Attaque de la mosquée de bayonne
Question de :
M. Jean-Luc Mélenchon
Bouches-du-Rhône (4e circonscription) - La France insoumise
Question posée en séance, et publiée le 30 octobre 2019
ATTAQUE DE LA MOSQUÉE DE BAYONNE
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Mélenchon.
M. Jean-Luc Mélenchon. L'attentat contre la mosquée de Bayonne est un terrible signal pour la France. Disons d'abord que nos pensées et nos vœux se tournent vers les malheureuses victimes et leur famille. Disons ensuite que ces pensées vont aussi à tous les musulmans en France à qui nous devons renouveler solennellement la promesse républicaine de la totale liberté de culte. (Applaudissements sur les bancs de tous les groupes.)
Disons enfin que la France ne veut ni du racisme ni de l'intolérance.
M. Éric Diard. Ni de la radicalisation !
M. Jean-Luc Mélenchon. Notre longue histoire, des siècles de violences ouvertes ou larvées contre l'athéisme, contre les juifs ou entre catholiques et protestants nous en ont enseigné l'inhumanité et l'absurdité. La France sait que la liberté de conscience est la mère de toutes les libertés. Alors l'attentat de Bayonne est une alerte fondatrice. Il est le résultat évident d'une écœurante et odieuse séquence de stigmatisation des musulmans. La parole raciste contre les musulmans s'est déchaînée et a été délibérément banalisée. C'est une odieuse diversion face aux problèmes centraux du pays. Nous redoutons que cet attentat résulte d'une action banalisée de longue date venant de certains milieux d'extrême droite et nous redoutons qu'ils soient prêts à pire encore.
Devant cet attentat comme devant tous les autres, la France doit réagir concrètement et moralement – spirituellement, oserai-je dire. La parole officielle doit être débarrassée de toute forme de stigmatisation des musulmans. Il ne faut plus permettre que la propagande pour la haine des musulmans soit diffusée par des organes audiovisuels à qui l'État a donné un canal d'émission.
M. le président. Merci, monsieur le président Mélenchon.
M. Jean-Luc Mélenchon. Les groupuscules d'extrême droite repérés par la commission d'enquête de l'Assemblée doivent être interdits. Êtes-vous prêt à me suivre sur ce terrain, monsieur le Premier ministre ? (Applaudissements sur les bancs des groupes FI, GDR et SOC et sur plusieurs bancs du groupe LR. – M. Erwan Balanant applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Édouard Philippe, Premier ministre. Monsieur le président Mélenchon, comme vous, je tiens à dire mon émotion et mes vœux de prompt rétablissement à l'attention de ceux qui, hier, ont été blessés dans l'attaque de la mosquée de Bayonne. Je tiens à dire un mot de soutien et même, plus qu'un mot, je tiens à adresser une vraie pensée amicale et républicaine à deux familles affectées et angoissées par l'état de santé de leurs membres.
Vous avez raison, monsieur le président Mélenchon, nous devons faire très attention à ce que nous tous, ici, responsables politiques élus ou non, nous disons. Singulièrement lorsque nous parlons de religion, de toutes les religions – je viendrai dans un instant à la religion ici concernée. Vous connaissez l'histoire de France, monsieur le président Mélenchon, il nous arrive parfois d'en discuter ensemble, et nous savons que les relations entre l'État et les religions n'ont jamais été simples et que lorsque l'État se mêle de religion, se mêle de dire comment il faut croire ou ne pas croire, cela devient compliqué.
Je n'ai pour ma part jamais cru que la religion était « l'opium du peuple » et je respecte le sacré. Et, parce que je suis un républicain, comme nous tous ici, je sais que la République a fait le choix, il y a maintenant longtemps, de reconnaître à chacun de nos concitoyens la liberté de croire ou de ne pas croire et la liberté d'exercer son culte dans le respect de la loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes FI, LaREM, MODEM, SOC, GDR et sur quelques bancs du groupe LR.)
Je vois bien que le débat politique est plein de passions, parfois plein d'invectives, parfois plein d'amalgames. D'un côté comme de l'autre, quelles que soient les positions défendues, on s'accuse de ne pas comprendre la menace contre la République, on accuse tel ou tel parti. Je tiens à affirmer, monsieur le président Mélenchon, qu'il me paraît que, dans une démocratie mûre comme la nôtre, dans une République sûre de ses principes, nous pourrions tous ensemble considérer qu'il n'y a qu'une seule communauté : la communauté nationale. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, FI, GDR, SOC, MODEM, UDI-Agir, sur de très nombreux bancs des groupes LT et LR, ainsi que parmi les députés non inscrits.) Et à chaque fois que l'on pointe telle ou telle confession ou telle ou telle partie du peuple, on appauvrit ce qu'est la République, c'est-à-dire une union, une nation, un « plébiscite de tous les jours » de gens qui ne sont pas semblables,…
Mme Fiona Lazaar. Exactement !
M. Édouard Philippe, Premier ministre . …qui ne croient pas la même chose, qui ne se ressemblent pas tous, mais qui sont unis dans les valeurs de la République et dans le respect de la loi. (Mêmes mouvements.)
Chacun doit donc, mesdames et messieurs les députés, monsieur le président Mélenchon, être responsable de ses propos, ne jamais être naïf car dire que notre pays subit parfois des attaques au nom du dévoiement d'une religion n'est pas faire offense à nos concitoyens de telle ou telle confession, c'est un fait et c'est d'ailleurs un fait qui n'est pas propre à notre République, qui n'est pas propre à la France. C'est un des combats du XXIe siècle, nous le savons et nous pouvons l'assumer sans jamais oublier ce qui constitue le socle républicain : la liberté de croire ou de ne pas croire, le respect absolu de la loi, de la loi que vous votez et que le Gouvernement fait respecter. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, MODEM, UDI-Agir, ainsi que sur plusieurs bancs des groupes LR, SOC et GDR.)
Auteur : M. Jean-Luc Mélenchon
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Ordre public
Ministère interrogé : Premier ministre
Ministère répondant : Premier ministre
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 30 octobre 2019