Question au Gouvernement n° 2366 :
réforme des retraites

15e Législature

Question de : Mme Marine Le Pen (Hauts-de-France - Non inscrit), posée en séance, et publiée le 6 novembre 2019


RÉFORME DES RETRAITES

M. le président. La parole est à Mme Marine Le Pen.

Mme Marine Le Pen. Monsieur le Premier ministre, dans l'acte I de son quinquennat, Emmanuel Macron a été le président des riches. Force est de constater que, pour l'acte II, il s'apprête à être l'ennemi de tous les autres. Un an après le soulèvement des gilets jaunes, jaillissement d'une exaspération populaire sortie des profondeurs du pays, n'avez-vous toujours pas compris ?

Alors même que le pays se fracture sur les questions identitaires, que la fracture territoriale se creuse chaque jour davantage, que le pays a plus que jamais besoin d'unité et de justice, Emmanuel Macron s'engage dans une fracturation sociale dont il ne mesure manifestement pas les tragiques conséquences humaines.

J'emploie le terme de « fracturation » et non celui de « fracture », car il ne s'agit pas seulement d'un état de fait ou d'un constat sur les injustices sociales existantes, il s'agit d'une politique délibérée, mûrement réfléchie, consistant à s'attaquer aux plus vulnérables. Vous croyez qu'en les offrant en sacrifice aux dieux des marchands, vous apporterez une satisfaction supplémentaire à ceux dont votre politique de classe défend, avec une persévérance suicidaire, les intérêts !

Mme Olivia Gregoire. N'importe quoi !

Mme Marine Le Pen. Vous désignez les plus modestes comme responsables de l'embourbement économique, eux qui sont déjà les premières victimes de l'insécurité endémique. Sachez qu'ils ne sont que les victimes d'un modèle de dérégulation généralisée, que vous organisez vous-même. En vous attaquant aux retraites et à l'indemnisation du chômage, vous ignorez que ce que vous appelez avec mépris les « droits acquis » constitue le seul patrimoine de ceux qui n'en n'ont aucun !

Mme Olivia Gregoire. Démagogie !

Mme Marine Le Pen. Vous ne pouvez pas attenter à un système de solidarité qui fait partie intégrante de notre pacte national sans violer l'article 1er de notre Constitution, qui érige une République sociale, surtout quand vos résultats, en deux ans et demi, se limitent à une baisse de 0,51 % du nombre de chômeurs, d'après les chiffres de la direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques.

Mme Olivia Gregoire. Merci pour eux !

Mme Marine Le Pen. En agissant ainsi, vous majorez le risque que le face-à-face annoncé par M. Collomb soit également social. (Huées sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) Cela n'est ni juste, ni raisonnable.

Monsieur le Premier ministre, allez-vous renoncer à la réforme des retraites, et revenir…

M. le président. Merci, chère collègue. (Applaudissements parmi les députés non inscrits.)

La parole est à M. le Premier ministre.

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Madame la députée, vous avez évoqué de nombreux sujets dans votre question, dont je comprends qu'elle était, d'une certaine façon, davantage adressée au Président de la République qu'au Premier ministre. Toutefois, la Constitution est ainsi faite que c'est le Premier ministre qui vous répondra.

Il arrivera peut-être un jour que vous ayez l'occasion de débattre à nouveau avec le Président de la République. (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.– Vives exclamations sur les bancs du groupe GDR.)

M. Éric Straumann. Bien joué !

M. Pierre Cordier. C'est ce que vous souhaitez !

M. Stéphane Peu. Match trafiqué !

M. Édouard Philippe, Premier ministre . J'ai dit « peut-être » – je ne le sais pas et je ne veux pas pressentir ce moment !

M. Fabien Roussel. C'est incroyable !

M. Stéphane Peu. Déroulez-lui le tapis rouge, tant que vous y êtes ! Vous allez réussir à les faire accéder au pouvoir !

M. Jean-Paul Dufrègne. Oui, ils vont y arriver !

M. le président. S'il vous plaît, chers collègues, laissez M. le Premier ministre répondre à Mme Le Pen.

M. Édouard Philippe, Premier ministre . Madame la députée, la seule question que vous me posez directement, par-delà les attendus et l'exposé des motifs de votre question, vise à savoir si nous souhaitons renoncer à la réforme des retraites. Je vous répondrai le plus clairement possible.

Le Gouvernement a été nommé par le Président de la République pour mettre en œuvre le programme sur lequel ce dernier s'est engagé, et sur lequel – vous êtes bien placée pour le savoir, madame Le Pen – il a été élu. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.)

La seule ambition du Gouvernement est de mettre en œuvre le programme formulé par le Président de la République. Or il se trouve qu'y figure l'engagement de mener une réforme globale du système de retraites, en vue de construire un système universel, par répartition, par points, permettant de traiter toutes les questions qui se poseront à l'avenir dans le monde du travail, de revenir sur certaines injustices prévalant à l'heure actuelle et de mieux prendre en compte les évolutions futures du salariat – bref, une réforme très ambitieuse, je le reconnais.

En écoutant les interrogations de nos concitoyens, je constate que le système en vigueur, dans lequel nous vivons, ne permet pas toujours de répondre à leurs questions.

Prenons le niveau de leur retraite dans vingt-cinq ans : pensez-vous sérieusement, madame la députée, que les Français, avec le système actuel, le connaissent exactement ? Bien sûr que non !

M. Stéphane Peu. Mise en scène !

M. Édouard Philippe, Premier ministre . Pensez-vous vraiment qu'ils ont une idée claire de la retraite dont ils bénéficieront, dès lors qu'ils changent deux, trois, quatre ou cinq fois de régime de retraite au cours d'une carrière ? Pensez-vous que le système de retraites en vigueur est équilibré, au point de permettre à nos concitoyens d'être certains qu'il leur versera des pensions dans vingt ou trente ans ? Je ne le pense pas.

Notre objectif est de construire un système solide, clair, universel et juste. Tel est l'engagement du Président de la République. Telle est la mission du Gouvernement – et nous allons la remplir ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.)

Données clés

Auteur : Mme Marine Le Pen (Hauts-de-France - Non inscrit)

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Retraites : généralités

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : Premier ministre

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 6 novembre 2019

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