Question orale n° 250 :
Médecins non thésés

15e Législature

Question de : M. Thierry Solère
Hauts-de-Seine (9e circonscription) - La République en Marche

M. Thierry Solère interroge Mme la ministre des solidarités et de la santé sur les plusieurs dizaines de médecins français qui ne peuvent pas exercer en France, faute d'avoir soutenu leur thèse de fin d'études dans les délais impartis. En effet, l'article 21 du décret n° 2004-67 du 16 janvier 2004 relatif à l'organisation du troisième cycle des études médicales, a imposé la soutenance de cette thèse au plus tard trois années après l'obtention du diplôme afin de valider le diplôme d'État de docteur en médecine, indispensable pour exercer. Ce même décret a également stipulé que « les étudiants engagés en résidanat ont jusqu'au terme de l'année universitaire 2011-2012 pour valider l'intégralité de la formation théorique et pratique et soutenir leur thèse ». Cette date butoir a été imposée à des professionnels le plus souvent en exercice, en qualité de remplaçant de médecin généraliste ou d'interne en centre hospitalier. Ceux qui, pour des raisons personnelles, par manque de disponibilité ou même d'information n'ont pas soutenu leur thèse dans les temps, sont aujourd'hui contraints de ne plus exercer. Ils ont pourtant les compétences et l'expérience indiqués. Le gouvernement de Bernard Cazeneuve avait prévu l'assouplissement de ces dispositions afin de permettre aux médecins n'ayant pas passé leur doctorat de travailler à nouveau. Ainsi la loi n° 2016-1888 du 28 décembre 2016 de modernisation, de développement et protection des territoires de montagne apporte une solution en permettant, à ceux qui n'ont pas soutenu leur thèse, de s'inscrire en université après avis d'une commission placée auprès des ministres chargés de l'enseignement supérieur et de la santé. Cette autorisation est conditionnée par l'engagement d'exercer en zone sous dotée. Malheureusement, les conditions de mise en œuvre des dispositions en faveur de ces médecins, prévues par la loi de 2016 doivent faire l'objet d'un décret en Conseil d'État, lequel n'est pas encore paru. Voir des médecins, formés par nos universités, pendant neuf ans, ne pas pouvoir exercer, est, au regard de l'investissement tant économique et humain que cela représente, une aberration. Car s'ils ne sont pas docteurs, ils ont pourtant bien médecins ! La situation liée à la désertification médicale que connaissent une part croissante des territoires, ne peut autoriser à se passer de ce vivier de compétences. Aussi, il souhaiterait savoir ce que le Gouvernement compte faire pour remédier à cette situation.

Réponse en séance, et publiée le 4 avril 2018

EXERCICE DE LA MÉDECINE PAR LES MÉDECINS N'AYANT PAS SOUTENU LEUR THÈSE
M. le président. La parole est à M. Thierry Solère, pour exposer sa question, n°  250, relative à l'exercice de la médecine par les médecins n'ayant pas soutenu leur thèse.

M. Thierry Solère. Madame la ministre des solidarités et de la santé, plusieurs dizaines de médecins français ne peuvent pas exercer sur notre territoire, faute d'avoir soutenu leur thèse de fin d'études dans les délais impartis.

Un décret de 2004 relatif à l'organisation du troisième cycle des études médicales a en effet imposé la soutenance de cette thèse au plus tard trois années après l'obtention du diplôme, afin de valider le diplôme d'État de docteur en médecine, indispensable pour exercer. Il dispose également que « les étudiants engagés en résidanat ont jusqu'au terme de l'année universitaire 2011-2012 pour valider l'intégralité de la formation théorique et pratique et soutenir leur thèse ».

Cette date butoir a été imposée à des professionnels qui, le plus souvent, exercent déjà, soit en qualité de remplaçants de médecin généraliste, soit comme internes en centre hospitalier. Ceux qui, pour des raisons personnelles, par manque de disponibilité ou même d'information n'ont pas soutenu leur thèse dans les temps sont aujourd'hui contraints de ne plus exercer. Ils ont pourtant les compétences et l'expérience indiquées.

Le gouvernement de Bernard Cazeneuve avait prévu d'assouplir ces dispositions afin de permettre aux médecins n'ayant pas passé leur doctorat de travailler à nouveau. La loi de 2016 de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne a ainsi autorisé à ceux qui n'ont pas soutenu leur thèse de s'inscrire à l'université, après avis d'une commission placée auprès des ministres de l'enseignement supérieur et de la santé, et à condition qu'ils s'engagent à exercer en zone sous-dotée. Malheureusement, le décret en Conseil d'État qui devait définir les modalités d'application de ces dispositions n'est toujours pas paru.

Au regard de l'investissement, tant économique qu’humain, qu'ont représenté leurs neuf années de formation dans nos universités, il est aberrant de voir des médecins ainsi empêchés d'exercer. En effet, s'ils ne sont pas docteurs, ils sont pourtant bel et bien médecins.

Compte tenu de la désertification médicale que l'on peut observer dans une part croissante de nos territoires, nous ne pouvons nous passer d'un tel vivier de compétences. Dès lors, que compte faire le Gouvernement pour remédier à cette situation ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le député, j'ai le plaisir de vous annoncer qu'après l'avis rendu par le Conseil d'État en mars, la publication au Journal officiel du décret destiné à appliquer les dispositions ajoutées à l'article L. 632-4 du code de l'éducation par la loi du 28 décembre 2016 de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne est désormais imminente.

Il s'agissait de traiter la situation des anciens résidents de médecine qui, n'ayant pas soutenu leur thèse dans le délai requis de huit ans, se retrouvaient sans possibilité d'exercer la médecine, malgré leurs années d'études antérieures. Le décret détermine ainsi les conditions dans lesquelles les anciens résidents pourront être autorisés à s'inscrire à l'université en vue de soutenir leur thèse et d'obtenir ainsi le diplôme nécessaire à l'exercice de la médecine.

Bien entendu, il convient au préalable de s'assurer qu'ils disposent des compétences et connaissances requises. À cet effet, nous mettons en place une commission nationale composée de professionnels concernés et présidée par la direction générale de l'offre de soins. Elle pourra autoriser les candidats à s'inscrire à l'université pour soutenir leur thèse, le cas échéant après avoir suivi un complément de formation, en stage ou hors stage. Par ailleurs, les candidats devront s'engager sur l'honneur à exercer, une fois le doctorat obtenu, dans une zone sous-dotée. Une attestation d'installation délivrée par l'agence régionale de santé – ARS – de la région concernée permettra de certifier que cette condition est satisfaite.

Les personnes concernées devront déposer leur dossier avant la fin du mois de mai s'ils veulent s'inscrire à l'université pour l'année 2018-2019. Pour les années ultérieures, le dossier devra être déposé avant la fin du mois de février de l'année d'inscription.

J'espère, monsieur le député, avoir répondu à votre question.

M. Thierry Solère. Merci, madame la ministre.

Données clés

Auteur : M. Thierry Solère

Type de question : Question orale

Rubrique : Professions de santé

Ministère interrogé : Solidarités et santé

Ministère répondant : Solidarités et santé

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 27 mars 2018

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