Question écrite n° 22697 :
Fiscalité et conditions d'emploi dans le secteur du bâtiment

15e Législature

Question de : M. Jean-Carles Grelier
Sarthe (5e circonscription) - Les Républicains

M. Jean-Carles Grelier attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur les mesures annoncées concernant la fiscalité et les conditions d'emploi dans le secteur du bâtiment. En effet, ce dernier est menacé par une double hausse des charges avec d'une part la fin envisagée de la fiscalité réduite appliquée au gazole non routier (GNR) et d'autre part, la fin de la déduction forfaitaire spécifique (DFS). Ce dispositif d'abattement de l'assiette des cotisations sociales est pourtant essentiel car il permet de tenir compte des frais élevés contractés par la profession, du fait notamment de nombreuses contraintes de mobilité. Ces dernières sont d'autant plus importantes qu'elles marquent un déséquilibre entre les zones urbaines et rurales, pour lesquelles l'activité est nécessairement plus nomade. Le coût de cette seule mesure (DFS) est estimé par les professionnels du secteur à un milliard d'euros environ. En effet, la fin de la DFS (dont le coût est estimé à 474 millions d'euros) entraine avec elle la diminution de l'allégement « Fillon » (425 millions d'euros) qui réduit une partie des charges patronales pour les salariés inférieurs à 1,6 Smic. L'ensemble conduit à une baisse du pouvoir d'achat des ouvriers du bâtiment estimé à 123 million d'euros d'une part, et à un fort alourdissement des charges patronales menaçant le dynamisme du secteur d'autre part. L'impact de ces mesures annoncées s'étend donc au-delà du secteur du bâtiment, créateur d'emplois mais toutefois fragilisé par une conjoncture défavorable, reconnue par l'Insee ou encore la Banque de France. Il lui demande de bien vouloir reconsidérer ces réformes et de bien vouloir lui faire part de ses intentions concernant les droits sociaux et la fiscalité des employeurs et ouvriers du bâtiment.

Réponse publiée le 3 novembre 2020

L'article 9 de l'arrêté du 20 décembre 2002 relatif aux frais professionnels déductibles pour le calcul des cotisations de sécurité sociale prévoit que la déduction forfaitaire spécifique (DFS) soit réservée à certaines professions qui comportent des frais dont le montant est notoirement supérieur à celui résultant du dispositif relatif aux frais professionnels. La déduction forfaitaire spécifique correspond à un abattement d'assiette des cotisations sociales représentatif des frais professionnels dont bénéficient plusieurs secteurs d'activité, notamment la construction, le transport, l'aviation, le commerce, la presse et la culture. Originellement représentatif des frais professionnels engagés par les salariés, ce dispositif est désormais sans lien avec ces derniers et pose un problème de mise en œuvre en cas de cumul avec d'autres remboursements de frais. Il est par ailleurs fréquemment critiqué car, en réduisant l'assiette de cotisations, il obère les droits des salariés, notamment en matière de droits à retraite. Certains employeurs, comme ceux du transport routier de voyageurs, l'ont ainsi progressivement abandonné. La Cour de cassation, à travers plusieurs jurisprudences (Cour de cassation, 14 février 2013 n° 11-27032 ; Cour de cassation, 19 janvier 2017, n° 16-10782), est venue préciser que pour bénéficier de la DFS le salarié doit remplir deux conditions cumulatives : faire partie de la liste des professions prévues à l'article 5 de l'annexe IV du code général des impôts dans sa rédaction en vigueur au 31 décembre 2000 et exposer des frais professionnels lors de son activité professionnelle. L'appartenance à l'une des professions visées à l'article 5 de l'annexe IV du code général des impôts ne peut donc suffire en soit à permettre le bénéfice de la déduction forfaitaire spécifique. Il doit de surcroît être établi que le salarié concerné est effectivement amené à exposer des frais supplémentaires de nourriture, de logement ou encore d'hébergement du fait de son activité, sans quoi l'abattement pour frais professionnels ne peut valablement être appliqué. A cet égard, il appartient à l'employeur de démontrer que le salarié a réellement engagé des frais professionnels. Ces deux conditions remplies, le bénéfice de la déduction forfaitaire spécifique de 10 % dans le secteur du bâtiment et des travaux publics est admis. Enfin, afin de limiter l'effet d'aubaine lié à l'interaction entre renforcement des allègements généraux et DFS, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 a prévu que la rémunération prise en compte pour la détermination du coefficient d'allègement général se rapproche d'une assiette de cotisations qui ne tient pas compte de l'application d'une déduction forfaitaire spécifique. Il est désormais prévu qu'à compter du 1er janvier 2020, les allègements généraux dont bénéficient les employeurs éligibles à la DFS seront plafonnés à 130 % des allègements auxquels a droit un employeur de droit commun pour un salarié à même niveau de salaire. Ce plafonnement, qui sera instauré par voie réglementaire, maintient un gain très significatif en faveur des employeurs éligibles à la DFS et se traduira par un effort d'environ 0,4 Md€ en année pleine des employeurs concernés, sans impact sur la rémunération nette des salariés.

Données clés

Auteur : M. Jean-Carles Grelier

Type de question : Question écrite

Rubrique : Impôts et taxes

Ministère interrogé : Économie et finances

Ministère répondant : Comptes publics

Dates :
Question publiée le 10 septembre 2019
Réponse publiée le 3 novembre 2020

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