15ème législature

Question N° 266
de Mme Huguette Bello (Gauche démocrate et républicaine - Réunion )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Transition écologique et solidaire
Ministère attributaire > Transition écologique et solidaire

Rubrique > outre-mer

Titre > Recyclage et valorisation des véhicules hors d'usage (VHU) à La Réunion

Question publiée au JO le : 10/04/2018
Réponse publiée au JO le : 18/04/2018 page : 2971

Texte de la question

Mme Huguette Bello interroge M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur les mesures à prendre en vue de créer, dans le respect du code de l'environnement, les conditions favorables à la mise en place, à La Réunion, d'une véritable filière de recyclage et de valorisation des véhicules hors d'usage (VHU). Il s'agit là d'un secteur créateur d'emplois et de richesses du fait même de la croissance du nombre de voitures dans l'île. Les conséquences sur le plan sanitaire ne sont bien sûr pas négligeables. Elle lui demande sa position sur cette question.

Texte de la réponse

RECYCLAGE DES VÉHICULES HORS D'USAGE À LA RÉUNION


M. le président. La parole est à Mme Huguette Bello, pour exposer sa question, n°  266, relative au recyclage des véhicules hors d'usage à La Réunion.

Mme Huguette Bello. Alors que la dengue est en phase épidémique à La Réunion et que l'élimination des gîtes larvaires devient impérative, la question du traitement des véhicules hors d'usage se pose avec une acuité renouvelée. Ces épaves sont en effet propices au développement des larves de moustiques, vecteurs de la dengue et, on s'en souvient, du chikungunya.

Depuis la transposition dans le droit français de la directive européenne en 2011, l'exportation et les opérations de gestion des véhicules hors d'usage ne peuvent pas être réalisées en dehors de l'Union européenne. Cette législation est néanmoins vite apparue comme inadaptée aux régions d'outre-mer en raison de l'absence d'outils de broyage adaptés et, bien sûr, de l'éloignement géographique.

C'est ainsi, que dès 2011, la Direction générale de la prévention des risques a accordé une tolérance à La Réunion afin de permettre aux opérateurs d'exporter leurs véhicules hors d'usage en Inde, en Indonésie et plus largement dans la zone de l'Océan indien. Matérialisée par un courrier électronique, cette dérogation au code de l'environnement a été reconduite chaque année mais sans jamais bénéficier d'un fondement légal.

Cette situation n'étant pas appelée à se prolonger, des investissements importants ont été réalisés avec le soutien financier de l'Europe, de l'État et de la Région Réunion. Par la suite, un arrêté préfectoral et un agrément ont autorisé ces activités de broyage, qui démarrèrent en 2016.

La Réunion est donc désormais capable de traiter et de valoriser sur place l'ensemble des déchets métalliques, mais aussi de produire une matière première de seconde génération de très haute qualité. Contre toute logique, la dérogation est cependant maintenue. Sollicité à plusieurs reprises à ce sujet, le ministère de l'environnement n'a jamais donné suite.

En plus d'ignorer l'existence de nouveaux outils de transformation performants, ce statu quo compromet d'une part la production à La Réunion de l'acier recyclé – le E40, pour les spécialistes – et d'autre part, bien sûr, la création d'emplois. Cette tolérance va à l'encontre de la nécessaire relocalisation de la valeur ajoutée et du développement de l'économie circulaire. Elle aggrave aussi la pollution maritime puisque les déchets doivent parcourir de longues distances.

Ma question est donc la suivante : le Gouvernement permettra-t-il l'application à La Réunion de l'article R. 543-161 du code de l'environnement ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre chargée des transports.

Mme Élisabeth Borne, ministre chargée des transports. Madame la députée, vous avez interrogé M. Nicolas Hulot, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire. Ne pouvant être présent, il m'a chargée de vous répondre.

L'activité de la filière de déconstruction automobile répond à des enjeux importants, en particulier dans les territoires d'outre-mer.

Elle répond en premier lieu à des enjeux environnementaux, car cette filière assure la dépollution des véhicules en fin de vie, et permet la réutilisation des pièces détachées et le recyclage des matériaux qui en sont issus. Elle participe en outre à l'activité économique par les emplois de proximité qu'elle génère. La Réunion compte ainsi sept centres agréés de déconstruction des véhicules hors d'usage et deux broyeurs agréés qui permettent la prise en charge de l'ensemble des véhicules hors d'usage de l'île. Enfin, elle permet de prévenir les risques sanitaires, comme vous l'avez souligné, car les véhicules hors d'usage abandonnés constituent des gîtes privilégiés de développement des moustiques et ceux-ci sont vecteurs de maladies qui peuvent être graves.

À La Réunion, environ 5 000 véhicules sont ainsi pris en charge gratuitement chaque année par les réseaux agréés, avec des performances de recyclage et de valorisation satisfaisants qui sont de l'ordre de 85 % de la masse des véhicules.

Cependant, à La Réunion comme dans d'autres territoires d'outremer, un certain nombre de véhicules sont abandonnés sur la voie publique et sur des terrains privés, souvent par des personnes qui les déconstruisent en toute illégalité pour récupérer uniquement les pièces détachées qui ont de la valeur. Sur le territoire de La Réunion, le nombre de ces véhicules abandonnés est estimé à une dizaine de milliers.

Sur la base des recommandations formulées sur cette problématique par le rapport du député Letchimy en 2015, un décret pris en avril 2017 demande aux constructeurs automobiles de mettre en œuvre un plan d'actions ciblé sur les collectivités d'outre-mer, visant à collecter et traiter ces véhicules abandonnés, en lien avec les collectivités locales.

Des actions de sensibilisation des habitants sont par ailleurs prévues afin de prévenir l'abandon de ces véhicules ou leur récupération par la filière illégale.

En application de ce plan, les constructeurs automobiles ont engagé fin mars 2018 les premières opérations de collecte de véhicules abandonnés en Guadeloupe et en Martinique, dans le cadre d'une phase expérimentale qui porte sur 3 000 véhicules. Sur la base de cette expérimentation, les constructeurs automobiles élargiront cette action à La Réunion dans les prochains mois.

Parallèlement, les services de l'inspection des installations classées de mon ministère renforcent leur lutte contre la filière illégale de déconstruction des véhicules.

Les questions relatives à la collecte des véhicules hors d'usage s'inscrivent par ailleurs dans le cadre d'un enjeu national tout particulier et feront l'objet d'annonces spécifiques lors de la publication prochaine de la feuille de route sur l'économie circulaire.