15ème législature

Question N° 274
de M. Christophe Arend (La République en Marche - Moselle )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Économie et finances
Ministère attributaire > Transition écologique et solidaire

Rubrique > mines et carrières

Titre > Dégâts miniers à Rosbruck en Moselle

Question publiée au JO le : 10/04/2018
Réponse publiée au JO le : 18/04/2018 page : 2974
Date de changement d'attribution: 17/04/2018

Texte de la question

M. Christophe Arend attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur la situation dans laquelle se trouve la ville de Rosbruck en Moselle suite à l'exploitation minière. Dans les années 1980, le chantier des HBL effectué à plus de 1 000 mètres sous terre sur le champ de Cocheren a permis d'extraire des milliers de tonnes de charbon, notamment sous le village de Rosbruck. Ces travaux ont entraîné des tremblements de terre, des fissurations et un affaissement de l'ensemble de la commune de 10 à 15 mètres. Aujourd'hui, les maisons sont en dessous du niveau de la rivière avoisinante : la Rosselle. Pour éviter les risques d'inondations, une digue avait été construite et réhaussée, mais suite à l'arrêt de l'exploitation du charbon, le pompage des eaux en sous-sol a été stoppé, provoquant une remontée des eaux. À Rosbruck, on estime que le niveau de la nappe sera stabilisé en 2032. Mais, c'est sans prendre en compte l'affaissement des habitations de plus de 15 mètres. Les habitants risquent alors de se retrouver sous l'eau. Des alternatives, comme l'installation de 4 forages de rabattement, ont été développées mais sans réelle garantie de succès. Alors que la commune et 45 propriétaires sont toujours en procès contre Charbonnages de France pour réclamer une juste indemnisation suite aux dégâts causés par l'exploitation minière, les habitants se voient confrontés à la remontée des eaux liée à l'arrêt du pompage d'exhaure. L'État a prévu la mise en place d'un Plan de prévention des risques d'inondations (PPRI) sur cette partie déjà sinistrée du village. Depuis juillet 2014, 39 habitations sont classées en zone rouge inondable « provenant d'un risque naturel » dans le PPRI ce qui implique que les propriétaires doivent prendre les dispositions nécessaires à leurs frais et voient la valeur de leur maison chuter. Or le risque d'inondations n'est pas lié à un phénomène naturel, mais provient de l'héritage de l'exploitation minière. C'est pourquoi des associations, à l'image de la CLCV de Rosbruck, militent pour un Plan de prévention des risques miniers (PPRM) ce qui éviterait aux propriétaires de devoir prendre à leur charge des assurances supplémentaires en plus de conditions de vie déplorables. Il l'interroge sur l'action envisagée par le Gouvernement pour éviter que cette double peine soit infligée aux habitants de Rosbruck.

Texte de la réponse

DÉGÂTS MINIERS À ROSBRUCK


M. le président. La parole est à M. Christophe Arend, pour exposer sa question, n°  274, relative aux Dégâts miniers à Rosbruck.

M. Christophe Arend. Ma question est adressée au ministre de l'économie et des finances. Au début des années 1980, des permis de construire ont été délivrés à Rosbruck, dans le quartier du Weihergraben, en Moselle-est. La situation topographique d'alors localisait ces constructions six mètres au-dessus du niveau de crue de la Rosselle, la rivière qui irrigue ce territoire. À la même époque, les Houillères du bassin lorrain exploitaient le sous-sol de Rosbruck, à plus de 1 000 mètres de profondeur. Depuis, tout le village a subi des affaissements de terrain qui ont entraîné d'importants désordres du bâti.

Le quartier du Weihergraben est l'illustration paroxystique des dégâts d'origine minière. Aujourd'hui, les constructions penchent dangereusement et se fissurent. Elles se situent désormais neuf mètres en dessous du niveau de crue de la Rosselle, ce qui signifie qu'elles ont subi un affaissement de quinze mètres, équivalent à la hauteur d'un immeuble de quatre étages. Cela inverse le sens naturel d'écoulement des eaux. Une digue de protection a été édifiée, mais si elle se rompt, le Weihergraben se transformera en lac, sans possibilité d'évacuation des eaux. Les trente-neuf habitations du quartier sont désormais classées en zone rouge inondable pour risque naturel.

Or, madame la ministre, l'origine du problème est bien minière, et non naturelle. Les habitants du Weihergraben vivent dans des maisons qui présentent jusqu'à cinq centimètres par mètre de variation à l'horizontale. Ils réclament un Plan de prévention des risques miniers – PPRM. La situation, déjà critique, des habitants du quartier est encore aggravée par l'arrêt de pompage des eaux minières. À terme, le niveau de la nappe phréatique se fixera en effet à trois mètres sous les fondations de leurs maisons. Double peine, pourrions-nous dire ! Comble de la situation, l'établissement public à caractère industriel et commercial qui avait pris la suite de Charbonnages de France a été dissous à la fin de l'année 2017, après avoir interjeté appel d'une décision de justice favorable à Rosbruck.

