15ème législature

Question N° 24346
de M. Christophe Naegelen (UDI, Agir et Indépendants - Vosges )
Question écrite
Ministère interrogé > Justice
Ministère attributaire > Justice

Rubrique > crimes, délits et contraventions

Titre > Pédocriminalité - Pédocriminels itinérants

Question publiée au JO le : 12/11/2019 page : 9888
Réponse publiée au JO le : 26/05/2020 page : 3685
Date de renouvellement: 03/03/2020

Texte de la question

M. Christophe Naegelen attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la détection des pédocriminels itinérants. En effet, certains des agresseurs sexuels se rendent à l'étranger pour abuser d'enfants, se soustrayant ainsi à la surveillance des autorités de leur pays d'origine. En France, il n'existe pas de disposition légale empêchant les agresseurs sexuels de voyager dans des pays aux proies faciles comme ceux de l'Asie du sud-est, des destinations de prédilection pour ces criminels. Ainsi, les pédocriminels itinérants peuvent librement voyager dans ces pays et s'attaquer aux enfants locaux. Pourtant, un pédocriminel inscrit au fichier judiciaire automatisé des auteurs d'infractions sexuelles doit signaler aux autorités françaises tout changement de domicile mais il ne lui incombe pas de signaler ses déplacements à l'étranger. Devant l'absence d'un tel dispositif de vérification des antécédents judiciaires, Interpol a mis en place un instrument, celui d'une notice dite verte, qui signale aux autorités du pays de destination, l'entrée sur leur territoire d'un criminel potentiellement récidiviste. Aux États-Unis, les pédocriminels ont désormais sur leur passeport, une mention qui prévient les autorités étrangères de leurs crimes passés afin de prévenir l'exploitation et le trafic d'enfants dans ces pays victimes de tourisme sexuel. Les pédocriminels ont également l'obligation de signaler leur voyage aux autorités américaines 21 jours avant leur départ. Face à l'absence d'un tel outil de prévention en France, il l'interroge sur la création d'un instrument de contrôle des déplacements des pédocriminels afin d'enrayer l'exploitation sexuelle des enfants dans les pays étrangers.

Texte de la réponse

La lutte contre les violences sexuelles et en particulier la protection des victimes mineures est une priorité gouvernementale. L'article 222-22 du code pénal prévoit qu'un français ou une personne résidant de manière habituelle en France qui se livrerait à des infractions sexuelles au préjudice de mineurs à l'étranger pourrait être poursuivi et condamné par les juridictions françaises pour ces agissements. En outre, les réformes législatives récentes ont permis de renforcer la répression contre les infractions sexuelles. La loi du 3 août 2018 renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes a permis de préciser la définition du viol ou encore d'allonger les délais de prescription pour les infractions de nature sexuelle commises au préjudice de mineurs de 20 à 30 ans. Désormais, un écart d'âge important entre l'auteur et la victime d'une infraction sexuelle ou l'existence d'une relation d'autorité peuvent permettre de caractériser la contrainte ou la surprise dans le cadre d'une agression sexuelle ou d'un viol. Par ailleurs, la direction des affaires criminelles et des grâces a diffusé le 15 octobre 2019 une dépêche relative au regroupement au parquet de Paris des procédures ouvertes à l'encontre de Français résidant sur le territoire national sollicitant, contre rémunération, la commission à l'étranger de viols ou d'autres crimes et délits sur des mineurs et diffusés en ligne à leur bénéfice. Cette dépêche a pour but de faciliter la répression des agissements sexuels illicites commis à l'étranger au préjudice de mineurs, en favorisant la coopération judiciaire avec les pays étrangers concernés par ces phénomènes criminels émergents. Aucune réforme n'est envisagée relative à la création d'un instrument de contrôle du déplacement à l'étranger des personnes condamnées pour infractions sexuelles, étant précisé qu'il est possible actuellement, dans le cadre d'un contrôle judiciaire ou d'un aménagement de peine d'interdire au prévenu ou au condamné de sortir du territoire national ou de l'obliger à remettre son passeport au greffe du tribunal. En outre, le service gestionnaire du fichier des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes (FIJAIS) enregistre les personnes de nationalité française condamnées à l'étranger pour des faits inscriptibles dans le fichier (art. 706-53-2 et R.53-8-2 CPP), lorsque ces condamnations ont fait l'objet d'un avis aux autorités françaises en application d'une convention ou d'un accord internationaux. Ainsi, plusieurs de nos ressortissants auteurs de crimes ou délits de nature sexuelle commis à l'étranger sont-ils en effet enregistrés dans le fichier et, une fois informés de cette inscription, doivent justifier régulièrement de leur adresse sous peine de se voir reprocher l'infraction de manquement aux obligations du fichier, passible de deux ans d'emprisonnement. C'est le parquet de Nantes qui est compétent pour traiter de tels manquements et bénéficie depuis 2011 d'une convention d'assistance avec le service gestionnaire du FIJAIS pour optimiser ce suivi. Le déclenchement d'une alerte pour défaut finit, ainsi, par entraîner l'inscription de l'intéressé au fichier des personnes recherchées et l'envoi d'une demande d'enquête européenne aux autorités compétentes du pays de domiciliation. Pour les personnes condamnées en France et inscrites dans le FIJAIS, s'il est exact qu'elles ne sont pas tenues de déclarer leurs voyages à l'étranger, elles restent soumises à leur obligation de justifier leur domicile en France et peuvent, si elles viennent à y manquer en raison d'un de ces voyages par exemple, faire l'objet d'une inscription au fichier des personnes recherchées par le parquet territorialement compétent.