Question écrite n° 18645 :
Redressement URSSAF - Abattement professionnel de 10 %

15e Législature

Question de : M. Michel Zumkeller
Territoire de Belfort (2e circonscription) - UDI, Agir et Indépendants

M. Michel Zumkeller interroge M. le ministre de l'économie et des finances sur les pratiques de l'URSSAF de Bourgogne-Franche-Comté, qui exploite depuis plusieurs semaines une jurisprudence de la Cour de cassation pour opérer des redressements et contester l'abattement de 10 % relatif aux frais professionnels des salariés (restauration, entretien vêtements de travail, etc.). En effet, cette jurisprudence (arrêts du 14 février 2013 et 19 janvier 2017) impose aux entreprises une condition supplémentaire pour bénéficier de cet abattement : que les salariés aient nécessairement avancé les frais professionnels. Or, dans les faits, les entreprises règlent les frais de restaurant de leurs salariés, lorsque ceux-ci interviennent sur des chantiers distants de leur domicile et du siège de l'entreprise. Les dispositions de l'ACOSS (DSS/SDFSS/ B n° 2005.389 du 19 août 2005) et du Gouvernement (circulaire ministérielle) permettaient d'ailleurs aux entreprises d'appliquer l'abattement de 10 % lorsque le restaurant était payé aux salariés. La Cour de cassation a donc décidé de ne pas tenir compte et d'exiger l'avance de frais. Une position que les URSSAF de Bourgogne-Franche-Comté ont adoptée sans en faire la moindre information préalable aux entreprises. Cette décision inflige des conséquences financières extrêmement lourdes pour les entreprises (de l'ordre de plusieurs milliers d'euros), laissant craindre des destructions d'emplois, voire des cessations d'activités. La CAPEB dénonce donc une application immédiate, sans délai, sans harmonisation nationale et sans concertation d'une jurisprudence dont l'effet conduira à une augmentation du coût de la construction, une hausse des charges des entreprises et une baisse du pouvoir d'achat des salariés. M. le député souhaite rappeler que cette position est en outre contraire au droit à l'erreur prôné par le Gouvernement et à la volonté de favoriser le pouvoir d'achat. Il lui demande donc de clarifier la situation au plus vite en redéfinissant clairement le cadre de l'abattement de 10 % afin de pouvoir sécuriser les entreprises.

Réponse publiée le 3 décembre 2019

L'article 9 de l'arrêté du 20 décembre 2002 relatif aux frais professionnels déductibles pour le calcul des cotisations de sécurité sociale prévoit que la déduction forfaitaire spécifique (DFS) est réservée à certaines professions qui comportent des frais dont le montant est notoirement supérieur à celui résultant du dispositif relatif aux frais professionnels. La déduction forfaitaire spécifique correspond à un abattement d'assiette des cotisations sociales représentatif des frais professionnels dont bénéficient plusieurs secteurs d'activité, notamment la construction, le transport, l'aviation, le commerce, la presse et la culture. Originellement représentatif des frais professionnels engagés par les salariés, ce dispositif est désormais sans lien avec ces derniers et pose un problème de mise en œuvre en cas de cumul avec d'autres remboursements de frais. Il est par ailleurs fréquemment critiqué car, en réduisant l'assiette de cotisations, il obère les droits des salariés, notamment en matière de droits à retraite. Certains employeurs, comme ceux du transport routier de voyageurs, l'ont ainsi progressivement abandonné. La Cour de cassation, à travers plusieurs jurisprudences (Cour de cassation, 14 février 2013 n° 11-27032 ; Cour de cassation, 19 janvier 2017, n° 16-10782), est venue préciser que pour bénéficier de la DFS le salarié doit remplir deux conditions cumulatives : faire partie de la liste des professions prévues à l'article 5 de l'annexe IV du code général des impôts dans sa rédaction en vigueur au 31 décembre 2000 et exposer des frais professionnels lors de son activité professionnelle. L'appartenance à l'une des professions visées à l'article 5 de l'annexe IV du code général des impôts ne peut dont suffire en soit à permettre le bénéfice de la déduction forfaitaire spécifique. Il doit de surcroît être établi que le salarié concerné est effectivement amené à exposer des frais supplémentaires de nourriture, de logement ou encore d'hébergement du fait de son activité, sans quoi l'abattement pour frais professionnels ne peut valablement être appliqué. A cet égard, il appartient à l'employeur de démontrer que le salarié a réellement engagé des frais professionnels. Ces deux conditions remplies, le bénéfice de la déduction forfaitaire spécifique de 10 % dans le secteur du bâtiment et des travaux publics est admis. Enfin, afin de limiter l'effet d'aubaine lié à l'interaction entre renforcement des allègements généraux et DFS, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 a prévu que la rémunération prise en compte pour la détermination du coefficient d'allègement général se rapproche d'une assiette de cotisations qui ne tient pas compte de l'application d'une déduction forfaitaire spécifique. Il est désormais prévu qu'à compter du 1er janvier 2020, les allègements généraux dont bénéficient les employeurs éligibles à la DFS seront plafonnés à 130 % des allègements auxquels a droit un employeur de droit commun pour un salarié à même niveau de salaire. Ce plafonnement, qui sera instauré par voie réglementaire, maintient un gain très significatif en faveur des employeurs éligibles à la DFS, et sera sans impact sur la rémunération nette des salariés.

Données clés

Auteur : M. Michel Zumkeller

Type de question : Question écrite

Rubrique : Industrie

Ministère interrogé : Économie et finances

Ministère répondant : Action et comptes publics

Dates :
Question publiée le 9 avril 2019
Réponse publiée le 3 décembre 2019

partager