15ème législature

Question N° 232
de M. Sébastien Jumel (Gauche démocrate et républicaine - Seine-Maritime )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Économie et finances
Ministère attributaire > Transition écologique et solidaire

Rubrique > énergie et carburants

Titre > Éolien offshore

Question publiée au JO le : 27/03/2018
Réponse publiée au JO le : 04/04/2018 page : 2316
Date de changement d'attribution: 03/04/2018

Texte de la question

M. Sébastien Jumel alerte M. le ministre de l'économie et des finances sur l'éolien offshore.

Texte de la réponse

ÉOLIEN OFFSHORE


M. le président. La parole est à M. Sébastien Jumel, pour exposer sa question, n°  232, relative à l'éolien offshore.

M. Sébastien Jumel. Monsieur le secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, Nicolas Hulot a déclaré il y a quelques mois : « Sur l'éolien en mer, on s'y est mal pris. »

S'agissant du projet offshore Le Tréport-Dieppe, on s'y est en effet mal pris avec le monde de la pêche, en imposant en 2013, pour l'implantation du parc éolien, la zone la plus riche en ressource halieutique de toute la Manche Est, une zone qui avait été rejetée lors du précédent appel d'offres. On s'y est aussi mal pris vis-à-vis du parc marin, qui s'est vu retirer sa compétence d'avis conforme au cours de l'année 2017 ; résultat : le parc a explosé en vol.

Mais le feuilleton ne s'arrête pas là. Voilà que le Gouvernement, par un cavalier législatif au Sénat, essaie de tordre le bras aux consortiums attributaires des marchés des six projets offshore en cours pour faire baisser le prix de sortie de l'électricité – comme si Bercy venait de découvrir que ce prix était élevé et que la technologie avait évolué depuis 2013 !

On a tous compris qu'il s'agissait là d'un coup de Trafalgar dans la négociation du prix de l'électricité. Deux issues sont possibles, désormais : ça passe ou ça casse. Dont acte.

Cela prouve, premièrement, que l'État, quand il le veut, n'est pas si désarmé que cela pour agir. Ce que nous demandons depuis plusieurs mois pour le projet éolien offshore Le Tréport-Dieppe était donc possible : on aurait pu profiter du vote du texte simplifiant les procédures de développement des énergies marines pour relancer un projet équivalent à l'actuel projet du Tréport dans une zone située plus à l'ouest, moins pénalisante pour la pêche.

Cela signifie, deuxièmement, que les déclarations faites par le Gouvernement à l'automne dernier, au Havre, sur la nécessité de développer les énergies marines en ayant une vision d'ensemble et en réglant au préalable les conflits d'usage attendent toujours une traduction concrète.

Le troisième enseignement de ce qui vient de se passer au Sénat est le suivant : la définition de l'intérêt général par le Gouvernement se limite pour l'instant à la maîtrise du prix de sortie de l'électricité.

Nous, nous craignons la double peine, c'est-à-dire, dans le cas du Tréport, un projet qui va faire très mal à notre pêche artisanale déjà menacée par le Brexit et par les effets collatéraux de la pêche électrique en mer du Nord, et, par ailleurs, des projets renégociés qui offrent aux consortiums la possibilité de faire de la question industrielle et des fameuses usines de Cherbourg et du Havre la variable d'ajustement des négociations avec le Gouvernement.

Mes questions sont donc simples. Dans la négociation avec les attributaires des parcs éoliens, la promesse d'une filière industrielle et le nombre d'emplois sont-ils à vos yeux négociables ? Les mesures compensatoires promises aux territoires – notamment en matière de formation et de pêche – sont-elles également négociables ? En résumé, les emplois industriels et l'avenir de la pêche entrent-ils pour vous dans le champ de l'intérêt général quand vous renégociez, et quelles garanties pouvez-vous – en Normand, monsieur le secrétaire d'État, donc en voisin – obtenir pour ce parc et pour le territoire que vous connaissez bien ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.

M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire. Monsieur le député, je vais vous répondre non seulement en Normand, mais aussi en tant que membre du Gouvernement, s'agissant d'un dossier important pour nous tous, car nous avons besoin des énergies marines renouvelables pour réussir notre transition énergétique et notre nouveau mix électrique. Nous avons besoin de toutes les énergies renouvelables, mais particulièrement des éoliennes en mer. Or, aujourd'hui, vous le savez, leur nombre, en France, est modeste : il en existe une, expérimentale, sur flotteur, au large de Saint-Nazaire. Il s'agit donc, pour le Gouvernement, de libérer rapidement ces énergies.

Dans le cadre du projet de loi pour un État au service d'une société de confiance, nous vous avons proposé diverses mesures importantes à cette fin, notamment concernant l'installation. Si aucune éolienne ou presque n'est aujourd'hui installée en mer, c'est en raison de nombreux recours et de redoutables complications techniques, réglementaires ou contentieuses. Voilà pourquoi nous avons institué le « permis enveloppe », qui permet de faire appel à la technologie la plus récente même si le droit a été ouvert à une date assez ancienne. La logique est la même pour le raccordement aux postes terrestres pris en charge par Réseau de transport d'électricité – RTE.

Voilà pour les mesures de libération. Il se trouve qu'aujourd'hui le coût des énergies marines renouvelables diminue. Nous devrions tous nous en réjouir. Ainsi, en mer du Nord, un premier parc va voir le jour – l'appel d'offres vient de prendre fin – sans qu'un centime de subvention publique ait été versé. Cela signifie – pardonnez-moi, monsieur le député, de parler de marché – que l'offre rencontre la demande en ce domaine. C'est bien évidemment une bonne nouvelle pour vous comme pour nous.

L'enjeu de l'amendement déposé au Sénat a peut-être été mal compris ; je profite de votre question pour le réexpliquer. Il s'agit évidemment de permettre une négociation avec les porteurs de projet pour les six parcs choisis dans le cadre des appels d'offres lancés entre 2011 et 2013, afin que le coût des parcs – 2 milliards d'euros par an pendant vingt ans, soit 40 milliards d'euros – tende à se rapprocher des coûts du marché actuel, et ce en lien avec les technologies actuelles, conformément à ce que rend possible le permis enveloppe.

L'objectif n'est pas de réaliser des économies sur ces 2 milliards d'euros – je vous rassure immédiatement sur ce point –, mais de voir comment, avec cette somme, placée sur un compte d'affectation spéciale, installer davantage d'éoliennes que celles des six parcs déjà connus. C'est l'objet d'une négociation que nous tenons à mener avec les différents porteurs de projet au cours des semaines qui viendront ; en tout cas, des décisions seront prises rapidement.

Je vous le dis en vous regardant droit dans les yeux : nous sommes attachés à la filière industrielle dans ce domaine, en Normandie comme ailleurs. Le véritable enjeu pour nous est bien évidemment de rejoindre le marché ; trop de temps a été perdu. Il est vrai que l'amendement déposé au Sénat a pu créer quelque trouble, dont certains ont d'ailleurs dû faire leur miel ; mais j'espère vous rassurer sur ce point.

M. le président. La parole est à M. Sébastien Jumel.

M. Sébastien Jumel. Je veillerai à ce que les promesses de contreparties pour le territoire, en particulier d'irrigation industrielle, soient tenues, notamment au Havre et à Cherbourg, ainsi que les promesses faites aux pêcheurs, puisque le consortium s'est engagé.