15ème législature

Question N° 20167
de Mme Jeanine Dubié (Libertés et Territoires - Hautes-Pyrénées )
Question écrite
Ministère interrogé > Europe et affaires étrangères
Ministère attributaire > Europe et affaires étrangères

Rubrique > politique extérieure

Titre > Affaires étrangères - Prélèvements illicites d'organes humains - Chine

Question publiée au JO le : 04/06/2019 page : 5071
Réponse publiée au JO le : 16/07/2019 page : 6702

Texte de la question

Mme Jeanine Dubié attire l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur les soupçons de trafic d'organes prélevés sur des prisonniers de conscience en Chine, notamment sur les pratiquants de Falun Gong, mais également sur des groupes minoritaires politiques ou ethniques, qui serviraient à alimenter un tourisme médical de transplantation d'organes. En effet, si la Chine a officiellement interdit en 2015 le prélèvement d'organes sur les condamnés à mort sans accord préalable, des interrogations subsistent quant à la réalité des chiffres de transplantations annoncés par le régime chinois qui masqueraient la poursuite d'opérations clandestines à partir de donneurs non consentants. La convention du Conseil de l'Europe contre le trafic d'organes humains, entrée en vigueur depuis le 1er mars 2018, invite les gouvernements à ériger en infraction pénale le prélèvement illicite d'organes humains. Cette convention n'a, à ce jour, pas été ratifiée par la France. Par ailleurs, une association française de lutte contre les prélèvements forcés d'organes propose la création d'un registre des patients transplantés à l'étranger, permettant de développer un réseau européen de partage d'organes éthiquement transplantés et de lutter contre le tourisme de transplantation d'organes illicitement prélevés. C'est pourquoi elle lui demande de bien vouloir lui indiquer la position du Gouvernement ainsi que les solutions envisagées pour une réelle interruption des prélèvements illicites.

Texte de la réponse

La lutte contre la traite des êtres humains est une priorité de la France qui entend favoriser une approche multidisciplinaire (justice, forces de police et de gendarmerie, services sociaux et société civile). L'approche française s'appuie sur quatre volets, tels que définis par son plan d'action national et par le plan d'action mondial contre la traite des êtres humains adopté en 2010 par l'Assemblée générale des Nations unies : prévenir, protéger, poursuivre et promouvoir les partenariats de coopération. La Chine a rendu illégal le trafic d'organes en 2007 et a officiellement mis fin aux prélèvements d'organes sur des prisonniers exécutés en 2015. La réforme a permis des avancées positives. Aujourd'hui, le système de transplantation est fondé sur des dons d'organes. L'enjeu pour la Chine demeure à présent la pleine mise en œuvre de la loi. La France et la Chine sont parties à la convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée, dite convention de Palerme et à son protocole additionnel visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants. Les Etats parties à la convention de Palerme ont adopté à l'unanimité, en octobre 2018, la résolution portée par l'Italie, la France et le Costa Rica permettant de créer un mécanisme d'examen de l'application de la convention et de ses protocoles, afin de garantir la mise en œuvre de leurs dispositions par tous les Etats membres. La définition internationalement agréée de la traite des êtres humains contenue dans le Protocole à la Convention de Palerme comprend explicitement le prélèvement d'organes qui doit donc être réprimé par tous les Etats parties. Il en est d'ailleurs de même pour la Convention du Conseil de l'Europe contre la traite des êtres humains à laquelle est partie la France. En 2019, la France ainsi que dix autres Etats, ont annoncé leur ralliement à la campagne "Cœur Bleu" de l'Office des Nations unies contre la Drogue et le Crime qui vise à attirer l'attention de la communauté internationale sur le phénomène de la traite des êtres humains, à mettre l'accent sur la situation des victimes et à encourager à soutenir la lutte contre ce phénomène. Au sein de l'Union européenne, la traite des êtres humains, qui intègre la question de la traite aux fins du prélèvement d'organe, fait partie d'une des 13 priorités retenues du cycle politique européen de lutte contre la criminalité organisée (2014-2017), identifiées par EUROPOL. Cette priorité a été maintenue dans le cycle 2018-2021. Elle est fondée sur la directive 2011/36/UE relative à la prévention de la traite des êtres humains ainsi qu'à la lutte contre ce phénomène et la protection des victimes. Aux termes de cette directive de 2011 un deuxième rapport de progrès publié le 3.12.2018 a été établi par la Commission sur la prévention de la traite des êtres humains ; il souligne une aggravation de la traite et en particulier une impunité des auteurs qui exploitent les victimes. Le rapport souligne en particulier l'émergence de nouveaux trafics ciblant en particulier le trafic de tissus humains. Le faible nombre de condamnations et de poursuites, ainsi que le nombre de victimes dans l'UE, indiquent qu'il reste nécessaire de continuer à intensifier l'identification des victimes, les enquêtes, les poursuites, la collecte des données et leur enregistrement, la coopération transfrontière et la sensibilisation. S'agissant de la Convention contre le trafic d'organes humains, la procédure de signature et de ratification a été lancée. La France est actuellement au stade de la consultation interministérielle (précédant la première phase de signature de la Convention). Sans porter d'appréciation sur la nature du mouvement Falun Gong, la France entend continuer ses efforts en faveur du respect par la Chine, de la liberté de religion ou de conviction. Elle souhaite, à ce titre, la libération des prisonniers de conscience. De manière générale, la France évoque régulièrement la question des droits de l'Homme en Chine lors des entretiens bilatéraux de haut niveau. Elle exprime ses préoccupations publiquement au Conseil des droits de l'Homme.