15ème législature

Question N° 2114
de M. Fabrice Brun (Les Républicains - Ardèche )
Question écrite
Ministère interrogé > Europe et affaires étrangères
Ministère attributaire > Europe et affaires étrangères

Rubrique > politique extérieure

Titre > Migrations internationales et nécessité de préserver l'aide au développement

Question publiée au JO le : 17/10/2017 page : 4926
Réponse publiée au JO le : 02/01/2018 page : 77

Texte de la question

M. Fabrice Brun attire l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur la question des migrations internationales et la nécessité de préserver l'aide au développement. Selon les données officielles de l'ONU-ONICEF de 2015 les pays de l'Afrique subsaharienne ont un taux de fécondité de 4,9 enfants par femme, ceux de l'Afrique de l'Ouest et du Centre de 5,4 enfants par femme. L'Afrique est par conséquent le continent qui connaîtra la plus forte croissance démographique et la moitié des enfants du monde seront africains à la fin de ce siècle. Si les pays développés et plus particulièrement les pays européens n'aident pas les pays africains, il en résulterait des mouvements migratoires économiques massifs. C'est pourquoi il est impératif de mener une politique ambitieuse d'aide au développement. Or la législature 2012-2017 a sacrifié les crédits budgétaires de la mission « Aide publique au développement », sans que les financements innovants ne pallient cette diminution. De 2012 à 2017, les crédits consacrés à l'aide au développement - financements innovants inclus - ont diminué de 20 %. Contrairement à ce qui faisait tout l'honneur de sa tradition, la France se laisse glisser au bas de la liste des pays engagés pour l'atteinte de l'objectif fixé au sommet de Monterrey en 2002, et répété à Addis Abbeba en juillet 2015, de consacrer 0,7 % du revenu national brut à l'aide au développement. Situés en 2012 à une place honorable avec 0,45 %, la France est désormais les mauvais élèves de l'OCDE avec un engagement de 0,37 % du RNB en 2015, treizième de la liste derrière la Suède (1,41 %), les Émirats arabes unis (1,09 %), la Norvège (1,05 %), le Luxembourg (0,93 %), le Danemark (0,85 %), les Pays-Bas (0,76 %), le Royaume-Uni (0,71 %), la Finlande (0,56 %), la Turquie (0,54 %), la Suisse et l'Allemagne (0,52 %) et la Belgique (0,42 %). C'est pourquoi il lui demande de lui indiquer si le Gouvernement entend faire de l'aide au développement une priorité stratégique et mettre fin à cette décrue des crédits consacrés à l'aide au développement.

Texte de la réponse

Le Président de la République s'est engagé sur un objectif d'aide publique au développement (APD) représentant 0,55 % du RNB en 2022, devant permettre d'atteindre l'engagement collectif européen de 0,7 % dans le délai fixé par le programme pour l'après-2015. Cet engagement a été confirmé, notamment lors de l'AGNU de septembre 2017 à l'ONU. Cette impulsion forte suppose de passer de 8,6 milliards d'euros d'aide publique au développement à plus de 14,5 milliards d'euros en 2022 selon les hypothèses de croissance actuelles, ce qui représente une augmentation majeure et historiquement inégalée, l'APD française n'ayant jamais dépassé en euros courants un volume de 10 milliards. Lors de son discours à l'Assemblée générale des Nations unies et plus récemment lors de son discours prononcé à Ouagadougou, le Président de la République a clairement réaffirmé la priorité géographique pour l'Afrique de l'aide publique au développement française, en mettant en avant quatre secteurs : l'éducation car il faut donner une alternative au fondamentalisme et à l'obscurantisme qui déstabilisent des pays et des régions entières en Afrique et au Moyen-Orient ; l'égalité femmes-hommes ; la lutte contre les dérèglements climatiques et le Sahel, dans le contexte de "l'Alliance pour le Sahel" lancée avec l'Allemagne le 13 juillet 2017. La France poursuivra également son action pour l'éradication des pandémies, dont le VIH Sida, qui continue de constituer une grave menace sur le continent africain. Cette aide publique au développement peut prendre part à la résolution des crises migratoires. Elle ne saurait à elle seule être la réponse à un défi aux causes multiples, dont les effets se font sentir sur le long terme. D'autres politiques, telles que les transferts de fonds des migrants (trois fois supérieurs à l'aide au développement) et l'investissement productif des diasporas jouent aussi un rôle pour contribuer à "fixer" les populations sur place. Pour être à la hauteur de nos ambitions en matière de développement, en particulier en Afrique, les moyens doivent cependant être au rendez-vous. Si la France occupe toujours une place majeure sur la scène internationale en matière d'aide au développement, elle est aujourd'hui largement distancée par ses partenaires britannique et allemand, qui ont atteint en l'objectif des 0,7 % (selon les données préliminaires du CAD de l'OCDE respectivement de 2013 à 2016 et en 2016. Selon les données préliminaires du CAD (Comité d'aide au développement) de l'OCDE, la France est le cinquième contributeur mondial à l'APD (aide publique au développement) en 2016, avec 8,6 milliards d'euros, soit 0,38 % de son RNB (revenu national brut), ce qui est supérieur à la moyenne des pays du CAD (0,32 %). En 2016, l'APD française a augmenté significativement (+ 600 millions d'euros depuis 2014) pour la deuxième année consécutive suite à une période tendanciellement à la baisse. Sur la période 2010-2014, l'APD française a en effet diminué de près de 1,7 milliards d'euros, passant de 0,50 % à 0,37 % de son RNB. L'objectif intermédiaire de 0,55 % vise donc à redonner à la France un rôle de premier plan dans le domaine de l'aide au développement, et de respecter les engagements internationaux renouvelés en 2015 en matière d'APD. Il s'agit également d'un défi important. En particulier, il doit être réalisé dans le respect de nos engagements budgétaires au niveau européen. Dans un contexte de priorité donnée au rétablissement des comptes publics, la hausse des dépenses d'APD reste ainsi fortement contrainte sur les années budgétaires 2017 et 2018. Une accélération est donc plus aisée sur la période 2019-2022 dans le but d'honorer l'engagement présidentiel de 0,55 % du RNB consacré à l'APD en 2022. Le gouvernement travaille donc activement à la définition d'une trajectoire de l'APD française pour les cinq prochaines années. Un effort important de concertation avec toutes les parties prenantes, notamment les ONG et la société civile, a d'ores-et déjà été lancé. C'est ce que reflètent les consultations avec les acteurs non-étatiques, réunis au sein du Conseil national du développement et de la solidarité internationale (CNDSI), qui permettront d'enrichir les réflexions sur les nouvelles priorités et la trajectoire de l'aide publique au développement. Cela se traduit également par la convocation d'un nouveau Comité interministériel pour la coopération internationale et le développement (CICID) en février 2018. Tous les efforts sont donc mis en œuvre et toutes les compétences mobilisées, pour établir une trajectoire d'APD viable de hausse de l'aide publique au développement et répondre ainsi aux fortes attentes à l'égard de notre pays comme partenaire du développement.