Question écrite n° 19949 :
L'action du Gouvernement contre l'immigration illégale

15e Législature

Question de : Mme Marie-France Lorho
Vaucluse (4e circonscription) - Non inscrit

Mme Marie-France Lorho interroge M. le ministre de l'intérieur sur l'action du Gouvernement contre l'immigration illégale et le trafic d'êtres humains. À Abidjan, le 20 mai 2019, M. le ministre a fait part de sa volonté de lutter contre le terrorisme et la migration irrégulière. Or l'état des lieux dressé par la police aux frontières sur l'année 2018 bat tous les records de saisies et de démantèlements de filières. Cela est le signe, outre de la relative augmentation des moyens alloués, d'une croissance considérable des réseaux de clandestinité, du trafic d'êtres humains et de l'immigration illégale. Les 13,5 millions saisis d'avoirs criminels des filières clandestines ne représentent qu'une part infime de la réalité de ce trafic dont l'Organisation internationale pour les migrations estime le chiffre d'affaires à 35 milliards de dollars à l'échelle mondiale. Les failles dans le système français employées par les fraudeurs sont bien connues des pouvoirs publics. On peut citer, entre autres, les abus de l'usage du statut d'étranger malade pour bénéficier du dispositif déraisonnablement avantageux de l'AME, souvent soutenue par des médecins délivrant de faux certificats. Les clandestins obtiennent alors des titres de séjour en France, certains oublient de rentrer dans leur pays à l'échéance du titre. Une autre faille dans le dispositif frontalier français est celle que révèle « l'abus de transit », cette méthode consistant à s'échapper de la zone internationale d'un aéroport lors d'une escale vers un autre pays. Les clandestins jettent alors leurs papiers d'identité et les autorités sont alors souvent dans l'impossibilité, faute de soutien de les renvoyer vers leur pays d'origine. Une autre faille vient du système d'accueil des mineurs non accompagnés. Selon le rapport déposé le 15 février 2018 par l'IGA, l'IGAS, l'IGJ et l'ADF, « les mineurs non accompagnés étrangers (MNA) sont à 95 % des garçons. L'origine géographique des arrivants suggère que le facteur économique et linguistique joue un rôle important dans les motifs qui conduisent un jeune à s'exiler pour rejoindre la France. Il en résulte que peu de MNA en France sont éligibles au statut de réfugié ». Cet accueil offert sur le seul critère d'être mineur coûte selon les études au moins 50 000 euros par an et par MNA alors que le rapport relève que les conseillers départementaux estiment qu'environ la moitié d'entre eux est majeure mais on leur accorde le bénéfice du doute avec une faiblesse coupable. Toutes ces largesses de la part de l'État français, dont la justification est discutable, sont autant d'espaces laissés aux trafiquants d'êtres humains pour asseoir leurs activités juteuses au détriment de la dignité humaine. C'est pourquoi elle lui demande comment le Gouvernement compte réagir à la multiplication des formes d'immigration clandestine, revoir les dispositifs d'accueil et afficher les gages de fermeté indispensables à la reprise en main du phénomène migratoire.

