceux-ci tiennent à la mauvaise exécution d'une stratégie qui avait été fixée par le Gouvernement après les événements du 1er décembre. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.)

M. Christian Jacob. C'est vous le responsable !

M. Édouard Philippe, Premier ministre . Elle consiste, pour les forces de l'ordre, à faire preuve d'une plus grande mobilité, à intercepter et à interpeller plus rapidement, y compris pendant les manifestations, tous ceux qui se rendent coupables d'actes criminels, tout en suivant des consignes sur l'utilisation d'un certain nombre d'armes non létales. Nous avons constaté que ces dysfonctionnements avaient nui à la qualité de la manœuvre et au respect de l'ordre.

M. Patrick Hetzel. Et que faisait le ministre de l'intérieur ?

M. Christian Jacob. Arrêtez de charger les policiers !

M. Édouard Philippe, Premier ministre . Nous en avons donc tiré toutes les conséquences.

C'est la raison pour laquelle j'ai annoncé un plan, qui permettra d'interdire les manifestations, sur certains lieux, lorsque nous savons que des personnes viennent pour faire acte de violence, pour casser.

M. Meyer Habib. Il aurait fallu le faire depuis trois mois !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. C'est la raison pour laquelle nous avons indiqué que les forces de l'ordre disperseront immédiatement l'ensemble des rassemblements ou plus exactement des attroupements qui se dérouleront sur des lieux où des manifestations ont été interdites.

C'est la raison pour laquelle j'ai indiqué que ceux des manifestants qui, sans être a priori des casseurs, viennent regarder et, d'une certaine façon, viennent permettre ces actes, seraient sanctionnés plus sévèrement, quel que soit leur comportement, par le simple fait de s'être présentés sur des lieux où une manifestation aura été interdite. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et MODEM.) L'amende qui leur sera appliquée sera augmentée à 135 euros. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.)

M. Pierre Cordier. Quelle sévérité !

M. Éric Straumann. Même s'ils roulent à moins de 80 kilomètres à l'heure ?

M. Édouard Philippe, Premier ministre. C'est la raison pour laquelle nous avons décidé de modifier la chaîne de commandement qui doit mettre en œuvre le maintien de l'ordre à Paris, en l'unifiant et en faisant en sorte de laisser plus d'autonomie…

M. Jean-Louis Masson. Démission !

M. Patrick Hetzel. Changez le ministre de l'intérieur !

M. Édouard Philippe, Premier ministre . S'il vous plaît, je termine ma réponse, qui ne manquera pas de vous convaincre.

M. le président. Mes chers collègues, un peu de calme ! C'est la dernière fois que je le demande !

M. Édouard Philippe, Premier ministre . Il faut donner à ceux qui commandent les détachements intervenant lors des manifestations davantage d'autonomie mais aussi de moyens techniques – je pense notamment aux éléments qui permettront de marquer les manifestants.

M. Éric Straumann. Vous comptez les arroser de peinture ?

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Il convient aussi de mieux accompagner les mesures et les manœuvres par la présence d'officiers de police judiciaire.

Monsieur le président Jacob, les faits qui se sont déroulés samedi…

M. Pierre Cordier. On les connaît !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. …sont effectivement inacceptables.

M. Michel Herbillon. Ceux du 1er décembre l'étaient aussi !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Nous devons répondre fermement. C'est l'ambition du Gouvernement. Je note, monsieur le président Jacob – et vous en êtes parfaitement conscient – que la loi qui a été votée par le Parlement il y a peu…

M. Éric Straumann. Elle ne sert à rien !

M. Patrick Hetzel. Passez aux actes !

M. Édouard Philippe, Premier ministre . …et dont vous avez indiqué que le Président de la République, soucieux du respect de la Constitution, avait choisi de la déférer devant le Conseil constitutionnel, nous apportera certaines mesures utiles pour prévenir de tels actes. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – Vives exclamations sur les bancs du groupe LR.)

M. Éric Straumann. Mais non !

M. Édouard Philippe, Premier ministre . Je pense notamment au contrôle des abords des manifestations, à la pénalisation de ceux qui se présentent masqués dans ces manifestations,…

M. Éric Straumann. C'est déjà pénalisé !

M. Édouard Philippe, Premier ministre . …ainsi qu'à l'interdiction de manifester, qui permettra d'écarter ceux dont nous savons qu'ils vont se glisser dans les manifestations pour constituer des black blocs et, le cas échéant, de les obliger à pointer dans des commissariats ou des gendarmeries, afin de les empêcher de se présenter sur les lieux des manifestations.

M. Maxime Minot. Castaner fait l'autruche !

M. Édouard Philippe, Premier ministre . Voilà, monsieur le président Jacob, ce que nous voulons faire. (Nouvelles exclamations sur les bancs du groupe LR.)

M. Pierre Cordier. Il est temps !

M. Édouard Philippe, Premier ministre . Nous le ferons sans aucune faiblesse, sans trembler, car ceux qui viennent sur ces lieux ont pour seule revendication la violence, qui n'est pas acceptable. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM. – Exclamations sur les bancs du groupe LR.)

Données clés

Auteur : M. Christian Jacob

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Ordre public

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : Premier ministre

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 20 mars 2019

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