Question orale n° 1 :
Tarifs des colis postaux outre-mer / Hexagone : situation et inégalités.

15e Législature

Question de : M. Jean-Hugues Ratenon
Réunion (5e circonscription) - La France insoumise

M. Jean-Hugues Ratenon alerte M. le ministre de l'économie et des finances sur la question des tarifs des colis postaux échangés entre l'outre-mer et l'Hexagone. Dans quelques semaines ce seront les fêtes de la fin de l'année 2017. Entre 900 000 et 1 million d'ultramarins vivant et travaillant dans l'Hexagone ont l'habitude de recevoir des colis de leurs proches ou de leurs amis, comme une façon de garder le contact avec leurs territoires à travers les produits locaux envoyés par les familles. Pour La Réunion, c'est le letchi, les mangues, les ananas, ou encore les saucisses, le boucané, et évidemment le piment ! Le tout arrosé d'un vin Cilaos ou de punch. Or les Français sont victimes d'une grande injustice, d'un véritable scandale. En effet, alors que l'envoi d'un colis d'un kilo entre les départements de l'Hexagone coute 7,50 euros, il revient à 13,90 euros ou 16,60 euros de l'outre-mer vers la métropole. Et si c'est un colis de 10 kilos l'écart est encore plus flagrant : 18,90 euros pour la France métropolitaine ; 45,50 euros ou 96 euros pour l'outre-mer. Il est inacceptable - voire illégal - que les ultramarins soient traités comme des français de seconde zone. Pourquoi la péréquation tarifaire qui existe en métropole n'existe-t-elle pas en outre-mer, comme c'est le cas pour EDF ? Il lui rappelle que selon les règles européennes et selon les critères d'exercice de la mission de La Poste, tous les points du territoire national doivent être traités à égalité. Alors que l'État et La Poste sont en train de finaliser le contrat d'entreprise qui les lie autour des missions de service public de La Poste, de ses objectifs de qualité de service et compensations financières qui peuvent en découler. Il l'interroge sur sa volonté ou non de mettre fin à cette différence de traitement et, le cas échéant, dans quel délai.

Réponse en séance, et publiée le 13 décembre 2017

ENVOIS POSTAUX ENTRE LES DÉPARTEMENTS D’OUTRE-MER ET LA FRANCE MÉTROPOLITAINE
M. le président. La parole est à M. Jean-Hugues Ratenon, pour exposer sa question, n°  1, relative aux envois postaux entre les départements d’outre-mer et la France métropolitaine.

M. Jean-Hugues Ratenon. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie et des finances. Je souhaite l'alerter sur les tarifs des colis postaux pratiqués entre l'outre-mer et l'hexagone.

Les fêtes de fin d'année auront lieu dans quelques jours. Entre 900 000 et 1 million d'Ultramarins vivant et travaillant dans l'hexagone ont l'habitude, quand c'est possible, de recevoir des colis de leurs proches ou de leurs amis – une façon de garder le contact avec leur territoire d'origine. Pour La Réunion, par exemple, cela concerne le letchi, les mangues, les ananas ou encore les charcuteries et, évidemment, le piment, le tout arrosé d'un vin de Cilaos ou de punch.

Or nos compatriotes sont victimes d'une grande injustice, d'un véritable scandale. Alors que l'envoi d'un colis d'un kilo entre les départements de l'hexagone coûte 7,50 euros, il revient à 13,90 euros ou 16,60 euros des outre-mer vers la métropole. Pour un colis de 10 kilos, l'écart est encore plus flagrant : 18,90 euros pour la France métropolitaine, 45,50 euros ou 96 euros pour l'outre-mer.

Il est inacceptable, voire illégal que les Ultramarins ne soient pas traités comme les autres Français. Pourquoi les outre-mer sont-ils exclus de la péréquation tarifaire qui existe sur le territoire métropolitain, comme c'est le cas pour EDF ? Pourtant, selon les règles européennes et selon les critères d'exercice de la mission de La Poste, tous les points du territoire de France doivent être traités à égalité.

Cette injustice n'a que trop duré. Elle concerne tout l'outre-mer : la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane, La Réunion, Mayotte, la Nouvelle-Calédonie, Wallis-et-Futuna et j'en passe. Cette différence de traitement a choqué également en métropole puisque la presse nationale s'en est fait l'écho, en particulier Le Figaro, le 30 octobre dernier, et Mediapart, le 5 novembre dernier.

