15ème législature

Question N° 189
de Mme Typhanie Degois (La République en Marche - Savoie )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Économie et finances
Ministère attributaire > Économie et finances

Rubrique > industrie

Titre > Soutien aux industries hyper électro-intensives

Question publiée au JO le : 13/02/2018
Réponse publiée au JO le : 23/02/2018 page : 1467

Texte de la question

Mme Typhanie Degois interroge M. le ministre de l'économie et des finances sur la protection de la compétitivité des industries hyper électro-intensives (HEI). Le décret n° 2016-141 du 11 février 2016 a défini le statut d'électro-intensif en différenciant les sites dits électro-intensifs et ceux hyper électro-intensifs. Ainsi, les industries hyper électro-intensives sont caractérisées par une utilisation de l'électricité comme matière première, qu'il s'agisse de réduction chimique, d'électrolyse ou de procédés métallurgiques. Pour ce type d'industries, le coût de l'électricité représente une part substantielle des coûts de production, à savoir environ 30 %. Aujourd'hui, ces industries rassemblent près de 10 000 emplois directs et 40 000 emplois indirects en France. Elles représentent donc un élément clé de l'économie française. Ces industries permettent notamment, en alimentant des filières locales, de développer des solutions industrielles à forte valeur ajoutée, comme le photovoltaïque ou l'aéronautique, et participent ainsi très significativement à l'effort de recherche et développement du pays. Par conséquent, la survie et le développement des industries hyper électro-intensives en France nécessitent l'établissement rapide d'une stratégie assurant une visibilité à long terme sur leur approvisionnement en électricité. Faisant face à des problématiques depuis la fin des tarifs régulés de vente d'électricité en 2015 et des contrats historiques adaptés, les industries hyper électro-intensives sont depuis fortement exposées à la concurrence mondiale. En effet, les approvisionnements énergétiques de leurs principaux concurrents, comme la Chine, le Moyen-Orient ou les États-Unis, sont aujourd'hui bien plus compétitifs. Les industries françaises ne parviennent plus à se mesurer à la concurrence internationale dès lors que les conditions ne sont plus équitables. Par ailleurs, l'absence de visibilité sur le long terme pénalise les investissements industriels et limite les effets bénéfiques des mécanismes mis en place. Enfin, malgré l'euro-compatibilité des dispositifs, confirmée par le rapport d'enquête rendu par la Commission européenne sur les mécanismes de capacité fin 2016, l'interruptibilité et la réduction du tarif de transport d'électricité sont soumises à notification. Des dispositions ont déjà été adoptées, dans le cadre de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte du 17 août 2015 et la loi de finances pour 2016, afin de répondre aux problèmes connus par les industries hyper électro-intensives en leur accordant un renforcement des mesures d'interruptibilité et d'effacement, la réduction du tarif de transport de l'électricité (TURPE), la compensation des coûts indirects dus au système d'échange de quotas CO2, et en leur garantissant le soutien d'EDF et de la CNR pour couvrir un quart des besoins à l'horizon 2020. Toutefois, ce soutien tarde à intervenir, mettant en péril l'équation tarifaire de l'ensemble des mesures mises en place et dégradant la pérennité des industries hyper électro-intensives. Plusieurs solutions peuvent être envisagées à l'instar de la mise en place d'un contrat long terme avec les fournisseurs d'électricité, ou du réexamen d'un accès régulé à l'énergie hydraulique historique ciblant les industries HEI. En ce sens, elle lui demande dans quelle mesure le Gouvernement envisage d'intervenir pour garantir et protéger la compétitivité des industries hyper électro-intensives en leur assurant une visibilité de long terme sur leur approvisionnement électrique, et quelles seraient les échéances établies, le cas échéant.

Texte de la réponse

INDUSTRIES HYPER ÉLECTRO-INTENSIVES


Mme la présidente. La parole est à Mme Typhanie Degois, pour exposer sa question, n°  189, relative aux industries hyper électro-intensives.

Mme Typhanie Degois. Madame la secrétaire d'État, les industries hyper électro-intensives, comme leur nom l'indique, ont pour particularité que l'électricité représente au moins 30 % de leurs coûts de production, dans des domaines tels que la réduction chimique ou l'électrolyse.

