Question orale n°18 : Sécheresse aux effets catastrophiques en Ardèche

15ème Législature

Question de : M. Hervé Saulignac (Auvergne-Rhône-Alpes - Nouvelle Gauche)

M. Hervé Saulignac alerte M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur l'état de sécheresse historique qui frappe le département de l'Ardèche en cette année 2017. L'Ardèche est à sec ! Et ce n'est pas l'annulation de la 33ème édition du marathon international des gorges de l'Ardèche qui viendra apportera un démenti à cette affirmation. C'est pourquoi il lui apparaît nécessaire de l'alerter sur cet épisode climatique sans précèdent qui affecte directement l'ensemble du monde agricole ardéchois : arboriculteurs, viticulteurs, éleveurs et castanéiculteurs qui en sont les plus grandes victimes. En effet, les niveaux de précipitations de 2017 sont au plus bas et le déficit pluviométrique s'est aggravé depuis le mois de juillet 2017 jusqu'au mois de novembre 2017 où les précipitations sont quasi inexistantes sur l'ensemble du département. Rien que pour la filière castanéicole, on a pu constater une baisse de la production de 50 à 80 % selon les exploitations. La récolte de châtaignes est très mauvaise et une majorité des fruits récupérés par les producteurs sont très petits en raison de la sécheresse d'avant juillet 2017et sa poursuite cet automne. Cette sécheresse inédite a également de graves conséquences sur la production de fourrage et de céréales. Les productions fourragères, et notamment l'herbe (le foin), sont très pénalisées par cette climatologie. La pâture des animaux a été stoppée dès la fin du mois de mai, et le stock de fourrage de 2015 est déjà fortement mobilisé. La pénurie d'eau oblige certains paysans à déployer des solutions temporaires, comme le remplissage de cuves au quotidien, avec une eau puisée à une source éloignée. Par ailleurs, des dommages collatéraux se font ressentir car les sangliers, en manque de nourriture dans la forêt, se tournent vers les champs cultivés, voir les centres villes comme c'est le cas dans la ville préfecture de Privas. Les dégâts causés par ces animaux sauvages suscitent l'ire des agriculteurs et la panique chez les riverains. Cette situation conduit l'ensemble de la filière agricole à être fragilisée et les pertes constatées sont très importantes. Ainsi, elles ne pourront être compensées sans une prise en considération du caractère catastrophique de cet épisode. Il lui demande quel dispositif il envisage de mettre en œuvre pour aider les agriculteurs victimes de cette sécheresse. Enfin, il souhaite attirer son attention sur le fait que les effets ne se limitent pas au monde agricole, des fissures sur les murs des maisons de particuliers dans les communes d'Alissas, Chomérac ou Rompon sont à mettre en corrélation avec la sécheresse de la terre.

Réponse en séance, et publiée le 13 décembre 2017

PÉNURIE D'EAU EN ARDÈCHE
M. le président. La parole est à M. Hervé Saulignac, pour exposer sa question, n°  18, relative à la pénurie d'eau en Ardèche.

M. Hervé Saulignac. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation.

L'Ardèche est à sec ! C'est du jamais vu, probablement depuis 1929 ! Le marathon international des Gorges de l'Ardèche en canoë-kayak a dû être annulé, faute d'eau, au mois de novembre ; des maisons se fissurent sous l'effet de la sécheresse prolongée ; ce sont des paysans bretons qui livrent du foin aux paysans ardéchois ; les châtaignes ont la taille des olives ; les nappes phréatiques sont au plus bas et certains agriculteurs n'excluent pas de mettre un terme à leur activité.

Il s'agit là, non pas d'une énième sécheresse, mais bien d'un phénomène historique, qui, du reste, est certainement appelé à se reproduire si l'on ne prend pas des mesures appropriées pour disposer d'eau quand elle ne tombe plus du ciel. Cet épisode climatique sans précédent affecte l'ensemble du monde agricole ardéchois : arboriculteurs, viticulteurs, éleveurs et castanéiculteurs en sont les plus grandes victimes.

Depuis le mois de mars, les précipitations sont quasi inexistantes sur l'ensemble du département, à l'exception de celles qui sont intervenues ces derniers jours. Dans la filière castanéicole, qui est importante pour l'Ardèche, on a constaté une baisse de la production de 50 % à 80 %, selon les exploitations. Les dommages collatéraux se font ressentir, et pas toujours là où les attend. Les sangliers, en manque de nourriture et d'eau, ont ainsi investi les cultures, voire les centres-villes, y compris celui de la ville préfecture, Privas. Les dégâts qu'ils causent créent d'importantes tensions.

Madame la secrétaire d'État auprès de la ministre des armées, il est fondamental que le Gouvernement prenne conscience du caractère catastrophique de l'épisode qui a frappé l'Ardèche, plus que tout autre département. Je ne vous demanderai certes pas de faire tomber la pluie ; je vous demanderai, en revanche, qu'il soit mis fin à certaines règles, trop dogmatiques selon moi, qui interdisent de la stocker, même en quantité infime.

