Question de : Mme Valérie Bazin-Malgras
Aube (2e circonscription) - Les Républicains

Mme Valérie Bazin-Malgras attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les inquiétudes exprimées par les entreprises du secteur betterave-sucre-éthanol dans le cadre du compromis final entre l'UE et le Mercosur. En effet, l'UE a accepté de supprimer le droit de douane pour 180 000 tonnes de sucre en provenance du Brésil pour une période de cinq ans et d'octroyer un contingent supplémentaire de 10 000 tonnes au Paraguay. Pour ce dernier contingent, il s'agit vraisemblablement de sucre bio. En matière d'éthanol, l'UE accorde un contingent de 450 000 tonnes à droit nul pour l'utilisation par l'industrie chimique ainsi qu'un contingent de 200 000 tonnes à droit réduit sur une période de six ans. Ces concessions sur le sucre et l'éthanol représentent l'équivalent de 1,5 millions de tonnes de sucre, soit la production de sept sucreries européennes. Les volumes concédés sur l'éthanol représentent 2 fois le volume des importations actuelles de l'UE et viendront déstabiliser les efforts engagés pour développer une filière européenne de production locale de bioéthanol carburant. Les concessions sur le sucre bio et l'éthanol vont fragiliser ces débouchés en développement, alors qu'ils constituent des facteurs de résilience face à la crise. Le sucre de canne brésilien est fabriqué selon des standards sanitaires et environnementaux qui sont nettement inférieurs à ceux du sucre de betterave européen. Ainsi, 74% des produits phytosanitaires utilisés au Brésil ne sont pas autorisés en Europe. En outre, le Brésil vient d'autoriser la mise en culture de canne à sucre OGM et traite la canne à sucre, avant récolte, au glyphosate à des fins de maturation anticipée. On ne peut pas considérer que cela réponde à l'urgence de la problématique environnementale ou encore aux attentes de la société et des consommateurs. Alors que la filière sucrière de l'UE fait face à une crise profonde, ces décisions montrent que la Commission n'entend pas les alertes de la profession. C'est d'autant moins compréhensible que le Groupe à haut niveau sur le marché du sucre mis en place par la Commission vient de recommander que la sensibilité du sucre et de l'éthanol soit reconnue et que la crise actuelle soit prise en compte. L'Association interprofessionnelle de la betterave et du sucre et le syndicat betteravier de l'Aube demandent donc que le volet commercial de l'accord Mercosur ne puisse pas faire l'objet d'une application provisoire avant la conclusions des processus de ratification. Les entreprises du secteur betterave-sucre-éthanol appellent donc les représentants français à Bruxelles, au Parlement et au Conseil, à s'opposer à la ratification de l'accord, et demandent au Gouvernement de faire la pleine lumière sur les différences de production entre la France et les pays tiers au premier rang desquels le Brésil, par une communication d'envergure auprès du grand public. Elle lui demande par conséquent de bien vouloir lui indiquer comment il entend répondre à ces attentes fortes.

Réponse publiée le 27 août 2019

La France est favorable aux accords de libre-échange et au commerce, pour autant que les accords signés soient équilibrés et respectent les filières sensibles. Pour répondre aux interrogations légitimes des agriculteurs et de la société civile, le Gouvernement a mis en place le 29 juillet 2019 une commission d'évaluation indépendante, chargée de mesurer les impacts de l'accord conclu entre l'Union européenne (UE) et le Mercosur en matière économique, sociale et environnementale. Les travaux de cette commission et des corps d'inspections permettront de mettre en lumière les différences de production entre la France et les pays du Mercosur et d'en tirer les recommandations nécessaires. Les contingents annoncés pour le sucre et l'éthanol dans l'accord sont importants, qu'il s'agisse des volumes supplémentaires octroyés, ou bien du démantèlement des droits qui s'appliquent aux contingents préexistants, et élargissent l'accès du Mercosur au marché européen. Le Gouvernement fait valoir auprès de la Commission européenne que les concessions tarifaires sur les produits sensibles doivent s'inscrire dans les limites d'une « enveloppe globale », permettant de définir ce qui est soutenable pour les filières au regard du marché, à l'échelle de l'ensemble des négociations en cours ou à venir. Le Gouvernement est attaché à obtenir de solides garanties sur les conditionnalités environnementales ainsi que sur le respect des normes sanitaires européennes sur les produits eux-mêmes, mais aussi sur leur processus de fabrication. Le principe selon lequel tout produit qui entre dans l'UE doit respecter les règles du marché intérieur, en particulier les normes sanitaires et phytosanitaires, est non-négociable. Les importations de sucre dans l'UE destinées à l'alimentation doivent respecter les limites maximales de résidus définies par la règlementation européenne, sur la base d'un avis de l'autorité européenne de sécurité des aliments. Les organismes génétiquement modifiés (OGM) ou produits dérivés d'OGM destinés à l'alimentation doivent également, pour pouvoir être mis sur le marché dans l'UE, faire l'objet d'une autorisation au titre du règlement (CE) n° 1829/2003. Le Gouvernement a bien identifié les préoccupations exprimées, à la fois par les producteurs et les consommateurs, celles-ci ne portent pas seulement sur la qualité sanitaire des importations, mais également sur l'équivalence des modes de production. Afin de garantir des conditions de concurrence équitable entre nos producteurs et ceux du Mercosur, il importe de continuer à améliorer l'information du consommateur, dans le respect des règles du commerce international, en mettant en place un étiquetage qui permettra de connaître les modes de production. Le renforcement de la compétitivité et de la durabilité de nos filières agricoles constitue également une priorité : une agriculture européenne solide et durable nécessite une politique agricole commune (PAC) à la hauteur des enjeux, dotée d'un budget équivalent au budget actuel. C'est au niveau européen que les standards de production applicables aux produits issus de pays tiers doivent être fixés. Le Gouvernement porte auprès de la Commission européenne l'objectif d'une meilleure cohérence entre la politique commerciale et la politique agricole de l'UE, conformément aux engagements de l'axe 3 de son plan d'action relatif au CETA. Il le porte également dans la réforme de la PAC, en affirmant que la nouvelle PAC, en cohérence avec les autres politiques européennes, doit accompagner le projet européen au service d'une agriculture répondant à des standards exigeants et ne peut se concevoir sans une régulation sociale, environnementale et sanitaire des échanges avec les autres pays.

Données clés

Auteur : Mme Valérie Bazin-Malgras

Type de question : Question écrite

Rubrique : Commerce extérieur

Ministère interrogé : Agriculture et alimentation

Ministère répondant : Agriculture et alimentation

Dates :
Question publiée le 16 juillet 2019
Réponse publiée le 27 août 2019

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