Question au Gouvernement n° 2627 :
Réforme des retraites

15e Législature

Question de : M. François Ruffin
Somme (1re circonscription) - La France insoumise

Question posée en séance, et publiée le 29 janvier 2020


RÉFORME DES RETRAITES

M. le président. La parole est à M. François Ruffin.

M. François Ruffin. Une étude d'impact « insuffisante », des projections financières « lacunaires », un « flou » concernant l'âge de départ à la retraite, le taux d'emploi des seniors et les dépenses de l'assurance chômage : ce n'est plus votre opposition qui le dit, monsieur le Premier ministre, mais c'est l'avis officiel du Conseil d'État. Vous faites n'importe quoi ! La plus haute juridiction française juge la situation « d'autant plus regrettable » que cette réforme est « inédite depuis 1945 et destinée à transformer pour les décennies à venir » le contrat social.

C'est ce contrat social qu'on joue à la roulette législative. Les retraites des Français sont jetées dans une tombola improvisée. Pourquoi ? Parce qu'à l'Élysée, tel en est le caprice du prince ! Mais il est seul ! Vous marchez seuls : seuls contre la rue (Applaudissements sur les bancs du groupe FI), seuls contre les avocats et les hospitaliers, seuls contre les enseignants et les ouvriers, seuls contre les étudiants et les pompiers, seuls contre les cheminots et les danseuses de l'Opéra, seuls ici contre la droite et seuls contre la gauche, seuls surtout contre les Français et contre les deux tiers des salariés, seuls contre les syndicats et, maintenant, seuls contre le Conseil d'État ! Seuls, seuls, seuls ! (Mêmes mouvements. – Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.)

Et c'est ainsi, retranchés dans vos palais, que vous prétendez réformer la France ? En faisant rentrer la loi à la matraque ? (Applaudissements sur les bancs du groupe FI.)

M. Maxime Minot. Ils marchent seuls !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des retraites.

M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État chargé des retraites. Monsieur Ruffin, contrairement à ce que vous semblez penser, nous ne marchons pas seuls. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.)

Il me semble que vous confondez le fondement de notre démocratie, qui repose sur l'engagement que prennent devant le peuple les candidates et les candidats à la présidence de la République, avec je ne sais quelle volonté d'imposer les choses.

Mme Clémentine Autain. Relisez le programme !

M. Christian Hutin. Ça rame un peu !

M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État . Les choix qui président aux projets de loi que vous évoquez sont bien connus. Nous les avons présentés dans le cadre du « contrat avec la nation » détaillé lors de la campagne pour les élections législatives. (Exclamations sur les bancs du groupe FI.)

M. Jean-Paul Lecoq. Ce contrat n'a été approuvé que par 18 % du corps électoral !

M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État . Nous les avons rappelés à plusieurs reprises. Nous les avons fait évoluer dans le cadre des travaux menés pendant près de dix-huit mois par Jean-Paul Delevoye, qui a remis son rapport le 18 juillet dernier.

Sur le fond de votre question, vous avez évoqué l'avis du Conseil d'État. Il compte soixante-trois pages ; j'imagine que chacun ici – vous compris – l'a lu avec intérêt.

M. Christian Hutin. Ça rame !

Mme Marie-George Buffet. Que de mépris !

Mme Sylvie Tolmont. C'est quoi, ces provocations ?

M. Fabien Di Filippo. C'est lui qui ne l'a pas lu !

M. Charles de la Verpillière. Rendez-nous Delevoye !

M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État . Toutefois, vous avez choisi de ne pas en extraire les observations qui ne vous satisfont pas. Le Conseil d'État a clairement indiqué que 99 % des dispositions des deux projets de loi – organique et ordinaire – sont parfaitement conformes à nos engagements internationaux, ainsi qu'à la Constitution. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.)

M. Loïc Prud'homme. Pas à la Constitution !

M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État . Il aurait fallu le dire aussi.

Par ailleurs, le Conseil d'État a indiqué qu'il aurait aimé avoir plus de temps pour les étudier. Le Gouvernement l'a entendu. M. le Premier ministre l'a rappelé tout à l'heure, en précisant que nous avons tenu compte de ses remarques, que nous sommes très vigilants afin de faire en sorte que la représentation nationale bénéficie d'informations avant de voter,…

M. Christian Hutin. Quatre jours de débat !

M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État . …et que tout cela n'est pas contestable, car nous avons proposé une étude d'impact comptant plus de 1 000 pages. Souvenons-nous de celles qu'avaient fournies les gouvernements qui ont mené les réformes précédentes – 90 pages en 2010 ! (Exclamations sur les bancs du groupe LR.)

M. Maxime Minot. Mauvais, mauvais, mauvais !

M. Pierre Cordier. Ce n'est pas au poids qu'on juge les études d'impact !

M. le président. La parole est à M. François Ruffin.

M. François Ruffin. Chers collègues de la majorité, je vous entends faire la claque. (Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.)

J'aimerais m'adresser à vous : pourquoi le chef de l'État nous envoie-t-il un machin aussi mal fichu, avec une étude d'impact truquée et un texte à trous – vingt-neuf ordonnances ! (M. Christian Hutin applaudit.) Pourquoi le texte d'un prince prend-il force de loi ? Parce qu'il ne vous respecte pas, vous encore moins que les autres !

M. Erwan Balanant. Vous pouvez le dire sans crier !

M. Sylvain Maillard. C'est vous qui ne nous respectez pas !

M. François Ruffin. Il n'y met même plus les formes, car il sait que vous formez une chambre d'enregistrement des désirs du Président de la République, prêts – comme des carpettes ! – à voter n'importe quoi les yeux fermés ! (Vives protestations sur les bancs du groupe LaREM.) Hurlez, hurlez, mais souvenez-vous : alors que, il y a deux ans, vous promettiez d'écouter la société civile, vous la brutalisez aujourd'hui à coups de LBD ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe FI. – Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.)

Données clés

Auteur : M. François Ruffin

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Retraites : généralités

Ministère interrogé : Retraites

Ministère répondant : Retraites

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 29 janvier 2020

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