Filière ovin viande - Limousin Poitou-Charentes
Question de :
M. Pierre Venteau
Haute-Vienne (2e circonscription) - La République en Marche
M. Pierre Venteau attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur la situation de la filière ovin viande en France et plus particulièrement dans la zone Limousin Poitou-Charentes. À titre d'exemple, le Limousin a subi ces dernières années une baisse inquiétante du cheptel ovin avec une perte de 16 000 brebis et 190 éleveurs en 3 ans. Le renouvellement des générations est en panne. Il faut y voir le résultat de problèmes bien connus dans les filières d'élevage tels que la rentabilité faible voir absente, les difficultés d'accès au foncier, le dénigrement auquel ont à faire face les éleveurs et la diminution tendancielle de consommation d'agneau. À ces éléments structurels viennent s'ajouter des soucis plus conjoncturels. Sanitaires, en premier lieu, avec une recrudescence de la salmonellose, qui se combine malheureusement avec la prolifération de la mouche tueuse wolfhartia. Prédation, en second lieu, avec le spectre du loup dont la présence ne fait plus guère de doute sur ce territoire. Enfin, les problèmes de sécheresse récurrents qui font flamber les coûts de production. Le Brexit apporte également son lot d'inquiétudes à la filière qui craint légitimement d'une augmentation massive de viande ovine importée d'Océanie qui pourrait, directement ou pas, concurrencer la production intérieure et mettre en péril de nombreux éleveurs. Il lui demande quelles mesures il entend prendre pour offrir de réelles perspectives aux éleveurs de la filière ovine de la zone Limousin Poitou-Charentes.
Réponse publiée le 29 septembre 2020
Depuis deux ans, des mesures fortes ont été adoptées pour soutenir l'agriculture française. Avec les états généraux de l'alimentation et la loi du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, l'enjeu de la répartition de la valeur entre ceux qui produisent, ceux qui transforment et ceux qui distribuent les produits agricoles a été pris à bras le corps. Les interprofessions agricoles ont également pris leurs responsabilités en adoptant des plans de filière, qui visent notamment à faire évoluer les modes de production pour leur permettre de mieux répondre aux attentes des consommateurs. La consommation de viande ovine en France a connu une baisse de près de moitié sur ces vingt dernières années. Cette tendance peut être contenue grâce aux campagnes de promotion générique menées par les professionnels et à la mobilisation de toute la filière. Ainsi cette année, la consommation d'agneau est restée dynamique lors de la période de Pâques, permettant de limiter les pertes de débouchés en pleine crise sanitaire liée au covid-19. Pour cela, les producteurs ont également su innover sur leurs modes de commercialisation, avec la mise en place rapide de drive fermiers par exemple, permettant le développement de la vente directe. Plus généralement, nombre de chantiers ont pu être lancés avec la mise en œuvre du plan de la filière ovine française. Ces travaux doivent permettre une meilleure rémunération des éleveurs notamment grâce à une meilleure prise en compte des coûts de production. Il s'agit également de soutenir la création de valeur à l'amont de la filière, et la recherche d'un juste partage de la valeur entre acteurs : le développement de la contractualisation et le regroupement de l'offre, s'appuyant sur l'approfondissement du regroupement en organisations de producteurs, sont des pistes à poursuivre. Dans ce domaine, il est essentiel que l'ensemble des acteurs dialoguent, s'organisent et prennent leurs responsabilités, y compris en ce qui concerne l'encadrement des promotions en grande distribution. Concernant les enjeux sanitaires, la salmonellose abortive ovine, comme les larves carnassières de la mouche wohlfahrtia magnifica (présence avérée en Charente, Vienne et Haute-Vienne en 2019) sont des dangers sanitaires de troisième catégorie en France (non listés dans l'arrêté du 29 juillet 2013). Ainsi, les mesures de prévention, de surveillance et de lutte reposent sur la responsabilité de l'éleveur. Pour limiter l'impact de ces dangers en élevage, la mise en œuvre de mesures préventives (traitement antiparasitaire, soins