J'aurai donc deux questions très simples à vous poser. D'abord, pouvez-vous m'assurer que les délais de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle seront réduits au maximum et que les critères d'indemnisation seront assez souples pour couvrir l'ensemble des préjudices subis ? Ensuite, M. le ministre de l'agriculture peut-il prendre l'engagement d'étudier sérieusement la requalification de la montagne ardéchoise en zone de montagne sèche pour venir en aide aux agriculteurs, et d'autoriser les équipements de stockage, qui pourraient se limiter à 0,2 % des précipitations annuelles ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre des armées.

Mme Geneviève Darrieussecq, secrétaire d'État auprès de la ministre des armées. Monsieur le député, je vous prie d'excuser le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, qui prend part aujourd'hui au Conseil européen de l'agriculture et de la pêche, et qui m'a demandé de vous répondre.

Vous avez raison, de nombreux départements ont subi, en 2017, une succession d'événements climatiques défavorables, notamment l'Ardèche, qui a été particulièrement touchée par les conséquences de la sécheresse. Le sommet sur le climat qui se tient aujourd'hui est d'autant plus important, que les incidents climatiques inquiétants ne cessent de se multiplier depuis quelques années.

S'agissant des pertes de récoltes sur prairies consécutives à une sécheresse, ceux des agriculteurs impactés qui ne disposent pas d'une assurance pour ce type de pertes pourront bénéficier du régime des calamités agricoles, selon le type de culture. Par ailleurs, la procédure de demande de reconnaissance de calamité agricole de sécheresse sur fourrage a été initiée par le préfet. Un dossier pour des pertes de récoltes a ainsi été déposé auprès des services du ministre de l'agriculture et de l'alimentation. Cette demande couvre la quasi-totalité du département, à l'exception d'une frange située à l'Est, où les pertes de récoltes furent sans doute moindres. Cette demande a été instruite et ne pose pas de difficultés. Un avis favorable sera proposé aux membres du Comité national de gestion des risques en agriculture – CNGRA –, qui se réunira demain, mercredi 13 décembre.

Face à la multiplication des intempéries, il est également indispensable que les exploitants agricoles puissent assurer plus largement leurs productions à travers le dispositif d'assurance récolte contre les risques climatiques. Je vous rappelle qu'il existe un dispositif de soutien de la part de l'État, qui prend la forme d'une prise en charge partielle des primes de cotisation d'assurance, pouvant aller jusqu'à 65 %, taux garanti pour la campagne 2018. Les producteurs ont également la possibilité de réduire le taux de franchise, ou bien encore le seuil de déclenchement, afin de disposer d'un contrat d'assurance adapté à leurs besoins.

En outre, conformément aux réflexions en cours sur la gestion des risques, des travaux ont été engagés avec les organisations professionnelles agricoles, ainsi qu'avec les assureurs, pour identifier les freins à ce développement et étudier des pistes d'amélioration. Afin d'accompagner les exploitants qui connaissent des difficultés économiques en cette période, plusieurs dispositifs peuvent être mobilisés, que vous connaissez sans doute déjà : le recours à l'activité partielle pour leurs salariés ; un dégrèvement de la taxe sur le foncier non bâti pour les parcelles touchées par la grêle – même si, en l'occurrence, vous évoquez un épisode de sécheresse ; un report du paiement des cotisations sociales auprès des caisses de mutualité sociale agricole.

La question des sangliers, qui ne se pose pas seulement en Ardèche, devient en effet préoccupante, et les schémas départementaux de gestion cynégétique élaborés par les fédérations départementales de chasseurs sont l'occasion de réfléchir à une meilleure maîtrise de ces populations de sangliers.

Vous posez, enfin, la question essentielle de nos moyens d'action face à l'absence de pluie, notamment par la création de retenues collinaires, qui permettraient aux agriculteurs d'assurer une irrigation minimale. Je n'ai pas de réponse à la question que vous posez sur une possible requalification de la montagne ardéchoise en zone de montagne sèche, mais il me semble que le ministère de l'agriculture examine la possibilité de créer des dispositifs d'irrigation fine, à partir de petites retenues, pour améliorer la situation de nos agriculteurs. Je crois, en tout cas, qu'il faut poursuivre notre réflexion sur ce sujet, y compris dans le contexte ardéchois.

M. le président. La parole est à M. Hervé Saulignac.

M. Hervé Saulignac. Je me permets d'insister sur la question du stockage de l'eau, qui est la seule solution pour permettre aux agriculteurs de surmonter ces périodes extrêmement difficiles. Il y a deux poids, deux mesures, dans ce pays : dans certains départements, le stockage est autorisé, dans d'autres, non. Il importe de régler cette question.

Données clés

Auteur : M. Hervé Saulignac (Auvergne-Rhône-Alpes - Nouvelle Gauche)

Type de question : Question orale

Rubrique : Agriculture

Ministère interrogé : Agriculture et alimentation

Ministère répondant : Agriculture et alimentation

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 5 décembre 2017

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