15ème législature

Question N° 176
de Mme Delphine Batho (Nouvelle Gauche - Deux-Sèvres )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Transition écologique et solidaire
Ministère attributaire > Transition écologique et solidaire

Rubrique > aménagement du territoire

Titre > Avenir du PITE marais poitevin et nouveau plan gouvernemental

Question publiée au JO le : 13/02/2018
Réponse publiée au JO le : 23/02/2018 page : 1443

Texte de la question

Mme Delphine Batho interroge M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur l'avenir des engagements de l'État pour le marais poitevin. Deuxième zone humide de France et quatrième d'Europe par sa taille, ce territoire remarquable et fragile a reconquis son label parc naturel régional et sa reconnaissance Grand site de France vient d'être renouvelée. Le marais poitevin bénéficie en outre d'un site classé au titre de la loi de 1930, de trois réserves naturelles nationales, et de deux arrêtés préfectoraux de protection biotope. Il constitue enfin l'un des plus grands sites Natura 2000 terrestre de France métropolitaine avec 68 000 hectares. Suite à la condamnation de la France par la Cour de justice des Communautés européennes en 1999 pour non-respect de la directive relative à la conservation des oiseaux sauvages dans le marais poitevin, un plan gouvernemental spécifique avait été engagé en juin 2003 par le Premier ministre, dans le cadre d'un protocole d'accord entre l'État et les collectivités. D'une durée de dix ans, il a pris fin en 2013. Alors qu'un nouveau plan gouvernemental pour le Marais poitevin est annoncé et attendu depuis 2013, le précédent gouvernement n'a pas donné suite aux travaux engagés dans cette perspective. Pourtant deux rapports d'évaluation du Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) ont fait des propositions pouvant servir de base à la définition des orientations de l'État. Ce désengagement et cette absence d'impulsion politique se sont traduits par un très net désengagement financier de l'État. Ainsi les crédits du « Plan d'action gouvernemental pour le marais poitevin » du programme des interventions territoriales de l'État (PITE) ont été divisés par trois depuis 2015. La loi de finances pour 2018 a réduit les dotations à seulement 1 million en AE et 1,6 million en CP. Pire, le bleu budgétaire annonce l'arrêt pur et simple du PITE marais poitevin : « le programme 2018 s'inscrit dans la perspective d'une clôture de l'action Plan gouvernemental pour le marais poitevin fin 2018 et de la poursuite des actions de l'État par d'autres moyens financiers ». Le marais poitevin est un patrimoine national exceptionnel. C'est aussi un territoire de vie où habitent et travaillent 100 000 habitants. Le désengagement de l'État, qui n'avait consenti à mettre sur pied un plan d'action que sous la contrainte d'un contentieux européen, risque de remettre en cause tous les efforts accomplis depuis des années. D'ores et déjà on observe un net recul des surfaces contractualisées avec les agriculteurs pour le maintien des prairies humides, du fait du manque de financement des MAE. De plus, une nouvelle menace affecte le Marais poitevin : la chalarose du frêne qui représente une véritable épée de Damoclès pour la trame paysagère et l'écosystème de la zone humide. Il est impératif que l'État donne un nouvel élan à son engagement pour la sauvegarde du marais poitevin dans toutes ses dimensions (politique de l'eau, biodiversité, agriculture). C'est pourquoi elle lui demande d'une part de bien vouloir indiquer dans quel délai et avec quelle méthode va être élaboré un nouveau plan gouvernemental pour le marais poitevin, contractualisé avec les collectivités territoriales d'une part, et d'autre part de prendre l'engagement que le PITE marais poitevin ne sera pas arrêté à partir de 2019 afin que les financements nécessaires continuent d'être apportés aux actions, en particulier en soutien à l'élevage et aux pratiques agricoles qui contribuent à la qualité des écosystèmes de la zone humide.

Texte de la réponse

PLAN GOUVERNEMENTAL POUR LE MARAIS POITEVIN


M. le président. La parole est à Mme Delphine Batho, pour exposer sa question, n°  176, relative au plan gouvernemental pour le Marais Poitevin.

Mme Delphine Batho. Ma question sera simple et claire : l'État poursuivra-t-il ou, au contraire, renoncera-t-il à son engagement en faveur du Marais Poitevin, qui est la deuxième zone humide de France, la quatrième d'Europe, mais aussi un territoire fragile, à la complexité particulière puisqu'il s'étend sur trois départements et deux régions.

