Question au Gouvernement n° 2334 :
Annulation de la conférence de Mme Sylviane Agacinski

15e Législature

Question de : M. Charles de la Verpillière
Ain (2e circonscription) - Les Républicains

Question posée en séance, et publiée le 30 octobre 2019


ANNULATION DE LA CONFÉRENCE DE MME SYLVIANE AGACINSKI

M. le président. La parole est à M. Charles de la Verpillière.

M. Charles de la Verpillière. Monsieur le Premier ministre, la presse nous a appris que la philosophe Sylviane Agacinski a été empêchée de prononcer une conférence à l'université de Bordeaux. Plusieurs associations avaient en effet menacé de s'y opposer par la force au prétexte que Mme Agacinski a pris position contre la gestation pour autrui. Par crainte des violences, l'université a annulé la conférence.

M. Claude Goasguen. Incroyable !

M. Charles de la Verpillière. Cet épisode est proprement scandaleux ! Mais le scandale est aussi dans le silence assourdissant du Gouvernement. Ni la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, ni le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, d'habitude si prolixe, n'ont dénoncé cette atteinte insupportable à la liberté de pensée, à la liberté d'expression et aux libertés universitaires. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR, sur plusieurs bancs des groupes UDI-Agir et FI, et parmi les députés non inscrits.)

Monsieur le Premier ministre, il vous revient aujourd'hui de nous dire la position de votre gouvernement dans cette affaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur plusieurs bancs du groupe UDI-Agir.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation.

M. Fabien Di Filippo. La police de la pensée !

Mme Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation. Vous me donnez l'occasion de réaffirmer que les universités sont en effet des lieux de débat, des lieux où les idées se confrontent et où parfois s'exprime la controverse, des lieux où toujours la liberté d'expression doit prévaloir.

Permettez-moi de revenir sur l'événement que vous rapportez. Dans le cadre d'un cycle de conférences, la présidente de l'université de Bordeaux a reçu des menaces à l'ordre public, auxquelles elle a décidé de répondre en annulant la conférence de Mme Agacinski. Elle n'est pas restée sans réaction – j'ai eu l'occasion d'en discuter longuement avec elle – puisque, pour lutter contre la violence de groupuscules qui, depuis quelques mois, ont choisi les universités pour exprimer leur intolérance, elle a décidé d'organiser un grand forum sur le rôle des universités dans le débat public (Vives exclamations sur les bancs du groupe LR, sur quelques bancs du groupe UDI-Agir et parmi les députés non inscrits) et d'inviter Mme Agacinski à y tenir sa conférence.

Sachez que la présidente de l'université de Bordeaux a tout le soutien du ministère de l'enseignement supérieur. Il était important qu'elle agisse pour maintenir l'ordre public, comme il l'est aujourd'hui qu'elle organise ce débat et invite Mme Agacinski, cette grande philosophe, à venir exprimer ses idées dans le cadre de l'université, sans violence et, contrairement à ce que vous dites, sans censure. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe MODEM.)

Un député du groupe LR . Personne n'applaudit !

M. le président. La parole est à M. Charles de la Verpillière.

M. Charles de la Verpillière. Madame la ministre, mieux vaut tard que jamais. Vous vous exprimez enfin sur ce sujet, mais je crois que vous n'avez pas compris la gravité de l'événement.

Ce qui est en cause, c'est la liberté de pensée et la liberté d'expression dans notre pays, garanties par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR, sur plusieurs bancs des groupe UDI-Agir et FI, et parmi les députés non inscrits. – MM. Charles de Courson et Alain David applaudissent également.)

On est pour ou on est contre. Il n'y a pas de place pour le « en même temps » sur cette question. La France attend que le Gouvernement condamne sans réserve l'atteinte portée à nos libertés et, surtout, prenne des mesures concrètes pour lutter contre la censure et la police de la pensée. (Mêmes mouvements.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Frédérique Vidal, ministre. Monsieur le député, je suis particulièrement attachée à la liberté d'expression, vous vous en doutez,…

Plusieurs députés du groupe LR . Non !

Mme Frédérique Vidal, ministre . …mais pour qu'elle puisse s'exprimer, il faut, avant toute chose, que les universités cessent d'être considérées comme des lieux où les idées s'expriment par la violence. (Vives exclamations sur les bancs du groupe LR.)

Plusieurs députés du groupe LR . Donc ?

Mme Frédérique Vidal, ministre . Lorsqu'un président d'université reçoit des menaces, il doit agir en conséquence pour préserver l'ordre public. La présidente de l'université de Bordeaux appliquera les sanctions qui s'imposent à l'encontre de ceux qui ont empêché la tenue de la conférence et veillera à ce qu'elle puisse avoir lieu dans de bonnes conditions. (Mêmes mouvements.)

Données clés

Auteur : M. Charles de la Verpillière

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Enseignement supérieur

Ministère interrogé : Enseignement supérieur, recherche et innovation

Ministère répondant : Enseignement supérieur, recherche et innovation

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 30 octobre 2019

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