Question orale n° 237 :
Avenir du tribunal de grande instance de Villefranche

15e Législature

Question de : M. Bernard Perrut
Rhône (9e circonscription) - Les Républicains

M. Bernard Perrut attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur les juridictions de plein exercice qui assurent le maillage des territoires, dont le tribunal de grande instance de Villefranche (Rhône), qui peut être menacé par la réforme de la justice en préparation, même si le Gouvernement a pris l'engagement qu'aucune juridiction ne sera fermée, cette réponse ne pouvant être rassurante que si elle ne masque pas un danger avec le transfert partiel des compétences des petites et moyennes juridictions au profit des grandes juridictions, et en l'espèce pour le tribunal de grande instance de Villefranche vers le tribunal de grande instance de Lyon. L'objectif de Mme la garde des sceaux d'avoir un accès à la justice simple, direct, transparent et rapide est partagé à Villefranche où les décisions sont justement rendues dans un délai bien plus rapide qu'au TGI de Lyon, avec par exemple pour une procédure de divorce 6 mois d'attente pour l'audience à Lyon et 7 semaines seulement à Villefranche. Aussi un transfert de compétences aurait pour conséquences un allongement des durées des procédures civiles et pénales, un éloignement des justiciables de leurs juges en raison de déplacements difficiles jusqu'à Lyon, le risque d'évolution vers une justice virtuelle et déshumanisée, et un réel coup porté à un territoire, le département du Rhône, clairement distinct de la métropole de Lyon, reconnu pour son développement économique et en pleine expansion démographique. Il souhaite donc connaître son engagement précis pour le maintien à Villefranche du TGI dans la plénitude de ses compétences actuelles, c'est-à-dire sans transfert d'une partie du contentieux vers Lyon et du maintien des juridictions rattachées, tribunal de commerce, conseil des prud'hommes et tribunal des affaires de la sécurité sociale qui sont reconnus pour leur fonctionnement avec rapidité, efficacité et sérieux.

Réponse en séance, et publiée le 4 avril 2018

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE VILLEFRANCHE-SUR-SAÔNE
M. le président. La parole est à M. Bernard Perrut, pour exposer sa question, n°  237, relative au tribunal de grande instance de Villefranche-sur-Saône.

M. Bernard Perrut. Je veux appeler l'attention de Mme la garde des sceaux sur les juridictions de plein exercice, qui assurent un maillage essentiel des territoires, en particulier sur le tribunal de grande instance de Villefranche, dans le Rhône, à mon sens menacé par la réforme de la justice.

Vous avez pris l'engagement qu'aucune juridiction ne sera fermée, mais cette réponse n'est pas rassurante car elle masque un danger, celui du transfert partiel des compétences des petites et moyennes juridictions vers les grandes ; en l'espèce, le transfert des compétences du tribunal de grande instance de Villefranche vers celui de Lyon. L'objectif de Mme la garde des sceaux d'un accès simple, direct, transparent et rapide à la justice est partagé à Villefranche, où les décisions sont rendues dans des délais bien plus brefs qu'au TGI de Lyon. Pour une procédure de divorce, par exemple, le délai d'attente pour l'audience est de six mois à Lyon, contre sept semaines seulement à Villefranche.

Aussi la population est-elle très mobilisée. Plus d'une centaine de maires se sont déjà exprimés, les avocats vous ont fait des propositions sérieuses et les magistrats, tout comme les greffiers, sont inquiets. Tous regrettent l'absence de concertation et d'étude d'impact. Nous refusons un transfert de compétences, qui aurait pour conséquence un allongement des durées des procédures civiles et pénales et un éloignement des justiciables de leurs juges en raison de déplacements difficiles jusqu'à Lyon, le risque d'évolution vers une justice virtuelle et déshumanisée, et un réel coup porté à un territoire, le département du Rhône qui, clairement distinct de la métropole de Lyon, est reconnu pour son développement économique et se trouve en pleine expansion démographique.

