Question de : Mme Carole Grandjean
Meurthe-et-Moselle (1re circonscription) - La République en Marche

Mme Carole Grandjean interroge Mme la secrétaire d'État, auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur la fraude à la rénovation énergétique. Aujourd'hui, le logement représente environ 45 % de la consommation d'énergie et constitue pas moins d'un tiers des émissions de gaz à effet de serre. Outre les engagements pris par le Gouvernement de réduction d'émissions de gaz à effet de serre, et la trajectoire zéro carbone à l'horizon 2050, l'urgence se porte sur la rénovation énergétique des logements. Le projet de loi énergie et climat présenté à l'Assemblée nationale propose un certain nombre de leviers afin d'encourager la rapide adaptation des logements. Il existe toutefois des dispositifs déjà en vigueur en France qui permettent de co-financer ces travaux d'économie d'énergie, comme les certificats d'économies d'énergie (CEE) mis en place en 2006. En 2019, on évalue à près de quatre milliards d'euros le montant de primes versées aux ménages, aux collectivités, aux syndics de copropriété et aux industries qui veulent réaliser de tels travaux. Par ailleurs, 1 million de chaudières fioul seront remplacées en 2023, grâce à la prime CEE « Coup de Pouce ». Or, dans un rapport du 27 novembre 2018, l'organisme du Traitement du renseignement et action contre les circuits financiers clandestins, dit « TRACFIN », fait état d'une augmentation du nombre de fraudes. Malgré les phases successives de renforcement du dispositif, on observe des mécanismes de plus en plus complexes, faisant intervenir tout une chaîne de sous-traitants malveillants afin d'opérer des schémas complexes de blanchiment d'argent. Si la fraude à la rénovation énergétique semble porter principalement sur l'erreur de bonne foi (notamment pour sur des travaux surévalués ou mal réalisés), on constate également des chaînes bien organisées utilisant ces leviers pour détourner les certificats d'économies d'énergie de leurs objectifs initiaux. Ainsi, elle l'interroge afin de connaître l'ensemble des dispositifs juridiques et des renforcements administratifs qui seront mis en place afin de veiller à la bonne affectation de ces certificats d'économies d'énergie pour les travaux de rénovations énergétiques, et de lutter plus efficacement contre la fraude.

Réponse publiée le 3 décembre 2019

La France a mis en place un dispositif de certificats d'économies d'énergie (CEE) depuis 2006. Ce dispositif repose sur une obligation de réalisation d'économies d'énergie imposée par les pouvoirs publics aux vendeurs d'énergie. Un objectif pluriannuel est défini, puis réparti entre les opérateurs en fonction de leurs volumes de ventes. Il est assorti d'une pénalité financière pour les vendeurs d'énergie ne remplissant pas leurs obligations dans le délai imparti. Pour se voir attribuer des certificats, les acteurs éligibles doivent pouvoir prouver la réalité des actions mises en œuvre et le fait qu'ils ont contribué à leur réalisation, par exemple par l'attribution d'une prime. Depuis 2015 et l'entrée dans la 3ème période d'obligation des CEE, de nouvelles modalités ont été instituées et notamment une standardisation des documents et un processus simplifié de demande, couplé à un contrôle a posteriori. Ces contrôles ont été mis en place dans le but d'identifier les éventuels manquements liés à la délivrance des certificats d'économies d'énergie. Ainsi, les demandes simplifiées sont instruites et subissent avant délivrance un certain nombre de vérifications de premier niveau. Des contrôles sont ensuite menés par l'administration de façon régulière sur les CEE délivrés. Plus de 400 contrôles ont été lancés depuis le 1er janvier 2015 et ont conduit à prononcer une cinquantaine de sanctions : annulations cumulées de près de 1,3 TWh cumac et sanctions pécuniaires cumulées de plus de 12 millions d'euros. Près de 10 TWh non conformes ont également été retirés par les demandeurs suite à ces contrôles. Les contrôles menés ont révélé dans quelques cas exceptionnels des pratiques de nature frauduleuse. Ces cas sont suivis et traités en lien avec les autres services de l'administration spécialisés et la justice. Ainsi, plus d'une dizaine de signalements au titre de l'article 40 du code de procédure pénale ont été effectués, auxquels s'ajoutent une dizaine de déclarations de soupçon auprès de TRACFIN au titre de l'article L561-27 du code monétaire et financier concernant parfois plusieurs sociétés en une déclaration. Par ailleurs, depuis 2018 des contrôles systématiques par un organisme de contrôle sont exigés sur les isolations de réseaux d'eau chaude ou encore sur certaines opérations réalisées dans le cadre de la charte « coup de pouce certificats d'économies d'énergie ». Depuis 2019, le ministère de la transition écologique et solidaire a fait le choix de massifier le dispositif « coup de pouce » qui prévoit la bonification des primes versées aux ménages, pour les demandeurs de CEE signataires de la charte associée. La signature de cette charte s'accompagne, pour les travaux d'isolation de combles, d'une obligation de contrôles sur site par un organisme de contrôle accrédité. Au regard de la massification du dispositif, ces contrôles par des organismes accrédités concernent un nombre croissant d'opérations d'économies d'énergie. En complément, un marché de prestation d'un montant de 1M€ par an pour la réalisation de constats sur site par des organismes accrédités, diligentés par l'administration, est en cours de mise en œuvre. Il va permettre de démultiplier l'action de contrôle de l'administration avec des visites de plusieurs milliers d'opérations d'économies d'énergie. La direction générale de l'énergie et du climat s'est dotée également d'effectifs renforcés avec l'arrivée en 2019 de 5 équivalents temps plein supplémentaires au pôle national des certificats d'économies d'énergie. Enfin, adopté par l'Assemblée nationale le 11 septembre dernier, le projet de loi sur l'énergie et le climat et ses dispositions relatives aux certificats d'économies d'énergie vont permettre d'amplifier l'action de l'administration pour lutter contre la fraude aux CEE, en accélérant les procédures de contrôle et facilitant le cadre juridique de l'échange d'informations entre les différents services de l'État et en augmentant les contrôles externes imposés aux énergéticiens. De nouvelles dispositions vont également permettre aux services de l'État de signaler aux organismes de qualification Reconnu garant de l'environnement (RGE) des manquements manifestes aux règles de qualification et d'imposer l'obligation de le faire pour les demandeurs de CEE. Enfin, le projet de loi va permettre de revoir le plafond des sanctions pécuniaires. La problématique des particuliers victimes de malfaçons fait actuellement l'objet d'une campagne de prévention pilotée par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). Plusieurs recommandations pour éviter les « arnaques » et des indications sur les moyens de recours sont détaillées en ligne, sur le site de l'administration, et ont été relayés par la presse. La DGCCRF effectue des contrôles réguliers et a mis en place BLOCTEL, un service gratuit pour se protéger du démarchage téléphonique abusif. Les ministères de la transition écologique et solidaire, de la cohésion des territoires, et de l'économie et des finances travaillent à un renforcement conjoint et coordonné de leurs actions de lutte contre les fraudes à la rénovation énergétique et communiqueront prochainement sur les nouvelles actions prévues.

Données clés

Auteur : Mme Carole Grandjean

Type de question : Question écrite

Rubrique : Énergie et carburants

Ministère interrogé : Transition écologique et solidaire (Mme Poirson, SE auprès du ministre d'État)

Ministère répondant : Transition écologique et solidaire (Mme Poirson, SE auprès de la ministre)

Dates :
Question publiée le 2 juillet 2019
Réponse publiée le 3 décembre 2019

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