application de la charia au sultanat de Brunei
Question de :
M. Fabien Lainé
Landes (1re circonscription) - Mouvement Démocrate et apparentés
Question posée en séance, et publiée le 4 avril 2019
APPLICATION DE LA CHARIA AU SULTANAT DE BRUNEI
M. le président. La parole est à M. Fabien Lainé.
M. Fabien Lainé. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères.
À partir d'aujourd'hui, mercredi 3 avril, le sultanat de Brunei a décidé d'instaurer la charia, précisant que ses châtiments ne s'appliqueraient qu'aux citoyens musulmans. Ces châtiments, rappelons-les : la mise à mort par lapidation pour homosexualité ou adultère ; l'amputation d'un pied ou d'une main pour vol ; la flagellation publique pour avortement.
Par ces mesures, d'une violence inouïe, le sultanat contrevient à tout ce qui fonde notre tradition philosophique, celle de l'unité du genre humain. Pour paraphraser le poète André Chénier, les valeurs que nous défendons sont de vie, de relations, d'amour et de justice. Elles doivent nous aider à penser le futur, pour avancer dans la compréhension fraternelle d'autrui, pour affirmer la singularité de l'expérience humaine et l'universalité de sa condition.
La France, porteuse des droits de l'homme, où l'homosexualité a été dépénalisée en 1791 et déclassifiée comme maladie en 1981, ne peut rester muette face à des atteintes graves aux droits de chaque homme ou de chaque femme, soumis à la règle de l'absolutisme et du fanatisme.
Monsieur le ministre, en décembre, à l'occasion des 70 ans de la Déclaration universelle des droits de l'homme, vous avez défini la stratégie de la France en fonction d'objectifs et de moyens, pour défendre efficacement nos principes contre des pratiques barbares.
La France entretient des relations avec Brunei depuis son indépendance, en 1984. Cette relation bilatérale n'a cessé de gagner en substance et en connaissance mutuelle. Notre pays dispose donc des leviers diplomatiques pour agir.
Monsieur le ministre, quelles sont les actions que vous envisagez de mener au nom de la France face à cet obscurantisme d'un autre âge ? (Applaudissements sur les bancs du groupe MODEM et sur quelques bancs du groupe LaREM. – M. Martial Saddier applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères.
M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères. Monsieur le député, vous avez raison, aucun mot n'est assez fort pour décrire l'intensité de l'indignation qui nous a tous saisis à l'annonce de ces décisions. Avec cette législation et ces mesures barbares, inhumaines, cruelles, le Brunei va clairement à l'encontre de l'ensemble de ses engagements internationaux.
Le 6 mai prochain, le sultanat devra rendre des comptes devant les Nations unies à l'occasion de l'examen périodique universel auquel il est astreint. Nous avons d'ores et déjà commencé à prendre des mesures avec nos partenaires européens, car les droits des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles et trans – LGBT –, que vous évoquez, sont au cœur des droits de l'homme.
Comme vous l'avez rappelé, il y a soixante-dix ans, non loin d'ici, au Palais de Chaillot, était adoptée la Déclaration universelle des droits de l'homme. Cette déclaration n'est pas de Paris ni de New York ; elle n'est pas de l'Occident ni du siècle passé : elle est une exigence universelle, inaliénable, qui s'adresse à tous. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, MODEM et SOC.)
Face à cela, c'est une mobilisation de tous les instants, dans toutes les instances. C'était, il y a quelques semaines, Marlène Schiappa, qui intervenait à la tribune de l'ONU, à New York. C'était Jean-Yves Le Drian, qui mettait en place une stratégie internationale. Avec nos collègues et partenaires européens, lorsqu'il s'agit de dire les choses les yeux dans les yeux, nous le faisons.
M. Jean-Paul Lecoq. Dans les accords commerciaux, il faut le dire !
M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État . J'en veux pour preuve Xavier Bettel, le Premier ministre luxembourgeois, qui, face à certains États membres de la Ligue arabe, a courageusement dit tout haut ce que tout le monde dit ici, tout fort.
La France s'honore et continue à s'honorer de porter très haut cette flamme universelle que nous défendons. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.)
Auteur : M. Fabien Lainé
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : Europe et affaires étrangères (M. le SE auprès du ministre)
Ministère répondant : Europe et affaires étrangères (M. le SE auprès du ministre)
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 4 avril 2019