La France avait été condamnée par la Cour de justice des communautés européennes en 1999 pour non-respect de la directive relative à la conservation des oiseaux sauvages dans le Marais Poitevin. Suite à cette décision, un plan gouvernemental avait permis de financer un certain nombre d'actions pour reconquérir les prairies humides, mais aussi le label Parc naturel régional. Un programme des interventions territoriales de l'État – PITE – avait été mis en place, et un établissement public pour la gestion de l'eau et de la biodiversité du marais poitevin avait été créé.

Vous héritez d'une situation où, depuis 2015, les crédits de ce programme d'intervention territoriale ont été divisés par trois – on en voit aujourd'hui les conséquences avec un recul des surfaces contractualisées avec les agriculteurs pour le maintien des prairies humides. Pire, le bleu budgétaire pour 2018 annonce l'arrêt pur et simple du PITE à la fin de l'année.

Le plan gouvernemental précédent a expiré en 2013. Nous bataillons depuis pour construire avec l'État un nouveau plan. J'ai abordé le sujet avec le ministre de la transition écologique et solidaire et le cabinet du Premier ministre : le Gouvernement est-il prêt à élaborer un nouveau plan gouvernemental pour le Marais Poitevin ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.

Mme Brune Poirson, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire. Madame la députée Delphine Batho, vous interrogez M. Nicolas Hulot, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire mais je répondrai à sa place car il ne peut malheureusement être présent aujourd'hui.

Vous nous posez la question de l'avenir des engagements pris en faveur du Marais Poitevin, et en particulier leurs financements.

Comme vous le soulignez, le Marais poitevin, seconde zone humide de France, présente une biodiversité exceptionnelle. Cette biodiversité est aussi très fragile, car tributaire du maintien des prairies et de l'alimentation en eau et des niveaux d'eau du marais, qui font l'objet de conflits d'usages complexes avec l'activité agricole, dans un contexte de changement climatique et de pression sur les ressources. Je vous rejoins sur le fait que l'implication de la collectivité publique doit rester importante pour concilier les différents usages présents sur ce territoire remarquable, afin de préserver ses richesses naturelles.

L'investissement de l'État reste important dans le Marais poitevin, grâce à la présence, depuis 2011, de l'établissement public pour la gestion de l'eau et de la biodiversité du Marais poitevin. Cet établissement dispose d'un contrat d'objectifs et de performance depuis 2016, qui précise les orientations que le Gouvernement lui a données, lesquelles restent d'actualité : favoriser l'expression de la biodiversité sur le marais en intervenant notamment dans la gestion de l'eau, et renouveler le dialogue entre les acteurs du territoire. Même s'il reste encore à faire, les résultats sont là : des compromis entre enjeux de biodiversité et enjeux agricoles ont été trouvés pour améliorer la gestion des niveaux d'eau par exemple, et les prélèvements sur la ressource en eau du marais ont diminué.

Plus globalement, vous avez raison, les mécanismes financiers qui étaient dédiés au Marais poitevin sont en cours d'évolution. Une mission interministérielle, que le ministre d'État a demandée, avec Gérald Darmanin, sur les différents établissements publics de l'État compétents dans les domaines de l'eau et de la biodiversité, se penchera sur la question et identifiera les solutions possibles. Nous souhaitons, en effet, que la dynamique enclenchée avec le monde agricole, les collectivités et les associations de protection de l'environnement sur le marais perdure, au service de ce joyau du patrimoine naturel national.

M. le président. La parole est à Mme Delphine Batho.

Mme Delphine Batho. Ce ne sont pas du tout les propos que j'attendais. J'espérais, après les différentes réunions que j'ai eues avec les différents cabinets ministériels, une réponse plus précise et concrète que ce simple renvoi au travail en cours de l'inspection générale des finances, qui porte en réalité sur un autre sujet, puisqu'il concerne l'avenir des agences et des établissements publics de l'État.

Je vous ai interrogée, au contraire, sur la possibilité d'engager de nouvelles démarches avec les collectivités territoriales pour aboutir à une nouvelle contractualisation en faveur de ce territoire. Je tiens à nouveau à vous alerter : nous avons perdu au cours des deux dernières années 2 000 hectares de surfaces contractualisées avec les agriculteurs pour le maintien des prairies humides, ce qui signifie que tout le travail réalisé depuis des années, suite au contentieux européen risque, aujourd'hui, d'être détruit. J'espère que la position du Gouvernement évoluera.