15ème législature

Question N° 184
de Mme Sylvie Charrière (La République en Marche - Seine-Saint-Denis )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Éducation nationale
Ministère attributaire > Éducation nationale

Rubrique > enseignement

Titre > Diversification du statut des écoles hors contrat

Question publiée au JO le : 13/02/2018
Réponse publiée au JO le : 23/02/2018 page : 1468

Texte de la question

Mme Sylvie Charrière appelle l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale sur l'intérêt de diversifier le statut des écoles hors contrat. Le développement important des écoles hors contrat se poursuit. Cela doit interpeller. Un rapport réalisé en 2016 dans l'académie de Versailles a pointé certaines dérives inquiétantes, notamment concernant la qualité de l'enseignement dispensé qui n'est parfois pas conforme au droit à l'instruction garanti à l'enfant. Mais de quoi parle-t-on lorsque l'on parle d'école hors contrat ? Le statut du hors contrat concerne, entre autres, des écoles confessionnelles mais aussi des écoles aux pédagogies alternatives, des écoles bilingues et même des organismes bien connus de soutien scolaire. Une circulaire récente a renforcé les contrôles. On devine, à travers ces contrôles, que ce sont surtout les écoles confessionnelles, bien qu'elles ne représentent qu'un quart des écoles hors contrat, qui étaient visées. S'il est important que l'État soit vigilant quant au développement de ce type d'école, comment l'État pourrait-il soutenir des écoles, qui, elles, visent à répondre à une problématique que l'éducation nationale peine à régler : la déscolarisation précoce. C'est le cas, par exemple, des grands décrocheurs ou bien de certains élèves souffrant de dyslexie et de trouble de l'attention. Elle s'est rendue dans l'unique école de production d'Île-de-France, qui s'occupe de jeunes déscolarisés âgés de 15 à 18 ans, au profil différent : décrocheurs précoces du collège, jeunes relevant de la protection judiciaire ou bien encore mineurs étrangers non accompagnés. De même, elle a aussi visité une petite structure, les Chrysalides, qui prend en charge des enfants souffrant de troubles dys en refus scolaire. Ces établissements constituent une voie alternative de réussite et d'insertion et en ce sens remplissent, de fait, une véritable mission d'utilité publique qui mériterait d'être mise en valeur et soutenue par l'éducation nationale. Si l'État peut et doit contrôler et sanctionner les dérives, à l'inverse, il devrait aussi pouvoir valoriser les structures vertueuses. Ainsi elle lui demande s'il ne faudrait pas créer un statut intermédiaire qui apporterait une meilleure visibilité et un meilleur soutien à ce type d'écoles hors contrat.

Texte de la réponse

STATUT DES ÉCOLES HORS CONTRAT


Mme la présidente. La parole est à Mme Sylvie Charrière, pour exposer sa question, n°  184, relative au statut des écoles hors contrat.

Mme Sylvie Charrière. Monsieur le ministre de l'éducation nationale, le développement important des écoles hors contrat se poursuit. Cela doit nous interpeller. Un rapport réalisé en 2016 dans l'académie de Versailles a pointé certaines dérives inquiétantes, au regard notamment de la qualité de l'enseignement dispensé, qui n'est parfois pas conforme au droit à l'instruction garanti à l'enfant.

Le statut du hors contrat concerne, entre autres, des écoles confessionnelles mais aussi des écoles aux pédagogies alternatives, des écoles bilingues et même des organismes bien connus de soutien scolaire. Ces établissements ne reçoivent pas de subventions publiques et leurs frais de fonctionnement ne sont pas pris en charge comme c'est le cas pour les établissements privés sous contrat, dont les enseignants sont rémunérés par l'État.

Une circulaire récente a renforcé les contrôles. On devine, à travers ceux-ci, que ce sont surtout les écoles confessionnelles, bien qu'elles ne représentent qu'un quart des écoles hors contrat, qui étaient visées. S'il est important que l'État soit vigilant quant au développement de ce type d'écoles, comment pourrait-il ne pas soutenir des écoles, qui, elles, visent à répondre à une problématique que l'éducation nationale peine parfois à régler, la déscolarisation précoce et l'échec scolaire ? C'est le cas, par exemple, des grands décrocheurs ou bien de certains élèves souffrant de dyslexie ou de troubles de l'attention.

J'ai ainsi pu me rendre dans l'unique école de production d'Île-de-France qui s'occupe de jeunes déscolarisés âgés de quinze à dix-huit ans, aux profils divers – décrocheurs précoces du collège, jeunes relevant de la protection judiciaire de la jeunesse ou bien encore mineurs étrangers non accompagnés. Cette mini-entreprise obtient d'excellents résultats à l'examen du certificat d'aptitude professionnelle – CAP – et, surtout, permet à 100 % des jeunes qu'elle accueille de trouver ensuite un emploi.

