Question de : Mme Sereine Mauborgne
Var (4e circonscription) - La République en Marche

Mme Sereine Mauborgne interroge Mme la secrétaire d'État, auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées, sur le statut des travailleurs en Établissement et service d'aide par le travail (ESAT). Les personnes en situation de handicap travaillant en ESAT relèvent d'un statut spécifique différent de celui des salariés de droit commun, soumis au code du travail, la jurisprudence considérant que les travailleurs handicapés ne sont pas liés aux ESAT par un contrat de travail au sens strict. Toutefois, cette interprétation nationale fut remise en cause par l'arrêt Fenoll, rendu le 26 mars 2015 par la Cour de justice de l'Union européenne, assimilant les personnels en ESAT à des travailleurs au sens du droit communautaire. En raison de cette divergence d'interprétation quant au statut auquel devraient être soumis les travailleurs en ESAT, potentiellement source de lourdes conséquences juridiques et financières, le ministère du travail et le secrétariat d'État chargé des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion avaient mis en place, dès 2015, un groupe de travail chargé d'analyser les conséquences, en droit interne, de l'arrêt Fenoll. Elle souhaiterait savoir quelles ont été les conclusions des travaux menés par ce groupe de travail ainsi que les intentions de son secrétariat d'État quant à leur mise en œuvre.

Réponse publiée le 21 juin 2022

L'arrêt Fenoll rendu par la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) le 26 mars 2015, ainsi que l'arrêt du 16 décembre 2015 de la chambre sociale de la Cour de cassation qui l'avait saisie par la voie préjudicielle sur la question des droits des personnes handicapées en établissements et services d'aide par le travail (ESAT), n'ont pas substantiellement modifié le régime juridique du travail protégé, dans la mesure où le juge français n'a pas remis en cause le statut d'usagers qu'ont, en droit national, les travailleurs handicapés en ESAT, tel qu'il est défini par le code de l'action sociale et des familles (CASF), confirmant en cela sa jurisprudence antérieure suivant laquelle les travailleurs handicapés des ESAT ne sont pas des salariés régis par le code du travail faute d'avoir un contrat de travail. Dans l'arrêt rendu le 26 mars 2015, la CJUE a jugé que les travailleurs handicapés des ESAT sont « des travailleurs au sens du droit de l'UE », catégorie juridique autonome du droit de l'UE plus large que celle des salariés en droit national. Elle couvre également les stagiaires qui ne sont pas des salariés, mais aussi les apprentis. Aussi, la reconnaissance par la CJUE du statut de travailleur au sens du droit de l'UE n'entraîne pas nécessairement l'application aux usagers des ESAT des dispositions de notre droit national régissant des catégories différentes de travailleurs, en particulier les salariés dont les droits sont issus du code du travail, complétés le cas échéant par des dispositions de nature conventionnelle (conventions et accords collectifs). S'il ne conduit pas à remettre en cause le « modèle ESAT » et le cadre juridique qui le régit, l'arrêt de la CJUE soulève la question de l'application aux personnes handicapées en ESAT de certaines dispositions de la Charte des droits fondamentaux de décembre 2000 qui a acquis valeur obligatoire au moment de l'entrée en vigueur du Traité de Lisbonne auquel elle est annexée, soit au 1er décembre 2009. Cette Charte énonce plusieurs droits dans son « chapitre IV Solidarité », concernant les travailleurs au sens du droit de l'Union européenne, qui ont donc vocation à s'appliquer aux personnes handicapées en ESAT (conditions de travail justes et équitables – durée maximale de travail, périodes de repos et congés payés, notamment), et son application ne soulève pas de difficultés particulières puisque qu'elle est relayée dans le CASF qui, dans ses articles R 243-5 à R 243-13 comporte les dispositions relatives aux droits des travailleurs handicapés admis dans un ESAT. Dans le cadre de la grande concertation lancée avec le secteur ces derniers mois et du Plan de transformation des ESAT qui en a résulté d'un plan global, le Gouvernement a réaffirmé que la personne accompagnée en ESAT est reconnue comme sujet de droits, qui produit une valeur ajoutée par son travail en ESAT. Des droits nouveaux qui se rapprochent de ceux des salariés sont octroyés, tels que les droits aux congés exceptionnels ou l'accès à la formation professionnelle. Les ESAT sont également incités à proposer une complémentaire santé.

Données clés

Auteur : Mme Sereine Mauborgne

Type de question : Question écrite

Rubrique : Personnes handicapées

Ministère interrogé : Personnes handicapées

Ministère répondant : Solidarités, autonomie et personnes handicapées

Dates :
Question publiée le 28 mai 2019
Réponse publiée le 21 juin 2022

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