15ème législature

Question N° 227
de M. Philippe Dunoyer (UDI, Agir et Indépendants - Nouvelle-Calédonie )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Intérieur
Ministère attributaire > Intérieur

Rubrique > outre-mer

Titre > Retour des policiers originaires de Nouvelle-Calédonie

Question publiée au JO le : 20/03/2018
Réponse publiée au JO le : 28/03/2018 page : 2132

Texte de la question

M. Philippe Dunoyer attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur le caractère extrêmement préoccupant de l'augmentation de la délinquance - de près de 30 % entre 2016 et 2017 - en Nouvelle-Calédonie. Les cambriolages de locaux d'activités commerciales ou associatives sont en hausse de 37,5 %. Les vols de véhicules sont deux fois plus fréquents qu'en métropole. Les atteintes à l'intégrité physique et les violences physiques non crapuleuses progressent de 10 %. Les coups et blessures volontaires commis au sein de la sphère familiale explosent pour atteindre le record de 3,9 victimes pour 1 000 habitants, contre 1,5 pour 1 000 habitants dans l'Hexagone. En la matière comme dans la quasi-totalité des délits constatés, la consommation excessive d'alcool est un problème crucial. Avec 6 652 ivresses publiques manifestes en 2017, soit une hausse de près de 35 % par rapport à 2016, la ville de Nouméa représente 20 % des ivresses publiques manifestes recensées dans tout le territoire national. Enfin, la violence a tendance à se banaliser en particulier chez les jeunes puisque le nombre de mineurs mis en cause continue d'augmenter (+ 2,5 %) : en Nouvelle-Calédonie aujourd'hui, la part de jeunes mineurs impliqués dans la totalité de la délinquance générale représente 25 %. Ces chiffres alarmants, issus du bilan statistique de l'insécurité et de la délinquance 2017, publié par le ministère de l'intérieur en janvier 2018, sont sans appel. Pourtant, ils reflètent une réalité incomplète de la vie quotidienne sur l'île où, presque quotidiennement, les Calédoniens découvrent qu'une nouvelle école a été saccagée, un commerce vandalisé, une station-service pillée, un local incendié. Les Calédoniens sont aujourd'hui excédés. Une vague d'exaspération générale et une flambée de colère grondent au sein de la population menaçant, chaque jour un peu plus, le vivre ensemble dans le pays. De nouveaux renforts d'effectifs de sécurité sont attendus. Ils sont nécessaires et même urgents. Il partage l'objectif affiché par le ministre de l'intérieur de créer une police sur mesure, qui connaisse parfaitement son territoire et les attentes des citoyens. Il rappelle à ce titre que sur une quarantaine de policiers originaires de Nouvelle-Calédonie, affectés en métropole et qui souhaitent rentrer en Nouvelle-Calédonie, une quinzaine remplit parfaitement les conditions de retour. Dans le contexte de recrudescence préoccupante de la délinquance générale, le retour rapide de ces policiers aguerris, connaissant parfaitement les spécificités humaines et sociales du contexte local calédonien dont ils sont eux-mêmes originaires, contribuerait à renforcer efficacement les effectifs en place. Dans la perspective de renforts de sécurité annoncés le 8 mars 2018 par le Haut-commissaire de la République, il lui demande s'il entend accorder la priorité aux policiers calédoniens qui demandent à revenir servir l'État sur leur île.

Texte de la réponse

RETOUR DES POLICIERS CALÉDONIENS SUR LE TERRITOIRE DE LA NOUVELLE-CALÉDONIE


M. le président. La parole est à M. Philippe Dunoyer, pour exposer sa question, n°  227, relative au retour des policiers calédoniens sur le territoire de la Nouvelle-Calédonie.

M. Philippe Dunoyer. Comme vous le savez, en Nouvelle-Calédonie, la situation en matière de sécurité est extrêmement préoccupante. La délinquance a augmenté de 30 % en un an, les cambriolages de plus de 37 %, les violences physiques de 10 %, avec une augmentation sans précédent des violences intrafamiliales – dans ce domaine, la Nouvelle-Calédonie occupe la première ou la deuxième place sur le triste podium national. La violence tend à se banaliser, en particulier chez les jeunes : 25 % des personnes impliquées dans la délinquance générale sont mineures.

Devant ces chiffres alarmants et la vague d'exaspération des habitants qui les accompagne, de nouveaux renforts d'effectifs de sécurité sont attendus. Ils sont nécessaires, et il est urgent de les envoyer. Le sujet est évoqué en ce moment même à Matignon où se tient le XVIIe comité des signataires. Bien entendu, je partage l'objectif affiché par le ministre de l'intérieur de créer une police sur-mesure, qui connaisse parfaitement son territoire et les attentes des citoyens. Je n'oublie pas non plus que le choix de retenir quelques quartiers de Nouméa dans la première liste des « territoires de reconquête républicaine » induit l'arrivée, d'ici à la fin 2018, d'une vingtaine de policiers environ en renfort.

