Corailleurs
Publication de la réponse au Journal Officiel du 26 avril 2022, page 2844
Question de :
M. Jean-Félix Acquaviva
Haute-Corse (2e circonscription) - Libertés et Territoires
M. Jean-Félix Acquaviva alerte Mme la ministre du travail sur les menaces de disparition qui pèsent sur le métier de corailleur artisanal, en raison de l'application uniforme de l'arrêté du 14 mai 2019 définissant les procédures d'accès, de séjour, de sortie et d'organisation du travail pour les interventions en milieu hyperbare exécutées avec immersion dans le cadre de la mention B « techniques, sciences, pêche, aquaculture, médias et autres interventions ». Selon la profession, qui déplore un manque de consultation, les nouvelles conditions d'immersion préconisées par l'arrêté précité sont inapplicables dans le champ très spécifique de la pêche au corail rouge de Méditerranée, voire même dangereuses pour leur propre vie. En effet, selon leur régime d'autorisation alliant prévention et premiers secours, le corailleur travaille avec un « surveillant » qui reste en observation sur le navire, équipé d'un dispositif de secours d'oxygénothérapie en cas d'accident de décompression majeur, et qui suit visuellement les bulles afin d'intervenir immédiatement et d'effectuer les actions de remontée. L'évolution en binôme, prévue par l'arrêté, à travers notamment l'intervention d'un plongeur professionnel supplémentaire et qualifié, apparaît périlleuse pour le surveillant, d'une part, qui devra mettre en œuvre une surveillance mutuelle de deux plongeurs et une remontée simultanée qui, selon les professionnels, augmenterait immanquablement les risques d'accidents de décompression. D'autre part, les corailleurs se trouvent dans l'incapacité financière d'employer un plongeur professionnel qui impliquerait un coût salarial et des charges importantes que le métier, s'exerçant essentiellement de façon artisanale et indépendante, ne pourra absorber. Mais encore, pour des raisons de sécurité et de navigabilité, la présence d'un troisième homme à bord est compromise car il s'agit bien souvent de navires de petite pêche artisanale ne dépassant pas dix mètres. C'est pourquoi, si cette réglementation venait à s'appliquer en l'état aux corailleurs corses notamment, la disparition de la pêche au corail artisanale serait inéluctable. La pêche au corail en Corse, surnommé « l'or rouge de Méditerranée », pratiquée à Ajaccio, Bonifacio, Calvi ou Propriano, est une pêche emblématique, respectueuse des ressources halieutiques, qui repose sur un savoir-faire ancestral. Elle alimente localement des artisans de transformation et toute une filière commerciale. Ainsi, la mise en péril de cet artisanat au profit notamment d'une pêche industrielle qui déboucherait sur l'ouverture d'un commerce extérieur peu contrôlé et à la qualité médiocre constituerait un désastre et la fin d'une tradition ancienne. C'est pourquoi il lui demande s'il envisage d'exclure les corailleurs du champ d'application de l'arrêté du 14 mai 2019 afin de ne pas voir disparaître un pan de la culture marine de la Corse.
Réponse publiée le 26 avril 2022
La profession des corailleurs déplore un manque de consultation lors de l'élaboration de ce texte et considère que les conditions ainsi définies sont inapplicables pour ce secteur d'activité, notamment s'agissant de l'obligation de disposer d'une équipe d'intervention constituée d'au moins deux travailleurs, à savoir un opérateur intervenant en milieu hyperbare et un opérateur de secours, chargé en cas de situation anormale de travail, de prêter assistance à l'opérateur et d'assurer la fonction de surveillant qui en cas de situation anormale est chargé de mettre en œuvre les moyens de secours. L'arrêté précité a pour objectif de sécuriser les interventions en milieu hyperbare qui comportent des risques importants pour les travailleurs, comme l'ont malheureusement montré les cinq accidents graves ou mortels survenus au cours de l'année 2018, et les partenaires sociaux ont été très largement associés à l'élaboration de ce texte lors de son examen devant le conseil d'orientation des conditions de travail. Les représentants de la profession dans toutes ses composantes ont également été entendus lors du retour d'expérience qui a fait suite à ces accidents et qui a conduit à la création d'un groupe de travail auquel ils contribuent activement sur la thématique de la sécurité et des secours en matière d'hyperbarie. Conformément à cet arrêté et dans le cadre de son évaluation des risques, il appartient à l'employeur de définir, préalablement à la plongée, les procédures d'intervention et de secours qui seront mises en œuvre en cas d'accident. Ces procédures définissent notamment la répartition des fonctions entre les différents travailleurs composant l'équipe de secours. Les rôles d'opérateur de secours chargé de prêter assistance à l'opérateur et de surveillant qui assure notamment la gestion des paramètres du milieu hyperbare, la communication avec l'opérateur intervenant en milieu hyperbare et en cas de situation anormale la mise en œuvre des moyens de secours, peuvent être tenus par la même personne dès lors que celle-ci dispose des compétences requises ainsi que le prévoit l'article 14 de l'arrêté du 14 mai 2019 précité. Aussi, la présence d'un troisième homme à bord n'est pas indispensable si les deux rôles précédents peuvent être tenus par la même personne. Il apparaît par ailleurs important de rappeler que la réglementation du code du travail en matière de risques hyperbares ne s'applique pas aux travailleurs indépendants ou aux employeurs à la seule exception de ceux qui exercent directement une activité sur un chantier de bâtiment et de génie civil (article R. 4535-13 du code du travail) ce qui n'est évidemment pas le cas des corailleurs. Ainsi, un corailleur immergé et un surveillant qui reste sur le navire, est parfaitement compatible avec les exigences de l'article 14 de l'arrêté du 14 mai 2019 précité qui prévoit que « toute équipe d'intervention est composée d'au moins deux travailleurs ». Dans cette configuration l'opérateur qui assure la surveillance depuis le navire doit néanmoins pouvoir cumuler les fonctions d'opérateur de secours et de surveillant.
Auteur : M. Jean-Félix Acquaviva
Type de question : Question écrite
Rubrique : Travail
Ministère interrogé : Travail
Ministère répondant : Travail, emploi et insertion
Signalement : Question signalée au Gouvernement le 27 juillet 2020
Dates :
Question publiée le 10 mars 2020
Réponse publiée le 26 avril 2022