Question au Gouvernement n° 2170 :
pratiques commerciales dans la grande distribution

15e Législature

Question de : M. Grégory Besson-Moreau
Aube (1re circonscription) - La République en Marche

Question posée en séance, et publiée le 24 juillet 2019


PRATIQUES COMMERCIALES DANS LA GRANDE DISTRIBUTION

M. le président. La parole est à M. Grégory Besson-Moreau.

M. Grégory Besson-Moreau. Ma question s'adresse à Mme Pannier-Runacher. « Nous avons fait une loi forte. Les acteurs économiques doivent s'en emparer. La balle est dans leur camp », indiquait M. le Président de la République à propos de la loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentation et alimentation – EGALIM. Une loi est faite pour être appliquée par tout le monde et pour tout le monde.

M. Pierre Cordier. Sans blague !

M. Grégory Besson-Moreau. Pourtant, poursuivant coûte que coûte sa politique qui vise à proposer, sous prétexte de pouvoir d'achat, les prix les plus bas de la grande distribution, le groupe Leclerc n'a pas souhaité appliquer cette loi, au mépris du nécessaire équilibre des relations entre la grande distribution et ses fournisseurs. Pour cette raison, dimanche 21 juillet, le ministre de l'économie M. Bruno Le Maire et vous-même avez annoncé que plusieurs entités du groupe étaient assignées en justice, et qu'elles risquaient de devoir acquitter une amende record de 117 millions d'euros. C'est le résultat d'une enquête de la DGCCRF – la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes – lancée au début de l'année 2018. La DGCCRF avait été saisie par divers fournisseurs qui accusaient la centrale d'achat belge d'user de moyens de pressions illégaux pour faire baisser les prix, notamment des menaces de déréférencement dans les rayons.

En tant que rapporteur de la commission d'enquête sur la situation et les pratiques de la grande distribution et de ses groupements dans leurs relations commerciales avec les fournisseurs, présidée par Thierry Benoit, je mène, avec les autres membres de la commission, de nombreuses auditions d'acteurs de l'agroalimentaire. Je suis assez impatient de rendre mon rapport, à la fin du mois de septembre. En effet, alors que la production agroalimentaire française concerne 400 000 agriculteurs, 17 000 industriels, pour seulement quatre centrales d'achat, nos auditions ont mis en évidence un abus de position dominante.

Le fait qu'aucune plainte n'ait été déposée montre simplement la force de l'omertà. Ce mot n'est pas exagéré et le problème est omniprésent. Des services fictifs, ou de faible valeur ajoutée sont facturés par les centrales d'achat, par l'intermédiaire d'une nébuleuse de holdings et de coopératives qui passent par Zurich, Bruxelles et Genève, nébuleuse qui a de quoi faire pâlir nos services fiscaux. Madame la secrétaire d'État, que compte faire l'administration fiscale, notamment la DGCCRF, pour se saisir pleinement et dans la durée de ce sujet majeur ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – Mme Cécile Untermaier applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État. Nous avons pris la pleine mesure des conséquences de la loi EGALIM, notamment en ce qui concerne l'équilibre des relations entre les acteurs de la filière agroalimentaire. Il est clair que, lorsque les distributeurs font pression pour que les prix baissent, ce sont les industriels et, derrière eux, les agriculteurs, qui en font les frais.

Il est inadmissible que près d'un tiers des agriculteurs vivent avec des revenus inférieurs à 40 % du SMIC.

M. Fabien Di Filippo. Vous les écrasez de charges !

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État . C'est à cette situation que nous nous attaquons. En février 2018, nous avons lancé une enquête sur le plus grand distributeur français, le groupe Leclerc. Elle a duré dix-huit mois, 5 000 messages ont été saisis, la documentation s'est élevée à 8 000 pages. Ce distributeur a fait le choix d'installer une centrale d'achat en Belgique, manifestement pour contourner la loi française qui visait à équilibrer les relations entre industriels et distributeurs, et afin d'imposer des baisses de prix sans contreparties. Ce n'est pas respecter la loi, ce n'est pas respecter l'ordre public.

Or le rôle de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes est de faire respecter la loi, de faire en sorte que la valeur créée parvienne jusqu'aux agriculteurs. Aussi puis-je vous confirmer que les contrôles futurs - de ce distributeur ou d'autres - seront intransigeants. Ils pourront donner lieu à des sanctions administratives, ou à la transmission des dossiers à la justice. L'objectif de ces travaux sera en tout cas de mieux répartir la valeur au profit des agriculteurs et des industriels. Les consommateurs seront in fine les grands gagnants de cette action. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)

Données clés

Auteur : M. Grégory Besson-Moreau

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Agroalimentaire

Ministère interrogé : Économie et finances (Mme la secrétaire d'État auprès du ministre)

Ministère répondant : Économie et finances (Mme la secrétaire d'État auprès du ministre)

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 24 juillet 2019

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