Réponse publiée le 4 mai 2021

Le Gouvernement poursuit les objectifs prioritaires qu'il s'était assigné dans sa feuille de route migratoire du 12 juillet 2017, notamment une meilleure maîtrise des flux migratoires et la conduite d'une politique efficace et crédible de lutte contre l'immigration irrégulière et d'éloignements. Au niveau national, en 2020, 264 filières d'immigration irrégulière ont été démantelées, contre 328 en 2019, 321 en 2018, 303 en 2017, 286 en 2016, 251 en 2015 et 226 en 2014. Ces 264 filières démantelées représentent 1 324 personnes mises en cause, parmi lesquelles 983 ont été placées en garde à vue et 627 déférées devant les tribunaux. En 2020, 5 331 personnes ont été mises en cause, contre 6 290 (au lieu de 6 392) en 2019 (-15,2 %) pour aide à l'entrée, à la circulation ou au séjour irrégulier des étrangers. Les résultats déjà obtenus sont satisfaisants. En 2020, au regard de la crise sanitaire et de la fermeture des frontières, la France a maintenu sa politique d'éloignement : 15 950 étrangers (chiffres provisoires) ont quitté le territoire national (éloignement, départ volontaire aidé et départ spontané). A cela s'ajoute la non admission aux frontières qui a augmenté de 40 % par rapport à 2019. Le Ministère de l'Intérieur agit avec la plus grande fermeté pour éloigner les étrangers ayant commis des infractions graves ou représentant une menace grave pour l'ordre public. Une grande attention est notamment portée aux enjeux d'ordre public dans le cadre des demandes d'asile et dans le suivi des bénéficiaires d'une protection internationale. Tous les leviers sont activés s'agissant des étrangers inscrits au Fichier des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT). Le ministre de l'Intérieur s'est déplacé dans quatre pays (Algérie, Maroc, Tunisie, Russie) afin de solliciter une amélioration de la coopération en matière migratoire et d'envisager une reprise rapide et effective de leurs ressortissants, en levant les obstacles juridiques et administratifs rencontrés depuis le début de la crise sanitaire. Parallèlement, une circulaire a été adressée aux préfets le 29 septembre dernier, portant instruction pour l'éloignement des étrangers les plus dangereux en mobilisant l'ensemble des moyens juridiques à leur disposition. Malgré le contexte de crise sanitaire défavorable, l'année 2020 est marquée par des résultats satisfaisants, et notamment l'éloignement de 94 étrangers en situation irrégulière inscrits au FSPRT (contre 89 en 2019 et 83 en 2018). Il a également été demandé aux préfets de s'assurer de la coordination de tous les acteurs territoriaux en vue de réussir l'éloignement des étrangers en situation irrégulière, en premier lieu les services de police dans toutes leurs composantes (sécurité publique, services de renseignement, police aux frontières) mais également les établissements pénitentiaires pour l'éloignement des étrangers en situation irrégulière incarcérés. La lutte contre la fraude documentaire et à l'identité à visée migratoire, fait par ailleurs l'objet d'une attention constante de la part du ministère de l'Intérieur. Outre les actions de formation, de coopération avec les pays tiers d'origine pour consolider leurs systèmes d'état civil, le ministère de l'Intérieur met à disposition des préfectures des outils pour les aider à la détection et la qualification de la fraude. S'agissant de l'aide médicale d'Etat (AME), elle répond à un principe humanitaire, mais aussi à un objectif de santé publique, en permettant à certains étrangers en situation irrégulière de bénéficier d'un accès aux soins, notamment pour les situations d'urgence et pour les populations les plus vulnérables. Elle est attribuée pour un an sous conditions de résidence stable (3 mois de résidence ininterrompue en France) et de ressources. Conformément aux décisions du comité interministériel sur l'immigration et l'intégration du 6 novembre 2019, l'encadrement de ce dispositif a été renforcé. Premièrement, le titre annuel d'admission à l'AME est désormais sécurisé et remis en main propre au bénéficiaire. Deuxièmement, une base nationale de données des bénéficiaires de l'AME a été créée par la caisse nationale d'assurance maladie. La même année, l'inspection générale des finances et l'inspection générale des affaires sociales ont remis, en réponse à la saisine conjointe des ministres en charge des solidarités et de la santé et des comptes publics un rapport sur l'AME. La mission a évalué les dispositifs de l'AME afin d'envisager une possible évolution de ce dispositif, avec notamment pour perspectives la maîtrise de la dépense publique et une plus grande convergence européenne des pratiques. Suite aux recommandations formulées, un certain nombre de soins et de traitements, correspondant à des soins et des prestations programmés et non urgents, ne sont plus pris en charge. Le Gouvernement a renforcé la lutte contre la fraude et a réformé le dispositif pour limiter les abus, sans remettre en cause le panier de soins. En ce qui concerne les mineurs non accompagnés, le décret n° 2019-57 du 30 janvier 2019 relatif aux modalités d'évaluation des personnes se déclarant mineures et privées temporairement ou définitivement de la protection de leur famille et autorisant la création d'un traitement de données à caractère personnel relatif à ces personnes a créé un traitement de données, dénommé « appui à l'évaluation de la minorité » (AEM), qui permet d'infléchir l'augmentation du nombre de personnes se disant MNA, et ainsi d'éviter le détournement de la protection de l'enfance par des majeurs, en même temps que de limiter les présentations successives dans plusieurs départements.

Données clés

Auteur : Mme Marie-France Lorho

Type de question : Question écrite

Rubrique : Immigration

Ministère interrogé : Intérieur

Ministère répondant : Intérieur

Dates :
Question publiée le 28 mai 2019
Réponse publiée le 4 mai 2021

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