Le bassin minier de l'Est mosellan a fortement contribué au redressement de la France d'après-guerre, grâce aux gueules noires. Ils ont amplement mérité que l'État ne les abandonne pas. Que compte entreprendre le ministre de l'économie et des finances pour rassurer nos concitoyens de Rosbruck sur la sollicitude de l'État ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre chargée des transports.

Mme Élisabeth Borne, ministre chargée des transports. Monsieur le député, vous avez interrogé M. le ministre de l'économie et des finances, mais le risque minier relève du ministère de la transition écologique et solidaire.

M. le ministre de la transition écologique et solidaire est pleinement conscient des responsabilités de l'État dans la gestion des risques miniers après la fin de l'exploitation. Le ministère de la transition écologique et solidaire consacre ainsi, chaque année, près de 40 millions d'euros à la réparation des dommages miniers et à la prévention des risques miniers, qu'il s'agisse de surveillance ou de travaux de mise en sécurité.

Concernant plus particulièrement le bassin houiller lorrain, outre l'arrêt de l'exploitation minière, le secteur connaît depuis le début des années 2000 une baisse significative du taux de prélèvement dans la nappe des industries et des collectivités. La remontée constatée de la nappe, qui tend à retrouver son niveau naturel, n'a donc pas pour seule origine l'ancienne exploitation minière. Cependant, pour faire face à ce phénomène, l'État a, depuis 2009, entrepris et financé des travaux de pompage et de traitement des eaux pour un montant de 7,4 millions d'euros.

L'État effectue également la surveillance, au travers d'un réseau de piézomètres, du secteur ouest du bassin houiller lorrain, qui est le plus immédiatement touché par la remontée de nappe. Par ailleurs, dans ce secteur, les zones affaissées à la suite de l'exploitation minière ne sont pas les seules concernées par le risque d'inondation. C'est pourquoi l'État a prévu de recourir à l'établissement d'un Plan de prévention des risques d'inondation – PPRI – sur l'ensemble du bassin houiller lorrain, qu'il s'agisse de zones affaissées ou non affaissées, et quel que soit le type d'inondation, par débordement ou par remontée de nappe.

La prescription de ce PPRI ne remet pas en cause la responsabilité de l'État en matière d'après-mine. Par conséquent, concernant spécifiquement les zones affaissées à la suite de l'ancienne exploitation minière, et même en l'absence de Plan de prévention des risques miniers, si des mesures de prévention collective s'avèrent nécessaires pour éviter un dégât d'origine minière, elles continueront à être mises en œuvre et financées par l'État au titre de l'après-mine.

En dehors de ces cas de prévention liée à l'activité minière passée, l'avantage d'établir un PPRI réside dans l'éventuelle intervention du Fonds de prévention des risques naturels majeurs – FPRNM – qui ne peut s'envisager que dans le cas d'un risque naturel, défini à l'article L. 562-1 du code de l'environnement, dont les inondations font partie.

Ainsi, l'État assume déjà pleinement sa responsabilité en matière d'après-mine. Il prend et continuera à prendre les mesures nécessaires pour faire face au phénomène d'inondation en zone affaissée, même si celui-ci n'est pas exclusivement d'origine minière. Quant aux mesures qui pourraient être prescrites aux particuliers, notamment aux habitants de Rosbruck, pour faire face au risque naturel d'inondation, il est important de préciser que leur coût ne peut dépasser 10 % de la valeur vénale des biens concernés.

Par ailleurs, l'État, via le FPRNM, pourra participer au financement de ces mesures à hauteur de 40 % pour les biens à usage d'habitation ou à hauteur de 20 % pour les biens utilisés dans le cadre d'activités professionnelles pour les entreprises de moins de vingt salariés.

M. le président. La parole est à M. Christophe Arend.

M. Christophe Arend. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre, et je prends note que l'État prendra bien ses responsabilités en cas d'inondation. Mais, pour rassurer pleinement les habitants de ce bassin minier qui, je le répète, ont lourdement contribué au redressement de la France dans l'après-guerre, il me semblerait utile qu'un membre de vos services se donne la peine de se déplacer sur le terrain. Je vous assure qu'il est impressionnant de se trouver dans une maison où le sol a une dénivellation de cinq centimètres par mètre ! Pour vous donner une idée du problème, ces maisons sont obligées d'avoir quatre écoulements par gouttière, parce que le sens d'écoulement de l'eau varie d'une année à l'autre.