Question écrite n° 19751 :
Embauche des travailleurs handicapés

15e Législature
Question signalée le 9 décembre 2019

Question de : M. Guy Bricout
Nord (18e circonscription) - UDI, Agir et Indépendants

M. Guy Bricout alerte Mme la ministre des solidarités et de la santé sur l'embauche de travailleurs handicapés dans un cadre adapté à leur singularité. En effet, antérieurement à la loi n° 2018-771, adoptée le 5 septembre 2018, les entreprises du secteur concurrentiel et les collectivités pouvaient s'acquitter de leur obligation d'emploi de travailleurs handicapés en passant des contrats de sous-traitance et de prestation de services avec les entreprises du secteur du travail protégé ESAT et EA. Depuis l'adoption de cette loi ce type de contrat, qui permettait l'embauche de travailleurs handicapés dans un cadre adapté à leur singularité, ne sera que partiellement autorisé. Les familles sont très inquiètes sur les modalités d'application de cette loi et craignent des conséquences négatives sur l'emploi des personnes porteuses d'un handicap mental avec déficience intellectuelle. La personne handicapée déficiente intellectuelle est nantie de potentiels et de marge de progression dont on doit faciliter au mieux le développement, mais elle se caractérise également par des difficultés réelles et des invariants cliniques qui la rendent réceptive aux influences extérieures sans capacité d'analyse objective. Elle réagit plus de façon émotionnelle que rationnelle et risque de se mettre en danger. Elle présente souvent une lenteur du raisonnement, un déficit d'abstraction et surtout une non maîtrise des codes sociaux. Angoissée face à une difficulté, elle peut réagir par un comportement perturbateur qualifié de troubles du comportement. L'entreprise classique du secteur marchand évolue et se développe dans un environnement concurrentiel et compétitif où l'agilité est une des conditions de sa survie et de son développement. Cet environnement est peu compatible avec les capacités d'adaptation beaucoup plus lentes d'une personne porteuse d'un handicap mental. Une autre réalité : alors que le taux de chômage reste élevé dans notre pays les employeurs peinent à recruter par manque de de formation, de compétences des demandeurs d'emploi exempts de handicap. Ces entreprises sont-elles prêtes à embaucher des travailleurs déficients intellectuels ? Seules les personnes déficientes légères et sans troubles du comportement peuvent espérer intégrer ce monde compétitif. Toutefois si l'expérience en milieu ordinaire se soldait par un échec, ou si l'entreprise subissait une restructuration avec restriction de personnel, on doit pouvoir offrir au travailleur la possibilité de réintégrer le secteur du travail protégé. Si les nouvelles dispositions de la loi 2018-771 sur l'ORTH venaient à remettre en cause l’avenir des ESAT et des EA, cette réintégration serait compromise et le travailleur déficient intellectuel victime d'une rupture de parcours aux conséquences irréversibles : chômage de longue durée, perte des acquis, isolement. D'autre part, dans les territoires où le taux de chômage est élevé et le tissu économique pauvre, une des rares possibilités, pour la personne déficiente intellectuelle d'accéder à une reconnaissance sociale par le travail, sont l'ESAT ou l'EA. Ces structures ayant vocation également à être des dispositifs passerelle vers le milieu ordinaire, si tel est le choix du travailleur. Les familles et les travailleurs porteurs d'un handicap ne souhaitent pas que l'on mette en péril des structures qui ont fait leur preuve. Ils sont ouverts à toute expérience d'inclusion sociale mais en respectant, un principe énoncé par une association de personnes déficientes intellectuelles : « ce que vous faites sans nous vous le faites contre nous ». Au travers de ce principe les personnes déficientes intellectuelles revendiquent leur droit à l'autodétermination. Les familles ne peuvent que souhaiter l'inclusion sociale par le travail et l'accès aux entreprises du secteur marchand, comme l'accès à un habitat inclusif ou encore à la santé. Elles n'acceptent plus d'être culpabilisées et accusées de surprotection parce qu'elles s'inquiètent légitimement de l'avenir de leur enfant, surtout lorsqu'elles ne seront plus présentes pour compenser les carences d'une société normative qui montre beaucoup de difficultés à être réellement inclusive et à accepter la différence. Ce n'est pas une loi, aussi bien intentionnée soit-elle, qui d'un coup de baguette magique changera cet état de fait. Les familles ne demandent qu'à travailler à faire évoluer la société. Elles souhaitent œuvrer à ce que la singularité de toute personne soit considérée comme une des composantes de la diversité humaine. Mais elles estiment que l'inclusion sociale des personnes porteuses d'un handicap passe par : des réponses personnalisées prenant en compte la singularité de chacun, quel que soit cette singularité ; des réponses évolutives adaptées à l'évolution de la société tant en termes technologiques, que philosophiques et sociétaux ; et surtout des réponses durables sécurisées par la solidarité nationale. Les familles demandent à ce que ces critères soient pris en compte dans les modalités d'application de cette loi aux risques, si cela n'était pas fait, d'éloigner définitivement un bon nombre de travailleurs handicapés déficients intellectuels de l'accès à un emploi. Il souhaite se faire le porte-parole de celles-ci et requérir son sentiment sur cette question.

Question retirée le 21 juin 2022
Cause : Fin de mandat
Données clés

Auteur : M. Guy Bricout

Type de question : Question écrite

Rubrique : Personnes handicapées

Ministère interrogé : Solidarités et santé

Ministère répondant : Solidarités, autonomie et personnes handicapées

Signalement : Question signalée au Gouvernement le 9 décembre 2019

Date :
Question publiée le 21 mai 2019

Date de cloture : 21 juin 2022
Fin de mandat

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