Difficultés rencontrées par le service public de collecte sélective des déchets
Question de :
M. Vincent Descoeur
Cantal (1re circonscription) - Les Républicains
M. Vincent Descoeur appelle l'attention de Mme la ministre de la transition écologique et solidaire sur les difficultés que rencontre le service public de collecte sélective des déchets. En effet, le marché mondial du papier-carton recyclé est engorgé, les prix ont été divisés par quatre en un an et les centres de tri commencent à avoir du mal à écouler leurs stocks. Les professionnels tirent la sonnette d'alarme. La France, qui a collecté l'an dernier 7 millions de tonnes de papier et de carton, manque d'usines papetières et se retrouve avec un excédent annuel de 1,7 millions de tonnes. Cette situation est causée pour le carton par les conséquences de la fin de l'importation de déchets recyclables de plusieurs pays asiatiques, dont la Chine. A cela s'ajoute le problème structurel du papier, dont la consommation baisse avec internet. La collecte de déchets de papier recule mais reste encore supérieure aux besoins de l'industrie papetière française. La solution serait que la France investisse dans son industrie afin de vendre en Chine et ailleurs des bobines de matière neuve faites à partir de déchets de papier carton recyclés. Aujourd'hui, l'éco-organisme responsable du recyclage des emballages refuserait toute mesure de compensation et de renforcement des débouchés de la filière. Ainsi, si rien n'est fait, les collectivités n'auront d'autres choix que de céder à perte voire d'éliminer sans recyclage les déchets collectés sélectivement par les Français, ce qui aura un impact sur le coût du service public et la fiscalité locale, mais aussi à terme sur la mobilisation des Français en matière de tri. Les collectivités se retrouvent alors dans une position inextricable où elles doivent collecter de plus en plus de déchets de papiers cartons en vue du recyclage (en particulier avec le développement du e-commerce), conformément aux objectifs des différentes filières REP, tout en sachant que les débouchés pour ces déchets sont de plus en plus restreints. Les collectivités, également inquiètes du projet de consigne pour recyclage des bouteilles en plastique, demandent la mise en place à court terme de compensations financières et d'une garantie de reprise pour les papiers collectés séparément, sur le modèle de ce qui est en place aujourd'hui pour les emballages, et à plus long terme le développement d'une filière nationale pouvant accueillir les matériaux recyclés, portée par l'éco-organisme dont la responsabilité première est bien d'assurer le recyclage des produits et emballages en fin de vie. Alors que les collectivités sont tenues d'investir des dizaines de millions d'euros dans les centres de tri pour collecter l'ensemble des emballages plastiques, aucune garantie ne leur est donnée sur l'émergence de filières industrielles qui pourront accueillir les nouvelles résines et il n'y a pas de garantie de l'éco-organisme que le nouveau geste de tri demandé aux Français permette réellement de recycler ces millions d'emballages en plastique ne bénéficiant aujourd'hui d'aucune solution de recyclage pérenne. Ces conditions mettent en péril le service public de collecte collective. En effet, les élus ne sont plus en mesure d'assurer qu'un déchet entrant dans les consignes de tri et collecté séparément sera effectivement recyclé. En collectant plus de déchets sans garanties sur leurs débouchés de recyclage, les collectivités s'exposent à des coûts supplémentaires, risquant de décourager les gestes de tri. Aussi, il demande au Gouvernement quelles mesures vont être prises pour assurer la pérennité du service public de collecte sélective et éviter la démobilisation des territoires qui sont les acteurs clés de l'économie circulaire.
Réponse publiée le 8 septembre 2020
Dans un contexte de renchérissement et de raréfaction des matières premières et de volatilité des cours des matériaux, le recyclage reste un moyen permettant de contribuer à renforcer l'indépendance nationale en ce qui concerne l'approvisionnement de matières premières. Poursuivre les efforts de tri ne peut que permettre d'améliorer la situation, l'industrie papetière ayant toujours besoin de matière première. Cependant, face à l'offre actuelle, elle peut se permettre de choisir rigoureusement ce qu'elle souhaite aquérir. Un lot parfaitement trié, d'une qualité irréprochable, trouvera donc plus facilement preneur, y compris à l'exportation, et limitera les frais des parties en cause. De nouvelles capacités de production de papier pour carton ondulé, ainsi qu'une retructuration du marché asiatique (hors Chine) permettront prochainement d'équilibrer la situation en Europe. Par ailleurs, la fin des contenants en plastique pour la vente à emporter notamment, dans le secteur de la restauration rapide, ou celle des emballages en plastique pour la présentation de fruits et légumes, programmées par la loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire devraient également apporter de nouveaux débouchés au papier et au carton. Le renforcement du tri pour détourner les déchets de plastique des décharges et favoriser leur recyclage doit permettre de renforcer l'attrait pour le plastique recyclé, de par l'effet de volume ainsi généré. La directive 2019/904 du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 relative à la réduction de l'incidence de certains produits en plastique sur l'environnement a prévu de fixer des exigences de teneur minimale obligatoire en matières plastiques recyclées dans de nouveaux produits., ce qui devrait nécessairement conduire à l'émergence de nouveaux débouchés pour les plastiques recyclés dans les toutes prochaines années, d'autant plus que la Commission Européenne va prochainement proposer un nouveau « paquet économie circulaire » pour renforcer encore le recyclage en Europe. Par ailleurs, tant la loi du 2 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et une alimentation saine et durable que la loi du 10 février 2020 relative à lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire, ont interdit un certain nombre d'usage d'objets en plastique à usage unique à des échéances assez proches ce qui devrait aussi diminuer de façon notable les quantités de déchets de plastique à gérer.
Auteur : M. Vincent Descoeur
Type de question : Question écrite
Rubrique : Déchets
Ministère interrogé : Transition écologique et solidaire
Ministère répondant : Transition écologique
Dates :
Question publiée le 10 mars 2020
Réponse publiée le 8 septembre 2020