Question au Gouvernement n° 2759 :
Crise migratoire

15e Législature

Question de : M. Vincent Ledoux
Nord (10e circonscription) - UDI, Agir et Indépendants

Question posée en séance, et publiée le 4 mars 2020


CRISE MIGRATOIRE

Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Ledoux.

M. Vincent Ledoux. « La grandeur de l’homme est grande en ce qu'il se connaît misérable », nous a appris Blaise Pascal. En utilisant des dizaines de milliers de pauvres migrants comme instruments de pression, en les mettant délibérément en mouvement vers la frontière grecque, le président turc nous montre une des faces les plus sombres de notre humanité. Aujourd'hui, la frontière européenne se situe à Kastani, au nord de la Grèce. C'est là que l'Europe doit enfin déployer ses moyens et témoigner de sa solidarité. Devant le drame humanitaire qui se déroule, la crise migratoire qui se profile et les interrogations sécuritaires qui se posent, les Européens ne peuvent plus se payer de mots. Car à trop attendre, nous risquons fort de voir se multiplier dans le fleuve Evros les décès de nouveaux petits Aylan Kurdi.

Dans cette affaire comme dans d'autres, l'Europe s'est montrée dispersée, indécise, sujette à la procrastination ; notre communauté internationale s'est trouvée prise au piège de ses nombreuses contradictions. Nous attendons que l'Europe fasse front commun car il y va de notre sécurité mais aussi de la vie d'hommes, de femmes et d'enfants pris en otage d'un chantage migratoire inacceptable.

Dès lors, monsieur le ministre de l'Europe et des affaires étrangères, pouvez-vous nous présenter la feuille de route que vous proposerez au conseil extraordinaire du 6 mars à Zagreb ? Quelle sera la nature du soutien que la France instaurera vis-à-vis de la Grèce ? Quels seront les moyens dévolus à la mission Frontex ? Quel message la France, à travers l'Europe, adressera-t-elle à la Turquie ? Enfin, quel regard portez-vous sur l'accord migratoire conclu entre l'Union européenne et la Turquie en 2016 ? Quelles nouvelles pistes de partenariat explorez-vous ? Gageons qu'après le Brexit et en pleine impasse budgétaire, l'Europe pourra restaurer son unité – une unité durable et paisible – autour de cette cause commune. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI-Agir et sur plusieurs bancs des groupes LaREM, MODEM et LR).

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères. La crise que traverse actuellement le nord-ouest de la Syrie est sans doute la plus grave qu'ait connue ce pays en neuf ans de guerre. Sa cause, connue, est simple : c'est la décision du régime syrien, fortement soutenue par la Russie, de pilonner l'ensemble de la province d'Idlib au mépris des accords de Sotchi, passés entre la Russie et la Turquie en septembre 2018, du droit international et humanitaire et des populations syriennes.

Comme tous nos partenaires européens, nous avons fermement condamné cette décision et cette offensive. Cependant, vous le savez, une escalade militaire est en cours. Cette crise se caractérise par deux symptômes. Tout d'abord, un cataclysme se dessine sur le plan humanitaire car, comme au début de la guerre conduite par le régime syrien contre sa population, les principales victimes sont les syriens eux-mêmes, civils, femmes et enfants visés délibérément par le régime et par ses alliés russes. Une crise migratoire s'ajoute à ce drame, la Turquie ayant décidé d'instrumentaliser les réfugiés et migrants déjà présents sur son territoire pour faire pression sur l'Europe au mépris total de l'accord de 2005. Il ne faut pas confondre ces deux questions.

Nous avons condamné l'attaque conduite la semaine dernière contre les forces turques et qui a tué trente-quatre de leurs soldats. Le Président de la République a demandé au Président Vladimir Poutine de faire cesser l'offensive d'Idlib et de se situer de nouveau dans le cadre défini par Sotchi. Mais l'exigence de solidarité est valable des deux côtés. L'usage par la Turquie des migrants comme moyen de pression et de chantage sur l'Europe est absolument inacceptable. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)

M. Claude Goasguen. Évidemment !

Données clés

Auteur : M. Vincent Ledoux

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Immigration

Ministère interrogé : Europe et affaires étrangères

Ministère répondant : Europe et affaires étrangères

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 4 mars 2020

partager