Alors que l'État et La Poste sont en train de finaliser le contrat d'entreprise qui les lie autour des missions de service public, M. le ministre de l'économie et des finances saisira-t-il cette opportunité pour mettre fin à cette différence de traitement qui date de l'époque coloniale ?

La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics. Monsieur le député, la loi du 9 février 2010, qui a transformé La Poste en société anonyme, a confirmé les quatre missions de service public confiées à l'entreprise : le service universel postal, le transport et la distribution de la presse, la contribution à l'aménagement du territoire, et l'accessibilité bancaire.

La Poste est, depuis, engagée dans une transformation sans précédent de son modèle industriel, économique et social. Le développement des échanges numériques, la baisse significative et irréversible du volume du courrier – de 6,5 % en 2015 et 5,2 % en 2016 –, la diminution de la fréquentation des bureaux de poste d'en moyenne 6 % par an qui en résulte, ont profondément remis en cause son cœur de métier.

En parallèle, dans une recherche d'une plus grande égalité d'accès des usagers au catalogue du service universel postal, la loi du 28 février 2017 de programmation relative à l'égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique a introduit un alignement tarifaire pour les envois relevant de la deuxième tranche de poids du courrier – de 21 à 100 grammes – à destination et en provenance des départements d’outre-mer, mais également de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Saint-Barthélemy. Il s'est ainsi agi d'étendre la péréquation tarifaire déjà appliquée pour la première tranche de poids – de 0 à 20 grammes –, cette première tranche concentrant les trois quarts des flux actuellement traités par La Poste.

Cet alignement tarifaire a pour objectif de favoriser l'accès des usagers ultramarins et d'offrir, à un prix abordable, l'accès au service public essentiel qu'est le service universel. Ainsi, selon les estimations de La Poste, 96 % des envois de correspondances à l'unité à destination ou en provenance de l'outre-mer bénéficient désormais de la péréquation.

Toutefois, un éventuel alignement tarifaire pour les autres tranches de poids du courrier – de 101 grammes à 2 kilogrammes – mais également pour les tarifs du colis, n'est pas souhaitable à ce stade. Il occasionnerait un coût supérieur à celui engendré par l'extension pour la deuxième tranche de poids, alors que cela ne concernerait que 4 % du trafic. Ce coût devrait être répercuté sur l'ensemble des usagers ou compensé budgétairement à La Poste. Votre proposition conduirait donc à fragiliser l'équilibre économique du service universel postal.

Par ailleurs, l'article L. 1 du code des postes et des communications électroniques dispose notamment que les prix du catalogue du service universel sont orientés sur les coûts et qu'ils incitent à une prestation efficace, tout en tenant compte des caractéristiques des marchés sur lesquels ils s'appliquent. Or les coûts de traitement d'un colis outre-mer sont trois fois supérieurs à ceux d'un colis intramétropole, principalement en raison des coûts de prise en charge au guichet, du fait des documents douaniers, et d'acheminement, avec le transport aérien.

Ces différences de coûts sont introduites dans les tarifs qui sont approuvés par l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes. Il faut toutefois noter que, depuis 2009, La Poste a procédé à des évolutions tarifaires plus faibles en moyenne pour le colis outre-mer que pour le colis métropole – 1,7 % pour l'outre-mer contre 2,5 % pour la métropole.

Enfin, tous les colis échangés entre les outre-mer et la métropole n'entrent pas dans le champ du service universel dont La Poste est l'opérateur désigné par la loi. En outre, imposer, pour certaines catégories de colis, des tarifs réglementés déconnectés des coûts liés à l'éloignement géographique poserait de graves problèmes de concurrence déloyale envers certains acteurs économiques comme les expressistes ou les transporteurs.

Cela étant, soyez assuré, monsieur le député, que le Gouvernement, qui a fixé parmi ses priorités la lutte contre les inégalités territoriales, reste très attentif au bon accomplissement par La Poste de ses missions de service public, auxquelles nos concitoyens sont très attachés et ce, dans tous les territoires.

M. le président. La parole est à M. Jean-Hugues Ratenon.

M. Jean-Hugues Ratenon. Votre réponse, monsieur le secrétaire d'État, ferme la porte à l'égalité de traitement entre les Français de la République.

Données clés

Auteur : M. Jean-Hugues Ratenon

Type de question : Question orale

Rubrique : Outre-mer

Ministère interrogé : Économie et finances

Ministère répondant : Économie et finances

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 5 décembre 2017

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