15ème législature

Question N° 197
de M. Alexis Corbière (La France insoumise - Seine-Saint-Denis )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Éducation nationale
Ministère attributaire > Éducation nationale

Rubrique > enseignement privé

Titre > Développement des écoles privées hors contrat

Question publiée au JO le : 20/03/2018
Réponse publiée au JO le : 28/03/2018 page : 2135

Texte de la question

M. Alexis Corbière appelle l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale sur le développement exponentiel des écoles privées hors contrat en France. Tandis que depuis dix ans, plus d'une école publique est fermée chaque jour, le nombre d'écoles privées croît depuis 2014. Cette croissance profite particulièrement au privé hors contrat : à la rentrée 2017 par rapport à 2016, le privé a gagné 7 000 élèves dont pas moins de 5 000 pour le privé hors-contrat. Ces trois dernières années, les effectifs de écoles privées hors-contrat ont crû de 15 % en moyenne à chaque rentrée scolaire. Cette accélération se vérifie particulièrement en Seine-Saint-Denis, département qui compte la plus importante population de moins de quinze ans en Île-de-France. Alors qu'entre 1998 et 2013, soit sur une période de quinze ans, le département a vu onze établissements de ce type ouvrir leurs portes, sur les cinq dernières années, de 2014 à 2018, ce n'est pas moins de treize écoles hors-contrats qui ont ouvert. Il s'alarme de ce que le développement exponentiel de ces écoles en Seine-Saint-Denis puisse être la conséquence du désinvestissement de l'État en matière scolaire sur ce territoire. Il s'inquiète également de ce que certains de ces établissements appartenant au réseau Espérance banlieues aient bénéficié en 2017 de financement public, via des subventions de plusieurs conseils régionaux. Il lui demande ce qu'il compte faire pour stopper l'hémorragie des élèves du public vers le privé, notamment hors-contrat. Il suggère que soit diligentée une étude qui déterminera si l'enseignement dispensé dans ces écoles correspond aux attendus pédagogiques définis à l'article L. 122-1-1 du code de l'éducation.

Texte de la réponse

ÉCOLES PRIVÉES HORS CONTRAT


M. le président. La parole est à M. Alexis Corbière, pour exposer sa question, n°  197, relative aux écoles privées hors contrat.

M. Alexis Corbière. J'appelle l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale sur le développement, que je qualifierais d'exponentiel, des écoles privées hors contrat dans notre pays.

Depuis dix ans, plus d'une école publique est fermée chaque jour ; mais depuis 2014, le nombre d'écoles privées ne cesse de croître. Cette croissance profite particulièrement au privé hors contrat : à la rentrée 2017, l'enseignement privé a gagné 7 000 élèves, dont pas moins de 5 000 pour le privé hors contrat, par rapport à la rentrée 2016. Ces trois dernières années, les effectifs des écoles privées hors contrat ont crû de 15 % en moyenne à chaque rentrée scolaire.

Cette accélération se vérifie particulièrement dans mon département, la Seine-Saint-Denis, qui compte la population de jeunes de moins de 15 ans la plus importante d'Île-de-France. Alors qu'entre 1998 et 2013, soit sur une période de quinze ans, le département a vu onze établissements de ce type ouvrir leurs portes, sur les cinq dernières années, de 2014 à 2018, pas moins de treize écoles hors contrat ont ouvert.

Le développement exponentiel de ces écoles en Seine-Saint-Denis m'alarme, car on peut y voir la conséquence du désinvestissement de l'État en matière scolaire dans ce territoire si particulier. Je tiens à dire que je m'inquiète également du fait que certains de ces établissements, appartenant au réseau Espérance banlieues, ont bénéficié en 2017 de financements publics, via des subventions accordées par plusieurs conseils régionaux.

Je demande donc à M. le ministre de l'éducation ce qu'il compte faire pour stopper l'hémorragie que représente cette fuite des élèves du public vers le privé, notamment hors contrat. Je me permets de suggérer que soit diligentée une étude qui déterminera si l'enseignement dispensé dans ces écoles hors contrat correspond aux attendus pédagogiques définis à l'article L. 122-1-1 du code de l'éducation.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement.

M. Christophe Castaner, secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement. Monsieur Corbière, vous exposez une réalité : l'augmentation importante du nombre d'enfants scolarisés dans des établissements privés, et en particulier dans des établissements qui ne sont pas liés au service public de l'éducation nationale. C'est une réalité partout en France, y compris en Seine-Saint-Denis.

Comme vous l'avez dit, l'enseignement privé hors contrat a enregistré une augmentation de 5 000 élèves à la dernière rentrée scolaire. Je précise que cette augmentation ne concerne que les écoles : dans les collèges et les lycées hors contrat, le nombre d'élèves a au contraire baissé de 800 élèves – mais cela n'enlève rien à la tendance que vous avez décrite.

Globalement, les élèves scolarisés dans les établissements d'enseignement hors contrat sont passés de 69 000 en septembre 2016 à 73 500 en septembre 2017, soit une augmentation de 4 500 élèves.

En Seine-Saint-Denis, vous évoquez une accélération de la hausse du nombre d'établissements. Là encore, vous avez raison : le nombre d'élèves scolarisés dans des établissements hors contrat dans ce département est passé de 1 200 en septembre 2016 à 2 100 en septembre 2017, soit une augmentation de 900 élèves. C'est une progression très forte.

Mesdames et messieurs les députés, vous savez que le Premier ministre a annoncé, dans le cadre du plan de lutte contre la radicalisation, que l'État porterait une attention renforcée à l'enseignement hors contrat. Vous examinerez demain la proposition de loi de la sénatrice Françoise Gatel visant à simplifier et mieux encadrer le régime d'ouverture des établissements privés hors contrat : ce sera pour le ministre de l'éducation nationale l'occasion de compléter ma réponse.

Enfin, monsieur le député, vous interrogez le ministre de l'éducation nationale sur les établissements du réseau Espérance banlieues. D'un point de vue pédagogique, d'abord, le ministre de l'éducation nationale vous confirme que les autorités académiques font preuve de la même vigilance à l'égard de chacun des seize établissements de cette fondation qu'à l'égard de n'importe quel établissement hors contrat. Les sanctions appropriées seront mises en œuvre contre les établissements au sein desquels seraient constatés des manquements persistants au droit à l'éducation, ce droit étant plus large que les seuls attendus du socle commun, que vous avez évoqués, et qui sont définis à l'article L. 122-1-1 du code de l'éducation.

D'un point de vue financier, ensuite, vous conviendrez que le ministre de l'éducation n'est juridiquement pas compétent pour déterminer la légalité des subventions accordées par les collectivités locales : les élus et les contribuables sont les mieux à même de saisir le juge administratif de ces questions.

M. le président. La parole est à M. Alexis Corbière.

M. Alexis Corbière. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'État, pour cette réponse. Comme vous l'avez dit, le débat aura lieu demain dans notre hémicycle : j'en profiterai pour rappeler à M. le ministre de l'éducation nationale le soutien particulier qu'il a lui-même accordé, avant d'être nommé au Gouvernement, au réseau Espérance banlieues. Je ne crois pas que ce soit une bonne chose : j'aurai l'occasion de m'en expliquer.

Je me réjouis – même si je le savais déjà – que vous soyez conscient de ce problème de fond, qui conduit à un fort évitement des établissements publics dans mon département. Or, puisque nos services anticipent cet évitement, les moyens ne sont pas mis à disposition des établissements. Je crois que nous devrions, au contraire, promouvoir nos écoles publiques, qui sont les seules écoles de la République où nos enfants, quelle que soit leur origine sociale, peuvent cohabiter.