Question orale n°17 : Apprentissage du code de la route dans les programmes scolaires

15ème Législature

Question de : M. Jean-Louis Bricout (Hauts-de-France - Nouvelle Gauche)

M. Jean-Louis Bricout attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale sur la possibilité d'introduire dans les programmes scolaires l'apprentissage du code de la route et le passage de l'examen dans le cadre des programmes officiels de l'éducation nationale. Le permis de conduire est un élément essentiel de l'insertion sociale et professionnelle, en particulier pour les jeunes. Pour beaucoup d'entre eux, le permis de conduire constitue en effet un passeport indispensable pour l'emploi. Par ailleurs et dans le même esprit, pour les territoires ruraux l'impact d'une telle mesure n'est pas neutre pour débloquer l'accès à l'emploi. En effet, compte tenu des distances et de l'isolement de certains villages très éloignés de la ville bourg centre (où se trouvent en général les opportunités d'emplois), le fait de pouvoir se déplacer en voiture apparaît fondamental. La loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques a introduit la possibilité pour des intervenants extérieurs d'intervenir dans les établissements pour l'examen du code de la route, il n'y a pas de caractère obligatoire. Il s'agirait pourtant d'une mesure intéressante afin de garantir l'égalité de tous les jeunes. Enfin, l'intérêt pédagogique du point de vue de la sensibilisation à la sécurité routière et à la responsabilisation n'est pas neutre. Aussi, il lui demande de bien vouloir lui indiquer sa position quant à l'opportunité d'intégrer le passage du code de la route dans les programmes et le passage de l'examen dans le cadre scolaire.

Réponse en séance, et publiée le 13 décembre 2017

APPRENTISSAGE DU CODE DE LA ROUTE DANS LES PROGRAMMES SCOLAIRES
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Bricout, pour exposer sa question, n°  17, relative à l'apprentissage du code de la route dans les programmes scolaires.

M. Jean-Louis Bricout. Monsieur le ministre de l'éducation nationale, merci de votre présence. Je souhaite vous interroger sur la possibilité d'introduire l'apprentissage du code de la route dans les programmes scolaires et de passer l'examen dans le cadre des programmes officiels de l'éducation nationale. C'est une idée que je porte depuis quelque temps et que j'avais d'ailleurs déjà proposée lors de la discussion de la loi Macron. Dans la continuité de mon engagement, j'ai lancé une pétition citoyenne sur cette question, qui a recueilli près de 500 signatures.

Permettez-moi, monsieur le ministre, de présenter mes arguments en faveur de cette demande.

Vous le savez : l'épreuve théorique du permis de conduire, préalable obligatoire à l'épreuve de conduite, constitue pour les jeunes, notamment en zone rurale, un passeport indispensable pour l'emploi.

D'un point de vue pratique et logistique, rien ne s'oppose à la mise en œuvre de ma proposition : les salles informatiques en capacité d'accueillir des groupes existent déjà et les cours pourraient être dispensés, au moins dans un premier temps, par des intervenants extérieurs sans faire d'ombre aux auto-écoles.

D'un point de vue pédagogique, là encore, les arguments ne manquent pas. Non seulement ces enseignements s'inscriraient dans la continuité des apprentissages à la sécurité dispensés dès l'école élémentaire, mais ils participeraient aussi à l'apprentissage des bons comportements. Vous le savez, monsieur le ministre, on se comporte au volant comme on se comporte dans la vie, et inversement. L'adaptation de son comportement fait d'ailleurs partie intégrante des savoirs fondamentaux, au même titre que la lecture, l'écriture et le calcul – les entrepreneurs que nous rencontrons nous le rappellent sans cesse. Or la première chose que l'on apprend dans le code de la route est justement de bien se comporter.

Il est aussi important de faire le lien entre les enseignements scolaires et leurs applications concrètes dans la vie de tous les jours. L'apprentissage du code de la route en est une parfaite illustration : il permettrait, en quelque sorte, de mieux faire comprendre à notre jeunesse qu'il est utile de faire l'effort d'apprendre.

D'un point de vue économique, dans nos territoires ruraux où la mobilité est un préalable à l'accès à l'emploi, l'impact d'une telle mesure n'est pas neutre.

Concrètement, les candidats pourraient très bien passer l'épreuve théorique dans le cadre d'une convention passée entre votre ministère et les écoles de conduite.

Le 16 novembre 2016, le candidat Emmanuel Macron déclarait : « Je veux libérer l'énergie de ceux qui peuvent, et dans le même temps je veux protéger les plus faibles. » Le dispositif que je propose a vocation à devenir un outil efficace qui contribuera à casser les barrières qui se dressent contre l'autonomie et donc la pleine citoyenneté de notre jeunesse.

