chlordécone
Question de :
Mme Hélène Vainqueur-Christophe
Guadeloupe (4e circonscription) - Socialistes et apparentés
Question posée en séance, et publiée le 27 novembre 2019
CHLORDÉCONE
M. le président. La parole est à Mme Hélène Vainqueur-Christophe.
Mme Hélène Vainqueur-Christophe. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre, après l'adoption, ce matin, des conclusions de la commission d'enquête parlementaire sur le scandale du chlordécone.
Le groupe Socialistes et apparentés – à l'initiative de cette commission d'enquête – souhaite saluer le travail de fond mené par son président, Serge Letchimy, et sa rapporteure, Justine Benin, et remercier l'ensemble des personnalités auditionnées pour leurs précieux témoignages.
De ces longs mois d'investigation, je retiens deux éléments. Premièrement, le rapport identifie une double responsabilité dans ce drame. Celle, d'abord, de l'État. Celui-ci a triplement fauté : il a homologué et autorisé un produit dont on connaissait la dangerosité, il a cédé aux lobbies en acceptant des dérogations, et il a conservé une attitude attentiste en ne contrôlant pas la destruction des stocks et en attendant dix ans pour élaborer des plans sur le chlordécone. Les politiques publiques se révèlent aujourd'hui dramatiquement sous-dimensionnées, sous-financées et manifestement inadaptées aux préjudices subis. La seconde responsabilité est celle des acteurs de la banane et des industriels producteurs, importateurs et distributeurs de chlordécone, qui, dans une logique productiviste et commerciale, ont usé de tous les moyens de pression pour perpétuer sa vente, sa distribution et son usage.
La deuxième chose à retenir est l'urgence à agir plus vite et, surtout, plus intensément. Dans cette optique, la commission d'enquête a formulé de nombreuses préconisations. Jusqu'où le Gouvernement est-il prêt à aller ? Compte-t-il réparer les préjudices sanitaires, environnementaux et économiques subis à l'aide d'une loi d'orientation et de programmation spécifique ? Soutiendra-t-il l'idée de faire de ce drame une opportunité pour repenser notre modèle agricole ? Selon l'avancée des recherches, le Gouvernement est-il prêt à créer un fonds d'indemnisation spécifique étendu aux victimes non professionnelles du chlordécone ?
Les peuples guadeloupéen et martiniquais, comme les professionnels des deux îles, ne comprendraient pas que ces recommandations restent lettre morte. Ce rapport n'est pas seulement la chronique d'un scandale sanitaire, environnemental et économique : il propose des pistes permettant d'en sortir par le haut et de restaurer la confiance. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre des solidarités et de la santé.
M. Serge Letchimy. Nous comptons sur vous pour obtenir une réponse précise !
Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé. Je connais, pour les avoir entendues bien avant d'être ministre, les craintes réelles et l'inquiétude profonde des Antillais face à cette contamination ancienne, qui, vous le savez, date de plusieurs décennies et touche essentiellement la Guadeloupe et la Martinique.
Les interrogations sur l'avenir sont légitimes, et je souhaite que les travaux conduits par la commission d'enquête accompagnent la construction du prochain plan chlordécone IV, que nous souhaitons élaborer avec des acteurs de terrain. Je vous l'ai déjà dit, lors des auditions de la commission d'enquête, prendre sa part de responsabilité, c'est aussi rendre compte. Vous avez raison, nous devons rendre compte à la population de la Guadeloupe et de la Martinique de tout ce que nous faisons au quotidien pour lutter contre le chlordécone. Ce gouvernement s'est investi comme jamais, avec tous les ministres concernés.
Au fil des différents plans sur le chlordécone, l'État n'a certainement pas suffisamment communiqué sur les actions conduites, ni suffisamment associé les populations. À l'instar de la dynamique collective déployée en 2018, la conception du prochain plan sur le chlordécone, au cours de l'année 2020, devra pleinement associer les Antillais, les associations, les élus et l'ensemble des parties prenantes.
Enfin, je connais votre investissement sur ce sujet, et j'ai tenu l'engagement que j'avais pris devant votre groupe parlementaire en janvier 2019, traduit dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale que vous êtes en train d'examiner, de prévoir la création d'un fonds d'indemnisation pour les victimes professionnelles des pesticides, dont le chlordécone. Il s'agit d'une très grande avancée.
Ensemble, nous allons nous atteler à bâtir un futur plan qui protégera la population. Vous pouvez compter sur l'engagement sincère de tous les ministres du Gouvernement et sur ma détermination la plus totale. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)
Auteur : Mme Hélène Vainqueur-Christophe
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Produits dangereux
Ministère interrogé : Solidarités et santé
Ministère répondant : Solidarités et santé
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 27 novembre 2019