Situation fiscale des praticiens médicaux ayant des collaborateurs
Question de :
M. Pascal Brindeau
Loir-et-Cher (3e circonscription) - UDI, Agir et Indépendants
M. Pascal Brindeau attire l'attention de M. le ministre de l'action et des comptes publics sur la situation fiscale des praticiens médicaux ayant des collaborateurs ou des remplaçants. Un ostéopathe pratiquant dans plusieurs structures réparties sur trois départements, dont le Loir-et-Cher, fait état d'une verbalisation de la part de l'administration fiscale. En effet, considérant que les remplaçants et collaborateurs de ce praticien louent les locaux meublés de celui-ci, il est considéré redevable de la TVA au titre de cette location. Cette application des règles fiscales équivaut indirectement à assujettir à la TVA des actes médicaux, pourtant non assujettis à la TVA. Dans des territoires ruraux très durement touchés par la désertification médicale, de telles mesures représentent une grave menace pour la pérennité de l'activité médicale. Si les jeunes praticiens collaborateurs ou remplaçants représentent une charge fiscale supplémentaire pour les praticiens qui les recrutent, les perspectives de redensifier l'offre de santé en milieu rural deviennent presque nulles. Aussi, il lui demande si des ajustements peuvent être envisagés pour empêcher ce type de situations et alléger la charge fiscale sur les praticiens faisant appel à des collaborateurs ou remplaçants.
Réponse publiée le 26 janvier 2021
En application des dispositions des articles 256 et 256 A du code général des impôts (CGI), les prestations de services et les livraisons de biens effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel sont soumises à la TVA. La notion d'opération effectuée à titre onéreux suppose l'existence d'un lien direct entre le service rendu ou le bien livré, et la contre-valeur reçue. Afin de déterminer si une opération entre dans le champ d'application de la TVA, il convient de rechercher si elle procure un avantage individualisé au client, et si le prix est en relation avec l'avantage reçu. Un tel lien direct est établi lorsqu'il existe entre le prestataire et le bénéficiaire un rapport juridique dans le cadre duquel des prestations réciproques sont échangées, la rétribution perçue par le prestataire constituant la contre-valeur effective du service fourni au bénéficiaire. Le 1° du 4 de l'article 261 du CGI, qui transpose le c) du 1 de l'article 132 de la directive 2008/112/CE du Conseil du 28 novembre 2008 relative au système commun de TVA, exonère de la taxe les soins dispensés aux personnes par les membres des professions médicales et paramédicales réglementées et certains praticiens limitativement énumérés. Cette exonération ne s'applique que si la prestation satisfait à deux conditions, à savoir, d'une part, constituer une prestation de soins à la personne, entendue comme une prestation poursuivant une finalité thérapeutique, et, d'autre part, être effectuée dans le cadre de l'exercice des professions médicales et paramédicales, telles qu'elles sont définies par l'État membre concerné. En l'absence d'une convention d'exercice conjoint, ou de tout autre contrat de groupe ou d'association présentant les caractéristiques d'une société de fait, les membres des professions médicales ou paramédicales qui mettent à la disposition de collaborateurs non-salariés tout ou partie de leur cabinet pourvu de ses installations ainsi que, généralement, la clientèle qui y est attachée, effectuent des locations de nature commerciale. Or, les opérations de location de locaux professionnels aménagés et de mise à disposition d'une clientèle ne constituent pas des opérations susceptibles d'être exonérées. Partant, la redevance versée par le médecin collaborateur au médecin titulaire s'analyse comme étant la contrepartie pour ce dernier de la mise à disposition de locaux professionnels aménagés ainsi que de sa clientèle, et doit à ce titre être soumise à la TVA. Il en est de même d'un prélèvement directement effectué sur les honoraires du médecin collaborateur ou remplaçant, avant rétrocession de ces honoraires au collaborateur ou remplaçant. Toutefois, les membres des professions médicales ou paramédicales qui recourent à un confrère pour les remplacer, à titre occasionnel, sont autorisés à ne pas soumettre à la TVA les sommes perçues à ce titre qui sont conservées par le médecin remplacé. Sans méconnaître le phénomène de désertification médicale, il n'est pas possible d'envisager une extension du champ de l'exonération de la TVA pour les prestations de soins à la personne à ces rétrocessions d'honoraires dans la mesure où les cas d'exonérations prévus par la directive TVA sont d'interprétation stricte. Ils constituent en effet des dérogations au principe général selon lequel la TVA est perçue sur chaque livraison de biens ou prestation de services effectuée à titre onéreux par un assujetti. La France s'exposerait à une condamnation de la Cour de justice de l'Union européenne en cas de méconnaissance de ces règles. En tout état de cause, conformément au 2° du I de l'article 293 B du CGI, les praticiens qui perçoivent de telles redevances peuvent bénéficier d'une franchise en base annuelle, fixée à 34 400 € de recettes ou de chiffre d'affaires en matière de prestations de services, qui les dispense du paiement de la TVA. Enfin, lorsque les praticiens ne bénéficient pas de la franchise, ces opérations soumises à la TVA ouvrent droit à déduction conformément à l'article 271 du CGI et selon les modalités définies aux article 206 et suivants de l'annexe II au même code.
Auteur : M. Pascal Brindeau
Type de question : Question écrite
Rubrique : Taxe sur la valeur ajoutée
Ministère interrogé : Action et comptes publics
Ministère répondant : Économie, finances et relance
Dates :
Question publiée le 17 mars 2020
Réponse publiée le 26 janvier 2021