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale.

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale. Monsieur le député, je vous remercie pour cette question extrêmement intéressante, qui renvoie effectivement à plusieurs enjeux propres à notre système éducatif et à notre société.

Comme vous le savez, notre système éducatif prévoit déjà, dans une certaine mesure, une éducation à la sécurité routière. L'article L. 312-13 du code de l'éducation prescrit une éducation à la sécurité routière dans les enseignements des premier et second degrés.

Vous avez raison, l'éducation à la sécurité routière participe pleinement à la formation citoyenne des élèves. Elle est conçue comme une éducation progressive et cohérente qui commence à l'école, par l'attestation de première éducation à la route – APER –, et se poursuit au collège, par les attestations scolaires de sécurité routière de niveaux 1 et 2 – ASSR 1 et 2 –, au lycée et dans les centres de formation d'apprentis, par la demi-journée de sensibilisation à la sécurité routière.

L'approche de l'apprentissage des règles de sécurité routière par les élèves est donc avant tout éducative. C'est pourquoi le ministère de l'éducation nationale met en place, parallèlement à cet apprentissage, d'autres actions éducatives, notamment dans le cadre du parcours éducatif de santé, pour informer les élèves du danger de l'usage de produits psychoactifs au volant.

L'éducation à la sécurité routière a pour objectif de permettre aux élèves d'acquérir un comportement responsable sur l'espace routier. Je suis tout à fait d'accord avec vous, monsieur le député : ce que l'on apprend au titre de la sécurité routière vaut, plus généralement, pour le comportement en société. Ces enseignements ne sont donc pas seulement conçus comme un apprentissage du code de la route, qui relève a priori de la compétence du ministère de l'intérieur. Pour autant, vos idées méritent bien entendu d'être étudiées.

Il a déjà été proposé d'organiser le passage des épreuves théoriques du permis de conduire au lycée. Or, vous le savez, la période du lycée est marquée par la préparation du baccalauréat et la construction d'un parcours professionnel. Le ministère de l'éducation nationale regarde donc avec prudence l'idée d'introduire un nouvel examen sans lien direct avec le baccalauréat : lorsqu'elles se cumulent, les bonnes idées de ce genre peuvent en effet s'avérer contre-productives pour nos élèves. Par ailleurs, l'organisation d'un enseignement du code de la route nécessite de poser la question des personnels assurant cette formation.

La loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques permet à des organismes de formation d'utiliser les locaux et équipements des lycées en dehors du temps scolaire. Cette utilisation doit être soumise à l'avis du conseil d'administration de l'établissement et, le cas échéant, à l'accord de la collectivité propriétaire des bâtiments. Les établissements qui identifient des besoins de formation aux épreuves théoriques du permis de conduire peuvent donc déjà s'emparer de cette disposition. Il s'agit d'un premier élément de réponse à votre question, monsieur le député.

Par ailleurs, nous réfléchissons actuellement aux possibilités d'évolution de l'enseignement professionnel et du baccalauréat en général. Dans ce cadre, il est important pour nous de prendre en compte vos idées. Vous pouvez d'ailleurs demander à être auditionné par les personnes actuellement chargées de cette consultation.

À mes yeux, votre idée est intéressante, mais il faut en mesurer tous les tenants et aboutissants. Nous devons rester prudents. En tout cas, je vous remercie de m'avoir posé cette question.

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Bricout.

M. Jean-Louis Bricout. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre, et de l'intérêt que vous portez à cette question. La mobilité est un problème majeur dans les zones rurales.

C'est aussi un problème social : passer le code de la route représente une certaine somme pour une famille. Qu'il puisse être acquis à l'issue de la scolarité, au lycée ou en centre d'apprentissage, constituerait donc une belle avancée sociale pour nos territoires ruraux.

La question de l'apprentissage des comportements et de l'effort d'apprendre est souvent débattue dans notre société, sans que l'on ait tranché s'il faut l'intégrer ou non dans les programmes scolaires.

Le secteur assurantiel, très intéressé par cette question, serait prêt à financer l'acquisition du permis de conduire dans les lycées, avec les régions, pour se donner les moyens d'une telle avancée. Passeport pour l'emploi, le permis de conduire est un élément essentiel pour la jeunesse.

Données clés

Auteur : M. Jean-Louis Bricout (Hauts-de-France - Nouvelle Gauche)

Type de question : Question orale

Rubrique : Enseignement

Ministère interrogé : Éducation nationale

Ministère répondant : Éducation nationale

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 5 décembre 2017

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