Aujourd'hui, ces industries représentent près de 10 000 emplois directs, 40 000 emplois indirects en France et permettent, en alimentant des filières locales, de développer des solutions industrielles à forte valeur ajoutée, comme le photovoltaïque ou l'aéronautique. Elles participent ainsi significativement à l'effort de recherche et développement de notre pays. Rencontrant des problématiques liées à l'absence de visibilité depuis la fin des tarifs régulés de vente d'électricité en 2015 et des contrats historiques adaptés, nos industries hyper électro-intensives sont depuis fortement exposées à la concurrence mondiale. En effet, les approvisionnements énergétiques de leurs principaux concurrents sont aujourd'hui bien plus compétitifs.

Des dispositions ont déjà été adoptées, permettant un renforcement des mesures d'interruptibilité et d'effacement, ou la réduction du tarif de transport de l'électricité. Toutefois, ces mesures, autorisées par la Commission européenne le 7 février dernier, ne sauraient être suffisantes sans l'établissement rapide d'une stratégie globale assurant une visibilité à long terme sur leur approvisionnement en électricité.

Plusieurs solutions peuvent être envisagées pour ces industries, comme la mise en place d'un contrat de long terme avec les fournisseurs d'électricité, le réexamen d'un accès régulé à l'énergie hydraulique ou la mise en place d'un régime de concessions hydrauliques, afin d'exploiter les installations existantes.

Dans quelle mesure le Gouvernement envisage-t-il d'intervenir afin de garantir et de soutenir la compétitivité de nos industries hyper électro-intensives ? Si oui, quelles seraient les échéances ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances.

Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances. Madame la députée, le prix de l'énergie, notamment de l'électricité, est un facteur de compétitivité important pour nos industriels. Aussi le Gouvernement a-t-il souhaité poursuivre les efforts engagés depuis 2014, pour faire de l'énergie un véritable facteur de compétitivité au bénéfice des entreprises industrielles françaises, et plus particulièrement des industries hyper électro-intensives – HEI.

Pour ce faire, la France a pris de nombreuses mesures en faveur des entreprises industrielles intensives en énergie, dont les industries HEI bénéficient largement.

Vous en avez rappelé quelques-uns, madame la députée : le statut d'entreprise HEI, la compensation des coûts indirects, la valorisation de la flexibilité de consommation, c'est-à-dire l'interruptibilité, l'effacement, ou les rabais sur le tarif d'utilisation des réseaux publics d'électricité – TURPE. On peut également citer l'exonération totale de contribution au service public de l'électricité – CSPE – pour certains procédés spécifiques aux industries HEI, ainsi que l'application du taux minimal communautaire de CSPE, soit 0,5 euro par mégawatt-heure.

L'interruptibilité et le rabais sur le TURPE font actuellement l'objet de travaux des services de l'État, notamment de la direction générale de l'énergie et du climat ainsi que la direction générale des entreprises, avec la Commission européenne, pour valider leur conformité aux règles de l'Union européenne sur les aides d'État. C'est une étape nécessaire, pour apporter aux industriels la sécurité juridique indispensable et garantir la pérennité des dispositifs.

Au-delà de ces mesures spécifiques, les contrats compétitifs de long terme sont essentiels pour offrir une visibilité suffisante pour que soient engagés les investissements nécessaires à la compétitivité et à la pérennité des sites.

Ce sujet ne peut s'envisager que si l'Union européenne assure un cadre sûr pour les industries énergo-intensives, en leur permettant de conclure des contrats. La France souligne régulièrement l'importance de ce point auprès des instances européennes. Le ministre de l'économie et des finances, M. Bruno Le Maire, l'a fait en octobre dernier lors de sa rencontre avec le vice-président de la Commission européenne, M. Sefkovic, chargé de l'Union de l'énergie.

Par ailleurs, la négociation du nouveau règlement européen sur le marché de l'électricité a été l'occasion d'introduire dans la position du Conseil arrêtée le 18 décembre 2017, la possibilité de contrats d'approvisionnement à long terme respectant les règles de concurrence communautaire. Les discussions vont maintenant s'engager avec le Parlement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Typhanie Degois.

Mme Typhanie Degois. Je vous remercie, madame la secrétaire d'État, pour votre réponse complète. Je prends note du fait que des négociations se poursuivent sur les contrats de long terme, qui sont très demandés par les industries HEI.

Il serait en outre nécessaire de réviser la loi du 16 octobre 1919, notamment pour améliorer un accès régulé des industries HEI à l'énergie hydraulique. Aujourd'hui, du fait de l'agrément conclu avec l'État, seules les grosses entreprises, consommant beaucoup d'électricité, peuvent accéder à l'énergie hydraulique. Abaisser le seuil permettrait aux entreprises plus petites d'en bénéficier également.