Question au Gouvernement n° 1796 :
suivi d'individus radicalisés à Marseille

15e Législature

Question de : M. Guy Teissier
Bouches-du-Rhône (6e circonscription) - Les Républicains

Question posée en séance, et publiée le 27 mars 2019


SUIVI D'INDIVIDUS RADICALISÉS À MARSEILLE

M. le président. La parole est à M. Guy Teissier.

M. Guy Teissier. Madame la garde des sceaux, dimanche dernier, vous avez reconnu qu'il y avait d'ores et déjà sur notre territoire 200 djihadistes revenants. Cette information est très inquiétante pour la sécurité de nos concitoyens, d'autant que le Gouvernement fait preuve à bien des égards d'amateurisme en ce qui concerne la surveillance des individus radicalisés.

J'en veux pour preuve la situation à Marseille. En octobre 2018, la direction de l'administration pénitentiaire a ouvert en catimini un dispositif secret d'accueil en milieu ouvert de condamnés et prévenus pour terrorisme. Le « programme d'accueil individualisé et de réaffiliation sociale » dissimule en réalité, sous une appellation technocratique plutôt sobre, des centres de suivi hors détention de prévenus et de condamnés pour terrorisme. À Marseille, cette petite équipe doit s'occuper, quelques heures par semaine, de jeunes de 22 à 35 ans, dont deux revenants du djihad, un sortant de prison, trois jeunes détenus de droit commun suspectés de radicalisation et six autres étiquetés « terroristes islamistes ». Et tout cela en plein cœur de ville !

Il est surprenant, pour ne pas dire scandaleux, que vous préfériez, madame la garde des sceaux, parler aux journalistes plutôt qu'aux élus. Comment se fait-il que le maire de Marseille et la présidente du conseil départemental, acteurs majeurs de la sécurité et du social dans notre ville, n'aient pas été avertis de la menace potentielle constituée par l'installation d'un tel service ? Ayant eu connaissance de ces faits, et souhaitant de plus amples informations, ils ont reçu une fin de non-recevoir de la part des représentants de l'État.

Après les assassinats barbares de Mauranne et Laura, la fermeture de la mosquée As Sounna et, plus récemment, l'attaque au couteau de passants sur la Canebière, il est clair que notre ville est affectée directement par la radicalisation et le terrorisme. Face à un dispositif d'expérimentation aussi opaque, pouvons-nous espérer de votre part des explications concernant la surveillance des individus dangereux lâchés en pleine nature ? L'amateurisme en la matière n'a pas sa place ! Sur un dossier aussi sensible, la coopération la plus étroite est attendue de tous. Madame, j'attends votre réponse ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LR et parmi les députés non inscrits.)

M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le député, ma réponse, la voici : ces centres n'ont évidemment rien d'opaque ni de confidentiel !

Mme Valérie Boyer. Vraiment ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux . La preuve, c'est qu'ils figuraient dans le plan de prévention et de lutte contre la radicalisation annoncé par le Premier ministre au mois de février dernier. Nous avons, à l'époque, clairement dit comment nous entendions prendre en charge les personnes suspectées de radicalisation. Lorsqu'elles sont en détention, ce qui est le cas de la plupart d'entre elles, elles font l'objet – j'ai déjà eu l'occasion de le dire ici – d'une évaluation et d'une prise en charge individualisée, notamment dans des quartiers étanches, à l'isolement ou dans le cadre d'un traitement spécifique.

Lorsque ces personnes sont placées sous main de justice, se trouvant donc à l'extérieur des établissements pénitentiaires, elles sont soumises, la plupart du temps, à un contrôle judiciaire et font, en outre, l'objet d'un suivi par les personnels d'insertion et de probation assuré dans des centres spécifiques tels que ceux que vous avez évoqués. Nous avons expérimenté l'année dernière, à Paris, un tel centre de suivi des personnes radicalisées placées sous main de justice. La mise en place des dispositifs supposant une prise en charge éducative, psychologique, psychiatrique et en termes de logement,...

Mme Valérie Boyer. Pourriez-vous nous donner des informations concernant Marseille ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux . Vous me demandez des explications, je vous les donne !

Mme Valérie Boyer. Ce n'est pas une réponse !

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux . Laissez-moi terminer mes explications. Cette prise en charge, l'année dernière, a témoigné d'un certain succès pour désengager ces personnes de la radicalisation violente.

M. Éric Straumann. Et Marseille, alors ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux . C'est la raison pour laquelle nous avons souhaité développer ces dispositifs, à Marseille tout d'abord, à Lyon et à Lille dans un second temps.

M. Guy Teissier. Le maire de Marseille n'est pas au courant !

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux . Monsieur le député, nous sommes pleinement engagés dans la lutte contre la radicalisation violente et je suis certaine que vous nous accompagnerez en ce sens. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.)

Données clés

Auteur : M. Guy Teissier

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Terrorisme

Ministère interrogé : Justice

Ministère répondant : Justice

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 27 mars 2019

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