15ème législature

Question N° 2192
de M. Loïc Prud'homme (La France insoumise - Gironde )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Agriculture et alimentation
Ministère attributaire > Agriculture et alimentation

Rubrique > produits dangereux

Titre > risques liés aux fongicides SDHI

Question publiée au JO le : 18/09/2019
Réponse publiée au JO le : 18/09/2019 page : 7842

Texte de la question

Texte de la réponse

RISQUES LIÉS AUX FONGICIDES SDHI


M. le président. La parole est à M. Loïc Prud'homme.

M. Loïc Prud'homme. Monsieur le Premier ministre, en avril 2018, une cinquantaine de chercheurs, cancérologues et médecins ont alerté dans la presse sur les risques des fongicides SDHI – inhibiteurs de la succinate déshydrogénase – pour la santé humaine et pour l’environnement. Ces fongicides sont utilisés à grande échelle dans l'agriculture depuis dix ans. J’ai moi-même auditionné le lanceur d’alerte, le professeur Pierre Rustin, dès mai 2018. Une semaine plus tard, j’alertais l’ANSES – Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail – en audition. Ces pesticides sont épandus massivement sur les cultures, mais sont également présents sur les fruits que nous mangeons. Destinés à lutter contre les moisissures en bloquant la respiration cellulaire des champignons, ils bloquent aussi la respiration cellulaire de la microfaune du sol et celle des humains. Des recherches ont également mis en évidence des effets à l’origine de tumeurs et de cancers chez l’homme. Des travaux scientifiques menés depuis des années et particulièrement étayés par les résultats récents du professeur Rustin ont été présentés à l’ANSES, mais également à l’Assemblée nationale et au Sénat. Il s’agit d’une bombe sanitaire à retardement et vous ne pouvez pas dire que vous ne savez pas !

Contrainte par cette mise en lumière publique, l'ANSES s'est enfin emparée du dossier et a remis récemment un rapport sur les impacts des SDHI. Mais faute d’experts compétents en matière de mode d’action unique de ces molécules, l’agence dite de sécurité sanitaire laisse planer de nombreuses incertitudes sur des risques pourtant avérés. Cet organisme public censé protéger l’environnement et la santé humaine devrait appliquer le principe de précaution et interdire ces pesticides, mais rien ne se passe. Une fois de plus, les pouvoirs publics s’en remettent aux multinationales qui produisent à la fois les molécules et les études censées les évaluer. (Applaudissements sur les bancs du groupe FI.)

Monsieur le Premier ministre, allez-vous enfin faire en sorte que l'ANSES, agence de sécurité sanitaire, assure réellement et immédiatement notre protection en interdisant ces poisons chimiques qui envahissent notre quotidien à tous ? (Mêmes mouvements.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation.

M. Didier Guillaume, ministre de l'agriculture et de l'alimentation. Monsieur le député, je vous remercie pour votre question. Vous êtes un spécialiste et connaissez bien ces dossiers qui, je le sais, vous tiennent à cœur. Nous avons évidemment suivi l'alerte lancée par des scientifiques à propos des molécules SDHI. L'ANSES, qui s'en est immédiatement saisie, est une agence indépendante, qui n'est à la solde d'aucun industriel ; aussi faut-il introduire de la rationalité dans le raisonnement. L'ANSES a rendu un avis affirmant qu'il n'y avait pas de raison, en l'état des connaissances scientifiques, de retirer l'autorisation de mise sur le marché des SDHI. Parallèlement, compte tenu de l'alerte émise par les scientifiques, elle est intervenue au niveau de l'Union européenne pour recommander la vigilance et déterminer ce qui pourrait être fait. (Exclamations sur les bancs du groupe FI.) Monsieur le député, je réponds à votre question aussi sereinement que vous me l'avez posée ! C'est aux scientifiques, non aux politiques, de prendre ces décisions. (Protestations sur les bancs du groupe FI. – Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.) Sur cette question comme sur toutes les autres, la position du Gouvernement est de s'en remettre à l'avis des scientifiques qui connaissent le sujet.

M. Alexis Corbière. Mais ce sont des scientifiques qui ont lancé l'alerte !

M. Didier Guillaume, ministre. En même temps, puisque le chef de l'État et le Premier ministre souhaitent faire de la protection des Français une priorité, nous avons pris la décision de sortir du glyphosate avant 2021, et de la dépendance à tous les produits phytosanitaires dans les années qui viennent, le seuil de moins 50 % devant être atteint en 2025. Le Gouvernement ne reste pas inactif pour ce qui est de son ressort. Mais s'agissant de la recherche et de la science, en personnes rationnelles, nous nous en remettons à l'agence indépendante et compétente qu'est l'ANSES. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)