Question au Gouvernement n° 2147 :
CETA

15e Législature

Question de : Mme Laurence Dumont
Calvados (2e circonscription) - Socialistes et apparentés

Question posée en séance, et publiée le 17 juillet 2019


CETA

M. le président. La parole est à Mme Laurence Dumont.

Mme Laurence Dumont. Demain, notre assemblée sera appelée à se prononcer sur la ratification du CETA – Comprehensive Economic and Trade Agreement, ou Accord économique et commercial global. Cet accord commercial, conclu entre l'Union européenne et le Canada, aura des conséquences inédites et dangereuses pour la planète, notre modèle agricole et nos services publics. (« Eh oui ! » sur quelques bancs du groupe LR.)

Les raisons qui justifient le rejet de ce texte sont nombreuses ; je veux ici en relever une qui, à elle seule, en illustre la dangerosité, ainsi que les mensonges que le Gouvernement est prêt à assumer pour le faire passer coûte que coûte : l'utilisation des farines animales.

Interdites en Europe depuis l'épisode tragique de la « vache folle », ces farines sont autorisées au Canada, quoi qu'en dise la majorité : c'est donc là un premier mensonge.

M. Vincent Descoeur. Eh oui, c'est vrai !

Mme Laurence Dumont. Second mensonge : vous affirmez que, de toute façon, aux termes de ce traité, aucune viande issue de bovins nourris aux farines animales ne sera autorisée à entrer sur le marché européen. C'est faux ! Et votre ministère a lui-même fini par le reconnaître, hier, en conférence de presse.

M. Patrick Hetzel. Très juste !

Mme Laurence Dumont. Aucune clause du CETA, en effet, n'impose une telle interdiction à nos importations. Non, le CETA ne nous donne aucun moyen de nous protéger de ces viandes issues d'élevages nourris aux farines animales. Non, monsieur Lemoyne, Nicolas Hulot n'a pas menti sur ce point. Oui, nous allons bel et bien ouvrir notre marché à des produits qui ne répondent ni à nos normes de production, ni aux attentes de la société.

En plein cœur de l'été, en catimini – puisque vous avez refusé, ce matin, un vote solennel sur ce sujet si important (« Eh oui ! sur plusieurs bancs du groupe LR) –,…

M. Raphaël Schellenberger. Un peu de courage !

Mme Laurence Dumont. …vous voulez faire passer en force cet accord taillé sur mesure pour les multinationales. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, GDR et LR.)

Vous le faites contre l'avis de beaucoup, beaucoup de monde : experts, monde agricole, sociétés civiles des deux côtés de l'Atlantique et une grande majorité de Français. Tous se sont exprimés, ces jours-ci, pour refuser un tel approfondissement de la mondialisation au détriment de l'urgence écologique, sanitaire et sociale. Les écouterez-vous enfin ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, GDR et FI.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères.

M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères. Je vous remercie, madame Dumont, pour cette question qui me permet de clarifier certaines choses. En matière sanitaire, les normes et les exigences des Européens demeureront inchangées. Après le CETA, il ne sera pas plus possible qu'avant lui d'importer, en Europe, du bœuf aux hormones, du saumon transgénique, des farines animales du type que vous avez décrit, c'est-à-dire des farines issues de ruminants. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LR.)

Mme Marine Le Pen. Menteur !

M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État. Regardez bien : les farines animales issues de ruminants ne sont pas autorisées par cet accord ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – Vives exclamations sur les bancs des groupes SOC, FI et LR.)

Plusieurs députés du groupe LR . Menteur !

M. le président. S'il vous plaît, mes chers collègues.

M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État . Il est important que la France, pays des Lumières, ne sombre pas dans l'irrationnel. (Huées.)

Sachez, madame la députée, que, grâce à cet accord, les indications géographiques protégées, comme le pont-l’évêque, le livarot ou le camembert de Normandie, auquel je vous imagine attachée, seront protégées de toute concurrence, de toute copie. (Mêmes mouvements.)

Quelle est donc la majorité qui soutenait le Gouvernement précédent, celui qui a signé le CETA ? La vôtre, madame la députée ! (Protestations sur les bancs du groupe SOC. – Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe MODEM.) Et quelle est la majorité qui soutient le Gouvernement ayant obtenu des Canadiens un veto climatique ?

M. Éric Coquerel. Mensonge !

M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État . La majorité actuelle ! (Mêmes mouvements.)

Quelle est la majorité qui a accompli un travail exemplaire pour compléter le CETA par un accord ambitieux en matière d'environnement ? Encore la majorité actuelle, avec Nicolas Hulot ! (« Menteur ! » sur les bancs des groupes LR et FI.)

Il importe de le préciser, l'accord dont nous parlons permet à nos filières d'exporter plus et mieux : vous pourrez le demander à tous ceux de nos agriculteurs qui, dans les filières du lait, du fromage ou du vin et des spiritueux, en bénéficient.

Merci, donc, de m'avoir permis de remettre l'église au milieu du village ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur plusieurs bancs du groupe MODEM.)

M. le président. Mes chers collègues, je vous répète combien j'aimerais, si vous voulez que l'on écoute vos questions, que vous ayez la dignité d'écouter les réponses. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM. – Protestations sur les bancs du groupe LR ainsi que parmi les députés non inscrits.)

Données clés

Auteur : Mme Laurence Dumont

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Commerce extérieur

Ministère interrogé : Europe et affaires étrangères (M. le SE auprès du ministre)

Ministère répondant : Europe et affaires étrangères (M. le SE auprès du ministre)

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 17 juillet 2019

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