Cependant je tiens à rappeler que, sur une quarantaine de policiers originaires de Nouvelle-Calédonie, affectés aujourd'hui en métropole et qui souhaitent rentrer en Nouvelle-Calédonie, une quinzaine remplit parfaitement les conditions de retour. Dans le contexte de recrudescence préoccupante de la délinquance générale, le retour rapide de ces policiers aguerris, connaissant parfaitement les spécificités humaines et sociales du contexte local calédonien dont ils sont eux-mêmes issus, contribuerait à renforcer efficacement les effectifs en place. Dans la perspective de renforts de sécurité annoncés le 8 mars dernier par le haut-commissaire de la République, le Gouvernement entend-il accorder la priorité aux policiers calédoniens qui demandent à revenir servir l'État sur leur île ?

M. Maurice Leroy. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement.

M. Christophe Castaner, secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement. Monsieur Dunoyer, vous avez à juste titre évoqué le comité des signataires, qui se réunit aujourd'hui pour se pencher sur divers sujets ; celui de la sécurité en Nouvelle-Calédonie exige la mobilisation constante du Gouvernement. Vous savez également que le Livre bleu sur l'outre-mer, qui sera remis en mai au Président de la République, marquera une étape importante dans les relations entre l'État et les outre-mer et témoignera de l'attention que nous portons à ce sujet.

Vous avez évoqué des chiffres que personne ne conteste ici et qui montrent que la Nouvelle-Calédonie est confrontée à d'importants défis sécuritaires. Même si des engagements ont été pris en matière d'effectifs et commencent à produire leurs effets, reste la question de la qualité et de l'expérience des femmes et des hommes mobilisés dans ce territoire.

Les renforts annoncés, notamment dans le cadre du plan sécurité outre-mer de juin 2016, lancé par le gouvernement précédent, se sont concrétisés. Nous poursuivons l'effort : à la fin de l'année 2015, 539 agents étaient mobilisés en Nouvelle-Calédonie ; ils sont aujourd'hui 563 et, comme attendu – par vous, monsieur le député, mais aussi par la population –, d'ici à la fin du mois d'août 2018, ils seront 573 ; d'ici à la fin de l'année, le chiffre augmentera encore. Il est important que l'enjeu de la sécurité en Nouvelle-Calédonie soit traité comme partout ailleurs, mais il faut aussi tenir compte des spécificités de ce territoire. Comme vous l'avez rappelé, dès la première vague de septembre 2018, il y aura un quartier de reconquête républicaine à Nouméa, dans les quartiers Pierre-Lenquette, Montravel et Tindu. Il est essentiel de réhabiliter la place de nos forces de sécurité et de rétablir la présence républicaine. Les quartiers de reconquête républicaine constituent une déclinaison renforcée de la police de sécurité du quotidien dans certains territoires particulièrement confrontés à l'insécurité et aux trafics.

J'en viens plus directement à votre question, qui concerne les fonctionnaires originaires de Nouvelle-Calédonie. Il est important de prendre en compte à la fois le choix personnel des agents qui veulent retourner dans les terres qui les ont vus naître, mais aussi l'efficacité que la connaissance d'un territoire et de ses cultures – dont nous connaissons l'importance en Nouvelle-Calédonie – permet de rehausser.

Je rappelle tout d'abord que le ministère de l'intérieur est naturellement soucieux de favoriser, dans toute la mesure du possible et dans le respect des règles, le retour des agents dont le centre des intérêts matériels et moraux se trouve outre-mer. Pour les affectations en Nouvelle-Calédonie, les postes sont ouverts au mouvement polyvalent de mutation selon les mêmes conditions que pour les autres départements de métropole et départements et collectivités d'outre-mer, mais le choix des agents retenus se fait évidemment en priorité en faveur des personnes originaires de Nouvelle-Calédonie, à la condition bien entendu qu'elles remplissent les conditions statutaires nécessaires pour obtenir une mutation. Par ailleurs, il faut noter que le mouvement de mutation dit « profilé », c'est-à-dire pour des profils spécialisés – renseignements territoriaux, officiers de police judiciaire –, se heurte aujourd'hui à la faiblesse du vivier, qui nous conduit parfois à affecter des agents non originaires de Nouvelle-Calédonie, même si, là aussi, la priorité est accordée si possible aux Néo-Calédoniens.

M. le président. La parole est à M. Philippe Dunoyer.

M. Philippe Dunoyer. Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie pour votre réponse et pour les perspectives très encourageantes qu'elle laisse entrevoir. Vos propos confirment le nombre des agents, y compris originaires de la Nouvelle-Calédonie, venus renforcer les effectifs du commissariat de police de Nouméa. Je n'ignore pas les difficultés statutaires et professionnelles, ni la nécessité de réunir les conditions préalables à ces retours, mais je retiens que lorsque ces conditions sont remplies, dès lors qu'un mouvement sera prévu et que les commissions administratives paritaires pourront se réunir, la priorité ira à ceux qui voudront revenir sur leur île. Je vous remercie pour cet engagement.