Question écrite n° 22196 :
Zones de non traitement : inquiétudes du secteur viticole

15e Législature

Question de : Mme Frédérique Lardet
Haute-Savoie (2e circonscription) - La République en Marche

Mme Frédérique Lardet attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les inquiétudes exprimées par le secteur viticole concernant l'obligation de création d'une zone de non traitement (ZNT) de cinq à dix mètres pour tous les produits phytosanitaires autour des espaces attenants aux habitations et bâtiments d'activité. Le Gouvernement a récemment présenté deux projets de décret et d'arrêté prévoyant notamment la mise en place de « zones non traitées » de cinq à dix mètres de large. Cependant, une ZNT de dix mètres entre les riverains et les parcelles de vigne pourrait amputer le potentiel de production de plusieurs milliers d'hectares dans toute la France et impacter directement l'équilibre économique des petites exploitations. D'autre part, ces projets de textes n'ont été précédés d'aucune concertation avec les viticulteurs et ne prévoient aucune mesure d'accompagnement, ce alors même que le plan de la filière présenté en décembre dernier s'engageait à viser, à terme, la sortie des produits phytosanitaires. Aussi, elle souhaiterait savoir si le Gouvernement entend associer la filière viticole à la mise en place des dispositions destinées à protéger les riverains des zones traitées par des produits phytopharmaceutiques et si des mesures d'accompagnement seront mises en place auprès des acteurs de la filière viticole.

Réponse publiée le 29 octobre 2019

L'article 83 de la loi du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous (dite loi EGALIM) subordonne, à partir du 1er janvier 2020, l'utilisation des produits phytopharmaceutiques à proximité des zones d'habitation à des mesures de protection des personnes habitant ces lieux. De plus, dans une décision du 26 juin 2019, le Conseil d'État a partiellement annulé l'arrêté du 4 mai 2017 qui encadre l'utilisation des produits phytopharmaceutiques, pour absence de dispositions relatives à la protection des riverains. Le Conseil d'État a enjoint le Gouvernement de prendre les mesures nécessaires dans un délai de six mois. Le dispositif envisagé s'appuie sur la concertation afin de s'assurer que les mesures applicables sont les plus adaptées au contexte local. Selon la loi, ces mesures doivent être formalisées dans des chartes d'engagements faisant l'objet de consultations lors de leur élaboration, avec les riverains ou leurs représentants notamment. Le 9 septembre dernier, le Gouvernement a soumis à la consultation publique, pour une durée de trois semaines, deux projets de textes réglementaires précisant les modalités d'application de la loi. Un décret encadre la procédure d'élaboration des chartes ainsi que leur contenu, tandis que l'arrêté établit des distances de sécurité à respecter entre les zones d'épandage et les zones d'habitation. Les distances sont différentes selon que la culture traitée est dite « haute » (viticulture et arboriculture notamment) ou « basse » (céréales et légumes par exemple). Elles ont été établies sur la base des recommandations de l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) dans son avis du 14 juin 2019. Selon ces projets, les distances de sécurité peuvent, lorsque les produits phytopharmaceutiques appliqués ne sont pas les plus préoccupants et lorsque le matériel de pulvérisation utilisé présente une efficacité reconnue pour diminuer la dérive, être réduites dans le cadre des chartes d'engagement, selon les modalités précisées par l'arrêté. Les chartes doivent donc permettre de formaliser les mesures que les utilisateurs s'engagent à prendre lorsqu'ils réalisent un traitement phytopharmaceutique à proximité des habitations, y compris la façon de prévenir à l'avance les riverains et les passants, et le cas échéant de réduire sous conditions les distances de sécurité dans le cadre d'un ensemble de bonnes pratiques. À proximité des habitations, sans limitation de distances, les agriculteurs pourront protéger leurs cultures en utilisant les produits les moins risqués qui sont les produits de biocontrôle et les produits constitués exclusivement de substances de base ou de substances à faible risque, ou en recourant à des alternatives non chimiques telles que le désherbage mécanique. À ce titre, la grande majorité des produits utilisables en agriculture biologique pourront être employés sans limitation de distance. Ce dispositif réglementaire fondé sur les chartes d'engagements et des distances de sécurité vient en complément de l'évaluation des risques conduite par l'Anses dans le cadre des autorisations de mise sur le marché. L'exposition des riverains et des passants est évaluée selon une méthodologie harmonisée développée par l'autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA). Elle prend en compte des distances de 3, 5 et 10 m en fonction de situations de traitement réelles. Lorsqu'un risque pour la santé humaine est identifié pour une distance supérieure à 10 m, le produit n'est pas autorisé. Les projets de textes ont également été notifiés à la Commission européenne, pour une durée minimale de trois mois. Une fois cette procédure terminée, les textes issus des consultations seront publiés pour une application à partir du 1er janvier 2020. Le Gouvernement est déterminé à renforcer la protection des populations ainsi que celle des exploitants agricoles, en veillant à la qualité du dialogue entre les utilisateurs de produits phytopharmaceutiques, les riverains et les élus locaux. Cet objectif fait partie des priorités du plan d'actions sur les produits phytopharmaceutiques et une agriculture moins dépendante aux pesticides, présenté en avril 2018, de même que la réduction de l'utilisation des substances les plus préoccupantes.

Données clés

Auteur : Mme Frédérique Lardet

Type de question : Question écrite

Rubrique : Agriculture

Ministère interrogé : Agriculture et alimentation

Ministère répondant : Agriculture et alimentation

Dates :
Question publiée le 6 août 2019
Réponse publiée le 29 octobre 2019

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