des plaies, etc.) et de biosécurité est essentielle. En matière de prédation, le ministère de l'agriculture et de l'alimentation est déterminé, avec l'ensemble du Gouvernement, à agir dans le sens de la sauvegarde du pastoralisme, dont le maintien est déterminant pour le bon développement économique, social et écologique des territoires. La mise en œuvre du plan pour le loup et les activités d'élevage 2018-2023 fait l'objet d'échanges et d'informations avec l'ensemble des parties prenantes dans le cadre du groupe national loup. Il s'agit de parvenir à un traitement équilibré du dossier au regard des différents enjeux et de concilier la présence du loup, qui est une espèce strictement protégée au titre de la convention de Berne et de la directive « habitats, faune flore » et celle du pastoralisme. Par ailleurs, pour les exploitants qui connaissent des difficultés économiques suite à un épisode de sécheresse, plusieurs dispositifs peuvent être mobilisés, notamment le report du paiement des cotisations sociales auprès des caisses de mutualité sociale agricole et le régime des calamités agricoles. Pour répondre à l'urgence, le ministère de l'agriculture et de l'alimentation a pris plusieurs mesures pour accompagner les agriculteurs : valorisations des jachères, décalage de la date limite d'implantation des cultures dérobées, maximisation des taux de paiement des avances de la politique agricole commune (PAC). De manière transversale, la répétition des épisodes de sécheresse doit amener à mettre en place des mesures d'adaptation structurelles au changement climatique : c'est l'un des enjeux du plan de relance. Le ministère de l'agriculture et de l'alimentation est également attentif aux conséquences des accords de libre échange et du Brexit pour la filière viande ovine, le Royaume-Uni et la Nouvelle Zélande étant les principales provenances des importations. Le Gouvernement porte auprès de la Commission européenne l'objectif d'une meilleure cohérence entre la politique commerciale et la politique agricole de l'Union européenne (UE). Il s'attache notamment à y obtenir une meilleure équité des conditions de concurrence entre les producteurs de l'UE et des pays tiers. Sa mise en œuvre, à laquelle travaille le Gouvernement, doit cependant intégrer l'ensemble des dimensions du marché unique et préserver la compétitivité des producteurs au sein même de l'UE. C'est pourquoi le Gouvernement porte également ces objectifs dans la réforme de la PAC, en affirmant que la nouvelle PAC, en cohérence avec les autres politiques européennes, doit accompagner le projet européen au service d'une agriculture répondant à des standards exigeants et ne peut se concevoir sans une régulation sociale, environnementale et sanitaire des échanges avec les autres pays. Le Gouvernement a ainsi accueilli favorablement les éléments du pacte vert et de la stratégie de la ferme à la table allant dans ce sens, et travaillera à les approfondir dans le cadre de leur mise en œuvre. De plus, depuis les débuts de la négociation de la future PAC et sans relâche, la France a plaidé pour le maintien du budget de la PAC à vingt-sept, afin d'accompagner les agriculteurs à la hauteur des enjeux face aux défis économiques, environnementaux, climatiques et sanitaires. À ce titre, le budget de la PAC est en forte hausse, il augmente de près de 6 milliards d'euros par rapport à la période actuelle et de près de 22 milliards d'euros par rapport à la proposition de la précédente Commission de mai 2018. Les financements alloués à la PAC permettront de renforcer l'effort d'investissement dans les secteurs agricoles, alimentaires et forestiers. Enfin, le plan de relance prévoit 1,2 milliard d'euros pour les secteurs agricoles, agroalimentaires et forestiers : il doit permettre d'accompagner la transition de l'agriculture. Cette transition n'est pas anodine et il faut, dans le respect de chacun, que les uns et les autres puissent vivre dignement en conduisant les changements nécessaires.
Auteur : M. Pierre Venteau
Type de question : Question écrite
Rubrique : Élevage
Ministère interrogé : Agriculture et alimentation
Ministère répondant : Agriculture et alimentation
Dates :
Question publiée le 11 février 2020
Réponse publiée le 29 septembre 2020