Limitation de l'activité écoomique pendant l'épidémie de covid-19
Question de :
M. Éric Coquerel
Seine-Saint-Denis (1re circonscription) - La France insoumise
Question posée en séance, et publiée le 8 avril 2020
LIMITATION DE L'ACTIVITÉ ÉCONOMIQUE PENDANT L'ÉPIDÉMIE DE COVID-19
M. le président. La parole est à M. Éric Coquerel.
M. Éric Coquerel. Au nom de la santé et de la sécurité des Français, je vous demande, monsieur le Premier ministre, de limiter l'activité productive de notre pays au plus strict nécessaire. Comme responsable politique, j'ai vu ce qu'il en coûte de maintenir des activités non essentielles pour le pays. J'ai vu de nombreux élus, candidats, militants, assesseurs de bureaux de vote lourdement frappés parce que les élections municipales ont été maintenues. Ne répétez pas cette erreur, monsieur le Premier ministre. Vous savez comme moi que la courbe de l'épidémie dans notre pays suit la courbe italienne avec dix jours de retard. Or le 9 mars, Giuseppe Conte, président du conseil des ministres italien, déclarait, comme le gouvernement français aujourd'hui, que l'appareil productif devait continuer de fonctionner avant, douze jours plus tard, le 21 mars, de se voir contraint par l'ampleur de l'épidémie de déclarer l'arrêt de toute activité de production autre que celles strictement nécessaires.
Nous ne devons pas nous mentir : nous allons nous aussi continuer d'être durement frappés – votre ministre de la santé l'a d'ailleurs souligné ce matin. Hier, le ministre de l'intérieur déclarait qu'il était nécessaire de durcir le confinement. Nous savons que cela risque de limiter toujours plus les libertés individuelles, ce dont il faudra par ailleurs reparler, mais cela contredit l'injonction de poursuivre l'activité économique, trop de secteurs ne disposant tout simplement pas de protections suffisantes pour éviter la contamination, dans les transports en commun comme sur les lieux de travail. Maintenir, voire promouvoir le travail, salarié ou non, dans ces secteurs, c'est exposer la vie des travailleurs et de leurs proches à des risques inutiles, au risque de renforcer la propagation du virus – je pense aux annonces de McDonald's, qui compte reprendre son activité, décision contreproductive car elle retardera la sortie du confinement.
Nous avons l'occasion ne pas être pris de court une nouvelle fois. C'est pourquoi je vous demande quand vous allez concentrer les moyens d'une protection maximale au bénéfice des activités strictement indispensables aux pays et mettre fin aux autres.
M. le président. La parole est à Mme la ministre du travail.
Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail. Monsieur le député, la question que vous posez revient à déterminer qui, dans le contexte de cette crise et du confinement, doit travailler pour le bien de la nation et selon quelles modalités. Les deux questions sont étroitement liées.
Du premier sujet, nous avons déjà débattu : il est très difficile de dire quels secteurs sont indispensables et quels autres ne le sont pas. Nous serons tous d'accord, par exemple, pour dire que le secteur alimentaire est vital. Il faut que les Français confinés puissent se nourrir, et cela suppose, en amont du supermarché, des entrepôts, de la logistique, des transports, des mécaniciens pour entretenir les moyens de transport, outre l'industrie agro-alimentaire, l'agriculture, l'emballage. On voit que cette seule activité mobilise une partie très importante de l'économie.
Il convient d'appréhender l'activité économique de bout en bout, comme une chaîne dont les maillons sont interdépendants. Il est donc difficile de répondre à votre question, et c'est la raison pour laquelle nous avons privilégié un autre choix. L'Italie, qui s'est efforcée de dresser une liste des activités essentielles, ne cesse d'ailleurs de la compléter, tant les secteurs économiques sont interdépendants.
Nous pouvons toutefois agir sur les manières de travailler. Le service économique du pays est déjà réduit au minimum, puisque près de la moitié de l'activité est à l'arrêt ou ralentie. Dans ce contexte, nous partageons votre souci de préserver la santé et la sécurité des travailleurs. Nous avons ainsi constitué, il y a trois semaines, une équipe projet qui y travaille avec les professionnels, et je consulte les partenaires sociaux tous les deux jours à ce sujet. Des guides de bonnes pratiques sont établis métier par métier : treize ont déjà paru, et vingt autres seront publiés cette semaine. Nous contrôlons leur bonne application dans les entreprises, sachant que le code du travail soumet celles-ci à une obligation de moyens et leur impose d'organiser leur activité de façon à protéger leurs salariés. Nous aidons donc les entreprises grâce à des guides, mais nous les contrôlons également. Il n'est pas question de choisir entre l'économie et la santé : nous devons faire en sorte que la vie des Français continue, tout en protégeant les salariés.
Auteur : M. Éric Coquerel
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Emploi et activité
Ministère interrogé : Travail
Ministère répondant : Travail
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 8 avril 2020