Lutte contre le démarchage commercial téléphonique abusif
Question de :
M. Hubert Wulfranc
Seine-Maritime (3e circonscription) - Gauche démocrate et républicaine
M. Hubert Wulfranc attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur l'inefficacité du dispositif d'interdiction de démarchage téléphonique Bloctel instauré par la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation. Ce service confié à la société Opposetel s'avère particulièrement dysfonctionnel selon les témoignages des utilisateurs inscrits sur la liste d'opposition au démarchage tels qu'attesté par le sondage publié par l'organisme « 60 millions de consommateurs » en mai 2017. Près d'un inscrit sur deux au dispositif Bloctel déclarait ne pas avoir perçu une quelconque baisse du démarchage téléphonique. Selon cette même étude, seuls 15 % des inscrits déclaraient avoir constaté une amélioration significative de la situation. La relative inefficacité du dispositif tient vraisemblablement à la faiblesse des sanctions financières infligées aux entreprises qui ne respectent pas le dispositif Bloctel, ainsi qu'à la lourdeur des procédures devant être engagées par les administrés victimes de démarchage abusif. Une première proposition de loi « visant à renforcer les droits des consommateurs en matière de démarchage téléphonique » a été soumise à l'examen de l'Assemblée nationale le 22 juin 2018. Le texte proposait d'inverser la logique du système de consentement au démarchage. Seules les personnes ayant donné expressément leur accord pour communiquer leurs coordonnées téléphoniques à des fins de prospection commerciale auraient pu être démarchées par téléphone. À défaut d'accord, les données personnelles auraient été réputées confidentielles et non utilisables à des fins de prospection commerciale. Ce même texte proposait également de fixer un indicatif téléphonique unique pour l'ensemble des entreprises procédant à du démarchage commercial. Ce dispositif aurait permis d'identifier automatiquement la nature commerciale de l'appel. Ces deux dispositions ont malheureusement été rejetées en première lecture. Depuis, une nouvelle proposition de loi « visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux » a été soumise en première lecture à l'Assemblée nationale et au Sénat. Concernant le démarchage téléphonique commercial, ce texte se limite essentiellement à augmenter les sanctions financières infligées aux entreprises qui ne respecteraient pas l'interdiction de prospecter les numéros de téléphones inscrits au dispositif Bloctel. Si cette disposition peut rendre la législation un peu plus dissuasive celle-ci ne semble pas, à elle seule, être en mesure d'améliorer significativement la situation faite aux victimes de démarchage commercial abusif. Une majorité de personnes inscrites sur Bloctel renonce à signaler ses pratiques face au nombre d'éléments factuels à communiquer à la société Opposetel (nom de la société ou de la personne a l'origine de la démarche commerciale, secteur d'activité, numéro de téléphone, date et heure des appels). À défaut d'une volonté affichée d'interdire le démarchage commercial téléphonique non sollicité, comme cela est en vigueur en Allemagne, ou de le restreindre à certaines plages horaires, il lui demande quelles mesures complémentaires entend prendre le Gouvernement pour assurer la tranquillité des citoyens qui ne souhaitent pas être démarchés au téléphone dans le cadre de campagne de prospection commerciale.
Réponse publiée le 15 décembre 2020
Dans le souci de protéger les consommateurs, notamment les plus fragiles d'entre eux, d'un démarchage téléphonique intempestif et intrusif, l'article L. 223-1 du code de la consommation, issu de l'article 9 de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation, interdit à un professionnel, sous peine de sanction administrative (amende de 15 000 euros pour une personne physique et de 75 000 euros pour une personne morale), de démarcher par téléphone des consommateurs inscrits sur une liste d'opposition au démarchage téléphonique. Ce dispositif compte, aujourd'hui, 4 millions d'inscrits. En moyenne, chacun des près de 10 millions de numéros inscrits sur cette liste d'opposition au démarchage téléphonique est retiré chaque semaine de 6 listes de téléprospection, soit autant d'appels évités. Pour autant, les nuisances téléphoniques perdurent pour nombre de nos concitoyens, signe que de trop nombreuses entreprises ne respectent pas la loi. Le Gouvernement a manifesté à plusieurs reprises sa volonté de renforcer la protection des consommateurs contre les pratiques de démarchage téléphonique abusif. Ainsi, il a demandé au Conseil national de la consommation (CNC) d'établir un état des lieux des pratiques de démarchage téléphonique et de proposer des mesures pour mieux lutter contre les appels téléphoniques non sollicités et la fraude aux numéros surtaxés. Les travaux du CNC, qui se sont déroulés de septembre 2018 à janvier 2019 dans le cadre d'un groupe de travail dédié, ont fait l'objet d'un rapport qui a été diffusé le 22 février 2019 et qui apporte un éclairage factuel et documenté sur le démarchage téléphonique et la fraude aux numéros surtaxés, de nature à nourrir les débats parlementaires sur ces questions. Afin de renforcer l'efficacité du dispositif d'opposition au démarchage téléphonique, une proposition de loi visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux a été adoptée par le Parlement le 15 juillet dernier et promulguée le 24 juillet. Ce texte aggrave, afin de les rendre plus dissuasives, les sanctions encourues en cas de non-respect du dispositif d'opposition au démarchage téléphonique et améliore l'information des consommateurs sur leur droit de s'opposer à ce mode de sollicitation commerciale. Il introduit également une interdiction sectorielle du démarchage téléphonique dans le secteur de la rénovation énergétique où les abus étaient particulièrement graves ces dernières années. Il permet, en outre, de lutter plus efficacement contre les usurpations de numéros de téléphone qui complexifient les enquêtes des agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). Pour finir, un décret encadrera les horaires au cours desquels le démarchage téléphonique sera possible afin de mieux protéger la vie privée des Français. En complément de cette action normative, le ministère de l'économie, des finances et de la relance, et en particulier la DGCCRF, demeurent mobilisés pour lutter contre les pratiques de démarchage téléphonique illégales. La DGCCRF fait de la lutte contre les sollicitations téléphoniques indésirables une priorité depuis plusieurs années et poursuit une action répressive résolue pour sanctionner les professionnels qui ne respectent pas leurs obligations légales et, de manière plus générale, les pratiques délictuelles qui s'y rattachent. Ainsi, en 2019, plus de 1 000 établissements ont été contrôlés conduisant à la sanction de 77 démarcheurs ne respectant pas le dispositif BLOCTEL, pour un montant total d'amende de 2,5 M€ (montant triplé par rapport à l'année 2018). En 2020, 67 sanctions représentant plus de 2,6 M € d'amendes ont d'ores et déjà été prononcées. Par ailleurs, la DGCCRF généralise une politique de « Name and Shame » : plusieurs décisions de sanctions ont été publiées sur son site internet. Le Gouvernement est pleinement conscient que pour beaucoup de nos concitoyens, les appels téléphoniques, non désirés et répétés, effectués à tout moment de la journée, dans le but de leur vendre un produit ou de leur fournir un service, constituent une véritable nuisance. Il continue donc à agir pour renforcer la lutte contre ces pratiques.
Auteur : M. Hubert Wulfranc
Type de question : Question écrite
Rubrique : Consommation
Ministère interrogé : Économie et finances
Ministère répondant : Économie, finances et relance
Dates :
Question publiée le 9 avril 2019
Réponse publiée le 15 décembre 2020