Situation de l'aciérie d'Hagondange
Question de :
M. Belkhir Belhaddad
Moselle (1re circonscription) - La République en Marche
M. Belkhir Belhaddad attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur la situation de l'aciérie d'Hagondange, dans le cadre du plan de reprise du groupe Ascometal. Le tribunal de grande instance de Strasbourg a décidé de retenir, par décision du 28 janvier 2018, l'offre du groupe germano-suisse Schmolz-et-Bickenbach pour reprendre le groupe Ascometal. Cette décision clôt plusieurs mois d'incertitudes pour les salariés et les dirigeants du groupe. En s'appuyant sur les garanties, notamment industrielles et financières du groupe repreneur, le juge semble avoir tiré les enseignements des faiblesses de la précédente reprise et avoir décidé d'adosser Ascometal à un projet solide, qui ne va pas sans poser des questions importantes pour l'avenir. La perspective de fermeture, fin 2019, de l'aciérie d'Hagondange, avec une perspective de transfert d'activité en Allemagne, entraîne des risques importants : un risque au regard des clients, avec des pertes d'homologations, susceptible d'avoir un impact sur les autres sites d'Ascometal et sur les forgerons ; un risque financier, car la concentration de deux fournisseurs actuellement concurrents va pousser certains clients à diversifier leurs sources d'approvisionnement ; un risque social dans un bassin qui en a déjà connu de nombreux ; un risque logistique relatif à la maîtrise des flux et à l'augmentation des délais de livraison ; un risque environnemental, par la multiplication du nombre de camions sur les routes ; un risque fiscal, puisque si la production est assurée en Allemagne, la valeur ajoutée réalisée en France est minorée, tout comme l'impôt sur les sociétés. Cette aciérie souffre, en lien avec la fragilité du plan de reprise précédent qu'il évoquait, d'un manque d'investissement chronique au cours des précédentes décennies. Un investissement de 15 millions d'euros, selon certaines sources, permettrait de retrouver un niveau de performance et de coûts comparables à la concurrence, et de développer des parts de marché sur des marchés où le groupe Schmolz-et-Bickenbach n'est pas présent : vilebrequins, crémaillères, roulements et injections. Un développement sur le marché des éoliennes est également envisageable. Aussi, sa question est double. Il lui demande si des négociations entre Bercy et le groupe repreneur sont envisageables pour favoriser le maintien de la production par l'aciérie d'Hagondange. Il lui demande également si, en cas d'accord du groupe concerné, il est envisageable de flécher une aide directe de l'État, via un de ses outils d'investissement, pour remettre aux niveaux requis par les marchés cet unité de production.
Réponse en séance, et publiée le 23 février 2018
ACIÉRIE D'HAGONDANGE
Mme la présidente. La parole est à M. Belkhir Belhaddad, pour exposer sa question, n° 186, relative à l'aciérie d'Hagondange.
M. Belkhir Belhaddad. Madame la secrétaire d'État, par décision du 28 janvier dernier, le tribunal de grande instance de Strasbourg a décidé de retenir l'offre du groupe germano-suisse Schmolz + Bickenbach pour reprendre le groupe Ascometal. Cette décision clôt plusieurs mois d'incertitude pour les salariés et les dirigeants du groupe.
En s'appuyant sur les garanties, notamment industrielles et financières du groupe repreneur, le juge semble avoir tiré les enseignements des faiblesses de la précédente reprise et avoir décidé d'adosser Ascometal à un projet solide, qui ne va pas sans poser de questions importantes pour l'avenir.
La perspective de fermeture, fin 2019, de l'aciérie d'Hagondange, avec un transfert d'activité en Allemagne, entraîne des risques importants : un risque au regard des clients, avec des pertes d'homologations, susceptibles d'avoir un impact sur les autres sites d'Ascometal et sur les forgerons ; un risque financier, car la concentration de deux fournisseurs actuellement concurrents poussera certains clients à diversifier leurs sources d'approvisionnement ; un risque social dans un bassin qui en a déjà connu de nombreux ; un risque logistique relatif à la maîtrise des flux et à l'allongement des délais de livraison ; un risque environnemental, par la multiplication du nombre de camions sur nos routes ; un risque fiscal, enfin, puisque, si la production est assurée en Allemagne, la valeur ajoutée réalisée en France sera minorée, ainsi que les recettes d'impôt sur les sociétés.