Je me suis aussi rendue dans une petite structure de ma circonscription, Les Chrysalides, qui prend en charge des élèves du primaire souffrant de troubles dys en refus scolaire. Elle permet à la grande majorité de ces enfants, suivis par la maison départementale des personnes handicapées – la MDPH –, de réintégrer l'école publique.

Ces établissements rencontrent souvent des difficultés de financement alors qu'ils constituent une voie alternative de réussite et d'insertion et, en ce sens, accomplissent de fait une véritable mission d'utilité publique qui mériterait d'être mise en valeur et soutenue par l'éducation nationale. Si l'État peut et doit contrôler et sanctionner les dérives, il devrait aussi pouvoir, à l'inverse, valoriser les structures vertueuses. Ne faudrait-il donc pas créer un statut intermédiaire qui apporterait une plus grande visibilité et un plus ferme soutien à ce type d'écoles hors contrat ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale.

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale. Madame la députée, vous me demandez quelles sont les mesures envisagées pour mieux soutenir les établissements scolaires privés qui ne sont pas liés à l'État par contrat et qui se spécialisent notamment dans l'accueil des grands décrocheurs ou de certains élèves souffrant de troubles de l'attention. Je partage bien sûr entièrement, comme tous les agents de mon ministère, votre préoccupation concernant la scolarisation de ces enfants.

Le service public de l'éducation nationale est pleinement engagé dans la voie de l'inclusion scolaire, conformément non seulement à la loi, mais aussi aux préconisations internationales. C'est ainsi que j'ai annoncé, le 4 décembre 2017, une série d'importantes mesures concrètes destinées à renforcer les dispositifs existants en la matière. Le budget que j'ai présenté au Parlement pour 2018 prévoit à ce titre une augmentation de 46 % des moyens destinés à l'inclusion scolaire, que ce soit dans l'enseignement public ou dans l'enseignement privé associé au service public. Concrètement, cela représente une somme de 1,2 milliard d'euros, au lieu de 800 millions en 2017.

S'agissant du décrochage scolaire, des mesures spécifiques sont également prises. En outre, les écoles de production bénéficient déjà d'aides de la part des collectivités locales et peuvent percevoir une part de la taxe d'apprentissage, alors même qu'elles ne sont pas intégrées au service public. La majorité de ces écoles font l'objet d'une reconnaissance formelle de l'État depuis un arrêté du 1er octobre 2007.

Toutefois, je n'ignore pas que certains enfants et certaines familles ont des besoins éducatifs particuliers et qu'ils ne trouvent pas toujours une réponse adaptée dans l'enseignement public ou dans l'enseignement privé sous contrat. Ils se tournent alors vers des établissements dits hors contrat.

Or ces établissements ne sont pas soumis aux mêmes contraintes que les établissements qui relèvent du service public. Par conséquent, le Conseil constitutionnel précise régulièrement que les aides financières publiques susceptibles de leur être accordées par la loi peuvent être strictement encadrées, notamment au regard du principe d'égalité devant les charges publiques.

Je reconnais bien volontiers l'apport des établissements privés hors contrat à la mission d'enseignement, en particulier pour ces enfants à besoins spécifiques. Votre souhait d'un statut intermédiaire doit toutefois être mis en balance avec le principe constitutionnel que je viens d'évoquer, ainsi qu'avec la contrepartie de l'aide de l'État et des collectivités : le respect des méthodes, des programmes et des objectifs de l'enseignement public.

L'accompagnement de ces établissements doit donc être envisagé selon des modalités plus souples, comme l'expérimentation ou le développement de partenariats avec des acteurs locaux, en premier lieu les collectivités territoriales.

Une proposition de loi sur le sujet, qui vient d'être votée par le Sénat, sera bientôt soumise à votre assemblée : c'est l'occasion d'indiquer que le cadre juridique actuel et celui qui se précise pour l'avenir nous permettent tout à fait de concilier liberté de l'enseignement, protection de l'enfance et de la jeunesse et encouragement des initiatives heureuses, sans bouleverser tout notre environnement juridique.

Mme la présidente. La parole est à Mme Sylvie Charrière.

Mme Sylvie Charrière. J'ai peut-être une piste à vous proposer, monsieur le ministre. Une loi de 2013 a créé dans l'enseignement supérieur un statut d'établissement privé d'intérêt général, qui peut être attribué à des établissements privés à but non lucratif créés par des associations ou par des fondations reconnues d'utilité publique. Ne pourrait-on transposer ce statut à l'enseignement scolaire ?