Aussi je souhaite connaître votre engagement précis pour le maintien à Villefranche du TGI dans la plénitude de ses compétences actuelles, sans transfert d'une partie du contentieux vers Lyon, et pour le maintien des juridictions rattachées – tribunal de commerce et conseil des prud'hommes – qui fonctionnent avec rapidité, efficacité et sérieux. La création d'un tribunal dans le département du Rhône, distinct de celui de la métropole de Lyon, serait la meilleure réponse. Je propose que ce soit là un objectif commun.

M. le président. La parole est à Mme la ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur.

Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur. Avant de me rendre dans cet hémicycle, monsieur le député, je me suis entretenue avec un ancien procureur de Villefranche, que vous connaissez bien. Il y a toujours eu des inquiétudes, me disait-il, sur l'avenir du tribunal de cette ville. Comme je l'ai déjà dit deux fois, monsieur le député, tous les tribunaux de grande instance seront maintenus en tant que juridictions de plein exercice, et le tribunal de grande instance de Villefranche conservera non seulement ses compétences actuelles, mais en gagnera de nouvelles.

Le projet de loi prévoit, en effet, la fusion des tribunaux de grande instance et des tribunaux d'instance afin d'améliorer la lisibilité de l'organisation judiciaire. Tous les tribunaux de grande instance actuels seront donc conservés – je dis bien tous, monsieur le député. Leur socle de compétences est garanti dans le projet de loi ; les acteurs locaux pourront proposer de modifier certaines d'entre elles s'ils le souhaitent.

Les tribunaux de commerce et les conseils de prud'hommes sont des juridictions à part entière, qui ne sont pas directement concernées par la réforme. S'agissant des tribunaux des affaires de sécurité sociale – TASS –, la loi de modernisation de la justice du XXIe siècle a d'ores et déjà prévu leur transfert au sein d'une formation collégiale des tribunaux de grande instance, qui seront prochainement désignés par décret.

Il ne faut donc vraiment pas vous inquiéter, monsieur Perrut, pour le tribunal de Villefranche.

M. le président. La parole est à M. Bernard Perrut.

M. Bernard Perrut. Votre réponse est rassurante si elle est confirmée, madame la ministre. Le projet de loi prévoit bien que les chefs de cour, en lien avec les chefs de juridiction, seront chargés de proposer l'organisation la plus performante dans les départements de leur ressort.

Vous venez toutefois d'annoncer le maintien des compétences actuelles du tribunal de grande instance de Villefranche, qui pourrait même en acquérir de nouvelles. C'est dire, peut-être, l'ouverture vers la reconnaissance de ce tribunal, ou en tout cas la nécessité de son extension à une plus grande échelle territoriale, qui pourrait être celle du département du Rhône. Quand on connaît les durées d'attente au tribunal de Lyon, ainsi que votre attachement aux définitions de la métropole et du département, il serait logique que le département dont nous parlons dispose d'un véritable tribunal, faute de quoi il serait le seul, en France, à ne pas en avoir : ce serait pour le moins inquiétant.

J'insiste d'ailleurs sur l'importance de ce département et de la ville de Villefranche, dont dépendent, pour le tribunal, douze brigades de gendarmerie et deux pelotons d'autoroute, un service de douane, une prison de six cents places et un commissariat de police. C'est dire combien le tribunal de Villefranche a toute sa place. Je vous en crois convaincue, madame la ministre, et je prends aujourd'hui vos propos comme une assurance qui me permettra d'annoncer, dans ma ville et dans ma circonscription : « Oui, j'ai entendu Mme la ministre ; le tribunal de grande instance sera maintenu dans toutes ses compétences, et il pourra même en acquérir de nouvelles. »

Données clés

Auteur : M. Bernard Perrut

Type de question : Question orale

Rubrique : Justice

Ministère interrogé : Justice

Ministère répondant : Justice

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 27 mars 2018

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