15ème législature

Question N° 224
de Mme Laurence Gayte (La République en Marche - Pyrénées-Orientales )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Économie et finances
Ministère attributaire > Économie et finances

Rubrique > tourisme et loisirs

Titre > responsabilité de plein droit des agences de voyage et des tour-opérateurs

Question publiée au JO le : 26/10/2017
Réponse publiée au JO le : 26/10/2017 page : 3762

Texte de la question

Texte de la réponse

RESPONSABILITÉ DE PLEIN DROIT DES AGENCES DE VOYAGE ET DES TOUR-OPÉRATEURS


M. le président. La parole est à Mme Laurence Gayte, pour le groupe La République en marche.

Mme Laurence Gayte. Ma question s'adresse à M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie et des finances. J'y associe notre collègue de la Sarthe.

Mme Bérengère Poletti. Laquelle ?

Mme Laurence Gayte. Les professionnels du voyage ont appris, le 28 septembre dernier, que le Gouvernement ne leur donnera pas raison au sujet du régime de responsabilité de plein droit. Cette décision entre en contradiction avec la directive européenne relative aux voyages à forfait, que la France doit transposer dans son droit national avant la fin de l'année.

M. Éric Straumann. Avec visite de l'Assemblée nationale ou sans ?

Mme Laurence Gayte. Ce faisant, notre pays commettra une infraction de surtransposition au regard du droit communautaire et surtout affaiblira ses propres agences de voyage, qui évoluent dans un marché déjà très concurrentiel.

Le régime de la responsabilité de plein droit repose sur une responsabilité sans faute. Il a été introduit par le législateur en 1992 lors de la transposition en droit national de la première directive relative aux forfaits touristiques, alors même que l'Europe ne l'imposait pas. Il attribue aux agences de voyages et aux tour-opérateurs la responsabilité juridique et pécuniaire de la mauvaise exécution des contrats de voyage, même si le vacancier agit au mépris des règles les plus élémentaires de prudence.

M. Fabien Di Filippo. Cela vaut aussi pour les voyages à Las Vegas !

Mme Laurence Gayte. En adoptant ce régime, la France contrevient à la directive retenant la classique responsabilité pour faute, qui est d'harmonisation maximale. Ce choix ouvre la voie à un contentieux avec la justice européenne dont notre pays pourrait se passer.

En outre, sur le plan économique, le choix de la France fragilisera nos entreprises face à leurs concurrents européens, dans le cadre d'un marché où le commerce en ligne est très développé. Cette distorsion de concurrence a déjà pour conséquence le surcoût des assurances et la raréfaction des compagnies acceptant d'assurer les acteurs français du voyage.

C'est pourquoi je vous demande, monsieur le ministre, s'il est possible de revenir sur l'arbitrage rendu afin de renforcer la compétitivité des professionnels français du voyage. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe REM.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie et des finances.

M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie et des finances. Madame la députée, nous avons fait le choix de la protection du consommateur et nous pensons qu'il s'agit d'un choix juste et équitable.

Vous partez en voyage en passant par une agence de voyage.

Plusieurs députés du groupe LR . Pour visiter l'Assemblée nationale ! (Protestations sur plusieurs bancs du groupe REM.)

M. Bruno Le Maire, ministre . On vous a promis une magnifique chambre de 50 mètres carrés avec vue sur mer. En arrivant, vous vous retrouvez dans un cagibi avec vue sur le parking. La responsabilité du voyagiste est alors engagée de plein droit. Nous pensons que cela n'est que justice. Il incombe au voyagiste de prouver qu'il a fourni la bonne prestation et non au client ou au voyageur de prouver que la prestation est entachée par une malfaçon ou un dol.

Nous ne risquons aucune contradiction avec le droit européen. Je serai très clair avec vous : la directive que vous évoquez n'aborde pas le régime de responsabilité de plein droit ou pour faute des voyagistes. Nous ne risquons aucune distorsion de concurrence non plus : si vous faites appel à un voyagiste installé dans un autre pays européen, le droit français s'applique et la responsabilité du prestataire de service est engagée de plein droit, non celle du client ou du voyageur.

N'ayez donc aucune inquiétude, madame Gayte. La responsabilité est bien déterminée selon les critères du droit français, qui protège le consommateur sans entrer en contradiction avec le droit européen.

J'ajoute que M. le Premier ministre et moi-même estimons que l'industrie du tourisme est absolument stratégique pour l'économie française. Elle représente près de 2 millions d'emplois directs ou indirects. Croyez-moi, il existe mille autres façons de développer le tourisme en France, auxquelles Jean-Yves Le Drian et moi-même travaillons avec M. le Premier ministre, qui sont préférables à la remise en cause du droit du consommateur. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes REM et MODEM.)