15ème législature

Question N° 18073
de Mme Laetitia Saint-Paul (La République en Marche - Maine-et-Loire )
Question écrite
Ministère interrogé > Armées
Ministère attributaire > Armées

Rubrique > défense

Titre > Éligibilité des militaires

Question publiée au JO le : 26/03/2019 page : 2691
Réponse publiée au JO le : 25/06/2019 page : 5854

Texte de la question

Mme Laetitia Saint-Paul appelle l'attention de Mme la ministre des armées sur l'application des dispositions de l'article 33 de la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense, portant modification du code électoral. La réforme de l'éligibilité des militaires en activité de 2018 fait suite à la décision n° 2014-432 QPC du 28 novembre 2014 du Conseil constitutionnel. Les sages avaient alors estimé que l'exercice de mandats électoraux par des militaires en activité ne saurait porter atteinte à la nécessaire libre disposition de la force armée, rendant ces dispositions inconstitutionnelles. Ainsi, à compter de janvier 2020, la fonction de militaire en position d'activité sera compatible, par dérogation, avec le mandat de conseiller municipal dans les communes de moins de 9 000 habitants, et celui de conseiller communautaire dans les établissements publics de coopération intercommunale regroupant moins de 25 000 habitants. Cependant, une limite est conservée en matière de grade des militaires éligibles par l'article L. 231 du code électoral nouvellement rédigé. Celui-ci établit que : « Ne peuvent être élus conseillers municipaux dans les communes situées dans le ressort où ils exercent ou ont exercé leurs fonctions depuis moins de six mois ( ) les officiers et sous-officiers de gendarmerie ainsi que les officiers supérieurs et généraux des autres corps militaires ». Une part importante des officiers ne pourra donc, finalement, exercer le mandat de conseiller municipal tout en conservant ses fonctions, dès lors que son domicile est situé dans le ressort de son lieu d'exercice. En parallèle, dans le cas où un officier élu, en situation d'activité, est en mesure de prétendre à son avancement, l'interprétation stricte des dispositions de l'article L. 231 du code électoral l'obligerait à renoncer à son mandat s'il est proposé au grade de commandant. Bien que cette interdiction se fonde sur le grade du militaire, ses responsabilités exercées et le lieu d'exercice de ces responsabilités, elle l'interpelle sur le fondement de cette inéligibilité relative. Elle l'interroge également sur l'interprétation de ces dispositions en vue des prochaines élections municipales et les dispositions éventuellement prévues afin de permettre à l'ensemble des officiers de prendre pleinement part à la vie publique.

Texte de la réponse

Les dispositions relatives à l'exercice de mandats électifs par les militaires, qui entreront prochainement en vigueur, visent à concilier de manière équilibrée, la nécessité de réduire le champ de l'incompatibilité afin de se conformer à la décision n° 2014-432 QPC du 28 novembre 2014 du Conseil constitutionnel d'une part, et, d'autre part, plusieurs principes s'imposant aux militaires, à savoir le principe de neutralité, l'exigence de disponibilité également rappelée par le Conseil constitutionnel dans sa décision précitée et liée notamment à des nécessités opérationnelles, ainsi que l'obligation de loyalisme. S'agissant du fondement de l'inéligibilité des officiers généraux et officiers supérieurs à certains mandats municipaux (article L. 231 du code électoral), cette inéligibilité concerne les agents publics exerçant des responsabilités importantes à l'échelle d'un département ou d'un arrondissement, afin de ne pas influencer le choix des électeurs. Par analogie avec les principes d'inéligibilité applicables aux fonctionnaires, le ministère des armées a retenu les officiers généraux et les officiers supérieurs, qui ne peuvent donc pas être élus conseillers municipaux « dans les communes situées dans le ressort où ils exercent ou ont exercé leurs fonctions depuis moins de six mois ». Toutefois, cette restriction mesurée ne leur interdit pas d'être élus dans de nombreuses autres communes ou intercommunalités, notamment celles où ils ont leur résidence secondaire, point de stabilité familiale pour les militaires eu égard à leurs régulières mutations professionnelles (au titre du principe de disponibilité en tout temps et en tout lieu prévu à l'article L. 4121-5 du code de la défense). La loi de programmation militaire (LPM) 2019-2025 autorise désormais les officiers subalternes à se porter candidats aux élections municipales sans la restriction précitée. Il est à préciser par ailleurs que dans sa décision QPC susmentionnée, le Conseil constitutionnel a jugé que l'interdiction d'exercer un mandat de conseiller communautaire n'était pas contraire à la Constitution ; le ministère des armées a néanmoins décidé de permettre aux militaires de rester en position d'activité et d'exercer un tel mandat dans les communautés de communes de moins de 25 000 habitants, sous réserve des nécessités opérationnelles des armées. Parallèlement, l'attention est appelée sur le fait qu'un capitaine (grade sommital des officiers subalternes) qui deviendrait commandant (premier grade des officiers supérieurs) serait contraint de renoncer à l'exercice de son mandat local : d'une part cela était également le cas s'agissant des sous-officiers qui changent de catégorie et deviennent officiers (jusqu'à l'entrée en vigueur des nouvelles dispositions), d'autre part, en termes de processus d'élaboration des tableaux d'avancement, ceux-ci sont connus dès le mois de décembre de l'année N-1 pour une promotion effective en N+1 ; les officiers sont donc informés de leur éventuel avancement en amont de leur promotion. Ainsi, ce capitaine, s'il remplit les conditions pour être promu au grade supérieur, aura connaissance en décembre 2019 de son éventuelle inscription au tableau d'avancement en 2020, année des élections municipales dont la date précise n'est pas encore fixée ; il pourra alors se porter candidat, en position éligible (impliquant un choix à opérer entre rester en activité ou demander un détachement) ou non éligible (sans conséquence sur sa situation). Concernant les dispositions applicables aux officiers et sous-officiers de gendarmerie, ces militaires ont été explicitement rajoutés dans les dispositions pour deux raisons : ce sont des agents publics spécifiques exerçant des missions régaliennes susceptibles d'influencer le choix des électeurs ; les fonctionnaires des corps actifs de la police nationale étant cités, le principe d'égalité a conduit à transposer cette inéligibilité aux gendarmes (sous-officiers et officiers), les gendarmes adjoints volontaires (GAV) étant des militaires du rang de la gendarmerie, qui exercent des missions comparables à celles des adjoints de sécurité dans la police nationale. Lors des prochaines élections municipales, les militaires élus bénéficieront des garanties accordées aux titulaires des mandats locaux reconnues par le code général des collectivités territoriales (CGCT) sous réserve des nécessités liées à la préparation et à la conduite des opérations ainsi qu'à la bonne exécution des missions des forces armées et formations rattachées. Afin de permettre aux officiers de prendre pleinement part à la vie publique, ceux qui souhaitent exercer à temps complet un mandat local (exercice des fonctions de maire ou d'adjoint au maire), national ou européen, peuvent concrétiser cet engagement citoyen en sollicitant leur placement en position de détachement, situation qui est également celle adoptée par les agents civils du secteur public qui désirent exercer de tels mandats. A contrario, pour demeurer en activité, ces militaires doivent se référer aux nouvelles dispositions précitées et analysées ci-dessus, le principe de disponibilité du militaire en tout lieu et en tout temps étant un des principes fondamentaux inscrits dans le code de la défense.