En lien avec la fragilité du plan de reprise précédent que j'évoquais, cette aciérie a souffert d'un manque chronique d'investissements au cours des décennies précédentes. Selon certaines sources, un investissement de 15 millions d'euros permettrait de retrouver un niveau de performance et de coûts comparable à celui de la concurrence, et de développer des parts de marché sur des marchés où le groupe Schmolz + Bickenbach n'est pas présent aujourd'hui – vilebrequins, crémaillères, roulements et injections. Un développement sur le marché des éoliennes est également envisageable.
Aussi, madame la secrétaire d'État, ma question est double. Des négociations entre votre ministère et le groupe repreneur sont-elles envisageables pour favoriser le maintien de la production par l'aciérie d'Hagondange ? En cas d'accord du groupe concerné, est-il envisageable de flécher une aide directe de l'État, au travers de l'un de ses outils d'investissement, pour remettre cette unité de production au niveau requis par les marchés ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances.
Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances. Monsieur le député, le site d'Hagondange en Moselle, qui emploie 480 salariés, était intégré au groupe Ascometal, dont le plan industriel n'a pu être exécuté du fait de l'ouverture d'un redressement judiciaire, le 22 novembre 2017. Ce plan prévoyait déjà la fermeture de l'aciérie présente sur le site d'Hagondange.
Du fait des difficultés financières chroniques d'Ascometal, cette aciérie souffre, vous l'avez dit, d'un important retard d'investissement. Celui-ci se traduirait aujourd'hui par un important besoin d'investissements de remise à niveau, si l'on envisageait une éventuelle poursuite d'activité, alors même que l'aciérie est sous-utilisée par rapport à sa capacité de production.
Il existe en effet en Europe une surcapacité de production d'acier liquide pour les aciers spéciaux. Aussi, Schmolz + Bickenbach, comme Liberty, l'autre candidat à la reprise, prévoyaient, dans les offres remises au tribunal de grande instance de Strasbourg, de réduire cette surcapacité en maintenant la fermeture de l'aciérie prévue par Ascometal.
Le calendrier de cette fermeture, tel que communiqué par Schmolz + Bickenbach dans son offre, serait flexible et n'a pas, à ce jour, été présenté à l'État ni discuté avec l'entreprise. Il devrait en pratique prévoir la continuité de l'approvisionnement des sites servis par l'aciérie, qui seraient alors progressivement servis par les autres aciéries du groupe. Ce calendrier devrait également respecter les engagements pris par le groupe devant l'État, relatifs à la fourniture de clients sensibles, en particulier dans le domaine de la défense.
Par ailleurs, Schmolz + Bickenbach prévoit de réaliser sur le site 26 millions d'euros d'investissements en trois ans pour assurer la compétitivité et le développement du laminoir ainsi que de l'atelier de parachèvement, qui demeureront en service. La concentration de la production d'aciers dans les aciéries de Schmolz + Bickenbach permettra également de réduire significativement les coûts d'approvisionnement du laminoir d'Hagondange et, ainsi, de pérenniser l'avenir du reste du site.
L'État prendra en considération avec une grande bienveillance tout projet de maintien de la production de cette aciérie. Les éventuels soutiens publics ne peuvent toutefois s'envisager que dans le respect de la réglementation. Celle-ci impose en pratique que, dans le domaine de la sidérurgie, l'État ou ses opérateurs se comportent comme des investisseurs avisés en économie de marché. À ce stade, Schmolz + Bickenbach n'a d'ailleurs sollicité aucun financement public pour la reprise d'Ascometal ni pour le financement des investissements importants, supérieurs à 80 millions d'euros, prévus dans l'outil industriel d'Ascometal en France.
Auteur : M. Belkhir Belhaddad
Type de question : Question orale
Rubrique : Emploi et activité
Ministère interrogé : Économie et finances
Ministère répondant : Économie et finances
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 13 février 2018