Question au Gouvernement n° 1965 :
Droits des femmes

15e Législature

Question de : Mme Patricia Lemoine
Seine-et-Marne (5e circonscription) - UDI, Agir et Indépendants

Question posée en séance, et publiée le 23 mai 2019


DROITS DES FEMMES

M. le président. La parole est à Mme Patricia Lemoine.

Mme Patricia Lemoine. Madame la secrétaire d'État chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations, en 1949, dans son ouvrage Le Deuxième sexe, Simone de Beauvoir nous mettait en garde contre ce danger perpétuel auquel seraient confrontés les droits des femmes, quand elle écrivait : « N'oubliez jamais qu'il suffira d'une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question. Ces droits ne sont jamais acquis. Vous devrez rester vigilantes votre vie durant. »

M. Fabien Di Filippo. C'était tout de même autre chose que Marlène Schiappa !

Mme Patricia Lemoine. Ces mots sont plus que jamais d'une cruelle actualité.

Alors que nous voyons, de par le monde, des femmes exercer les plus hautes responsabilités, des forces idéologiques puissantes cherchent à ramener les femmes à une condition d'un autre temps.

Mme Véronique Louwagie. C'est vrai !

Mme Patricia Lemoine. L'un des plus grands symboles de la liberté des femmes, celui de pouvoir disposer de leur corps, est contesté. Certes, cela n'est pas totalement nouveau. Ce qui est plus inquiétant, c'est que ce droit recule désormais dans les plus grandes démocraties de ce monde. Ainsi, aux États-Unis, l'Alabama et le Missouri ont récemment légiféré pour restreindre ce droit de façon drastique. La France n'échappe pas à ce mouvement, puisqu'il y a encore quelques semaines, des gynécologues menaçaient d'arrêter de pratiquer l'interruption volontaire de grossesse – IVG –, se servant du corps des femmes comme d'un vulgaire levier de négociation.

Si la remise en cause de l'IVG est l'un des symboles majeurs de l'atteinte aux droits des femmes, je ne peux m'empêcher d'évoquer un autre fléau aux conséquences plus dramatiques : celui des violences et des féminicides. Le dimanche 12 mai, nous déplorions, impuissants, le cinquante-troisième décès d'une femme sous les coups de son conjoint depuis le 1er janvier. Et vendredi dernier, dans mon territoire, en Seine-et-Marne, un homme rouait de coups sa compagne venue lui rendre visite au parloir de la prison de Réau. Il est même allé jusqu'à sauter à pieds joints sur son visage, engageant ainsi son pronostic vital.

Madame la secrétaire d'État, la condition des femmes est un marqueur majeur de notre civilisation. Elle est aujourd'hui en danger. Il y a urgence à agir. Je souhaiterais, dès lors, que vous nous indiquiez les mesures concrètes…

M. le président. Merci, madame la députée.

Mme Patricia Lemoine. …que vous comptez mettre en œuvre pour lutter efficacement contre ces atteintes. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI-Agir.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations.

Mme Marlène Schiappa, secrétaire d'État chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations. Madame la députée, je partage pleinement votre constat très clair : le droit des femmes régresse partout dans le monde. J'en veux pour preuve un exemple très récent : le parti d'extrême droite espagnol Vox a – à l'instant – demandé officiellement au Gouvernement que toute politique publique de prévention et de lutte contre les violences conjugales cesse purement et simplement.

M. Fabien Di Filippo. C'est inquiétant !

Mme Marlène Schiappa, secrétaire d'État . Aux États-Unis, plus précisément en Alabama, les médecins qui pratiquent des IVG encourent jusqu'à quatre-vingt-dix années de prison. Au Texas, on discute actuellement de la peine de mort pour les femmes qui auraient eu recours à une interruption volontaire de grossesse. Dans le Kentucky, les femmes sont obligées d'être protégées sous des couvertures et des manteaux pour avoir accès à des cliniques où elles peuvent avorter.

Ces situations sont gravissimes. C'est pour cette raison que la France s'est engagée auprès du mouvement « She Decides » des Nations unies en menant des plaidoyers à l'international pour dénoncer les régressions chez nos partenaires, parmi lesquels la Pologne, la Hongrie ou les États-Unis d'Amérique.

M. Aurélien Pradié. Bla-bla-bla !

Mme Marlène Schiappa, secrétaire d'État . Nous avons engagé 10 millions d'euros supplémentaires cette année pour permettre aux femmes, partout dans le monde, d'accéder à l'IVG. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.)

J'étais, hier après-midi encore, avec les féministes argentines venues en France visiter le planning familial et soutenir, au festival de Cannes, le réalisateur Juan Solanas. Celui-ci a réalisé un film montrant les dangers que courent les femmes, lorsque l'IVG n'est pas autorisé dans leur pays : elles ont quand même accès à l'avortement, mais à leurs risques et périls, et dans des situations sanitaires déplorables.

M. Christian Jacob. Il faudrait parler des problèmes qui se posent en France !

Mme Marlène Schiappa, secrétaire d'État. Cela signifie que ceux qui se prétendent outrageusement « pro-vie » sont, en fait, des gens qui envoient les femmes vers une mort certaine. Ce sujet ne mérite ni hésitation, ni atermoiement ! (Les députés des groupes LaREM, MODEM et UDI-Agir se lèvent et applaudissent.)

Données clés

Auteur : Mme Patricia Lemoine

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Égalité des sexes et parité

Ministère interrogé : Égalité femmes hommes

Ministère répondant : Égalité femmes hommes

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 23 mai 2019

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