Conséquences du Brexit sur la pêche
Question de :
M. Bertrand Sorre
Manche (2e circonscription) - La République en Marche
Question posée en séance, et publiée le 5 février 2020
CONSÉQUENCES DU BREXIT SUR LA PÊCHE
M. le président. La parole est à M. Bertrand Sorre.
M. Bertrand Sorre. Ma question s’adresse à monsieur le ministre de l'agriculture et de l'alimentation,…
M. Thibault Bazin. Il est à Biarritz !
M. Bertrand Sorre. …j'y associe mes collègues députés des littoraux normand et breton. Depuis le 31 janvier à minuit, nos pêcheurs français normands et bretons ne sont plus autorisés à venir exercer leur métier autour de l’île anglo-normande de Guernesey. Les pêcheurs du port de Granville, dans ma circonscription, mais aussi ceux de Cherbourg ou de Carteret dans le département de la Manche, ont aussitôt manifesté leur incompréhension ainsi qu'une forte colère face à cette décision unilatérale, totalement inacceptable.
M. Pierre Cordier. Et les pêcheurs de Biarritz ?
M. Bertrand Sorre. En effet, à la suite de l’entrée en vigueur du Brexit, la convention de Londres, accord international signé en 1964 concernant les droits de pêche, est devenue caduque. Dès lors, a été immédiatement suspendu l'accès des bateaux français à la zone des 6 à 12 milles des côtes de l'île de Guernesey, zone riche en ressources, fréquentée par près de 180 bateaux français durant l’année 2019. Les autorités de Guernesey se veulent rassurantes et indiquent vouloir ouvrir des négociations au cas par cas avec les navires de pêche français d’ici le 31 décembre. Dans l’intervalle, des mesures ont également été annoncées pour accorder une licence de pêche temporaire aux bateaux français fréquentant régulièrement cette zone. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous indiquer où en sont les négociations avec les autorités de Guernesey, et à quel moment et sous quelles conditions les licences temporaires seront délivrées à nos pêcheurs ?
Plus largement, les négociations commerciales entre l’Union européenne et le Royaume-Uni ont débuté et s’annoncent intenses et délicates. Concernant la pêche, l'objectif est bien de permettre aux navires européens, donc français, de continuer à pouvoir pêcher dans les eaux britanniques, très poissonneuses. Même si la pêche ne représente qu'une partie infime du produit intérieur brut – PIB – de l'Union européenne, l'activité est vitale pour de nombreuses entreprises du littoral français et ne saurait en aucun cas servir de variable d'ajustement.
Pouvez-vous préciser à la représentation nationale les mesures temporaires qui s’appliqueront le temps des négociations et, plus largement, la position de notre pays dans cette négociation essentielle pour l'avenir de la pêche française ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – M. Vincent Bru applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation.
M. Didier Guillaume, ministre de l'agriculture et de l'alimentation. Monsieur le député Sorre, vous posez deux questions auxquelles je vais répondre en précisant toutefois d'emblée que cet après-midi, nous pouvons être optimistes quant à la situation de la pêche à Guernesey. Tout d'abord, la question que vous posez au sujet du Brexit est importante. Vous l'avez dit, comme le Premier ministre l'avait indiqué lui-même : la pêche ne peut pas être la variable d'ajustement du Brexit et d'un quelconque accord. Il n'en est pas question. Même si cette activité représente peu sur le plan financier, elle est importante sur le plan humain ainsi qu'en termes d'emploi et d'économie.
M. Jean-Louis Bricout. C'est comme le CETA – Comprehensive economic and trade agreement !
M. Didier Guillaume, ministre . Les bateaux français, comme les bateaux européens, doivent continuer à pouvoir pêcher dans les eaux britanniques, après le 31 décembre. Si ce n'était pas le cas, cela serait uniquement la conséquence d'un choix politique du Gouvernement britannique. Les poissons ne connaissent pas les frontières…
M. Christian Hutin. C'est comme La République en marche !
M. Didier Guillaume, ministre . …et, vous l'avez indiqué, la ressource halieutique est relativement importante.
Il n'y a donc aucune raison que cela ne se passe pas ainsi et c'est bien sûr dans cette direction que nous travaillons dans le cadre des négociations que nous menons au sujet de l'après 31 décembre.
M. Éric Straumann. Allons-nous leur déclarer la guerre ?
M. Didier Guillaume, ministre . S'agissant du cas particulier des îles anglo-normandes, permettez-moi d'évoquer d'abord Jersey, qui n'a jamais été incluse dans le débat, contrairement à ce que nous avons pu entendre.
Quant au cas de Guernesey, nous y avons travaillé tout le week-end et encore ce matin. Les ministres mesdames de Montchalin et N'Diaye se sont rendues ce matin en Normandie et j'ai travaillé moi-même, conjointement avec la direction des pêches maritimes et de l'aquaculture, qui dépend du ministère, ainsi qu'avec les autorités de Guernesey. Je pense que la solution est trouvée et que dans les heures à venir, ou dans les tout prochains jours, des accords individuels pourront être signés avec les pêcheurs français.
Le problème auquel nous avons été confrontés est celui de la continuité : l'accord de retrait avec le Royaume-Uni devait entrer en vigueur avant que nous entamions les discussions relatives à l'accès à Guernesey. Je peux néanmoins vous affirmer que la solution est aujourd'hui trouvée et que, dans les heures à venir, les pêcheurs français pourront de nouveau pêcher au large de Guernesey.
Auteur : M. Bertrand Sorre
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Aquaculture et pêche professionnelle
Ministère interrogé : Agriculture et alimentation
Ministère répondant : Agriculture et alimentation
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 5 février 2020