15ème législature

Question N° 28597
de Mme Sabine Rubin (La France insoumise - Seine-Saint-Denis )
Question écrite
Ministère interrogé > Économie et finances
Ministère attributaire > Transition écologique

Rubrique > énergie et carburants

Titre > Précarité énergétique en période de confinement

Question publiée au JO le : 21/04/2020 page : 2898
Réponse publiée au JO le : 04/05/2021 page : 3954
Date de changement d'attribution: 07/07/2020

Texte de la question

Mme Sabine Rubin interroge M. le ministre de l'économie et des finances sur les foyers en situation de précarité énergétique dans cette période de confinement. Selon la loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement, il est spécifié : « est en situation de précarité énergétique une personne qui éprouve dans son logement des difficultés particulières à disposer de la fourniture d'énergie nécessaire à la satisfaction de ses besoins élémentaires en raison de l'inadaptation de ses ressources ou conditions d'habitat ». En France, près de 7 millions de personnes seraient en situation de précarité énergétique, selon les derniers chiffres de l'Observatoire national de la précarité énergétique. En 2018, 6,8 millions de Français ont ainsi consacré au moins 8 % de leur budget aux dépenses d'énergie. Selon le médiateur national de l'énergie, qui retient le ratio de 15 %, le nombre d'individus ayant souffert du froid l'hiver 2019 serait plutôt de 10 millions. Quant à la Fondation Abbé-Pierre, elle estime que près de 12 millions de Français seraient en situation de précarité énergétique. Le 27 mars 2020, le Premier ministre est intervenu devant les Français pour annoncer la prolongation de deux semaines du confinement initialement prévu jusqu'à fin mars 2020. Cette période de confinement sera sans doute prolongée si la situation sanitaire l'exige. Face à cette situation inédite, le Gouvernement a mis en place une série de mesures : un plan de soutien économique de 45 milliards d'euros aux entreprises et aux salariés, 300 milliards d'euros de garanties de l'État aux prêts bancaires des entreprises, 1 000 milliards d'euros de garanties de prêts bancaires au niveau de la zone euro. Cependant, aucune mesure pour lutter contre la précarité énergétique, notamment en direction des foyers les plus touchés, n'a été prise par le Gouvernement. En cette période de crise sanitaire, les plus fragiles des Français sont davantage touchés par l'état d'urgence sanitaire. Avec la mesure nécessaire de confinement, nombreuses sont les familles qui passent 24 heures sur 24 dans leur foyer. 64 % des Français vivent en appartement. Pour calculer la consommation d'énergie d'un foyer, il faut prendre plusieurs critères en compte comme la surface du logement, le nombre de personnes qui y vivent ou encore le nombre d'appareils électroménagers présents, postes de consommation qui sont plus énergivores dans un logement. Cette situation de présence continue dans le foyer due à la nécessité de respecter le confinement produit sans aucun doute une surconsommation d'énergie (gaz et électricité). Comment ces foyers français, parmi les plus fragiles, feront pour payer ces factures ? Aucune mesure dans ce sens n'a, jusqu'à présent, été prise par le Gouvernement. Aucune initiative allant dans ce sens n'a été proposée non plus par les opérateurs ou distributeurs d'énergie. Ici et là, des foyers français s'organisent pour demander que les opérateurs ou distributeurs d'énergie appliquent le tarif de nuit ou heures creuses. Elle attire son attention sur les conséquences sociales d'une absence d'initiative politique en direction de ces foyers précaires, et donc sur la nécessité d'un dispositif d'accompagnement pour lutter contre la précarité énergétique pendant la période de confinement. Au regard de la situation, il est urgent que des mesures tarifaires soient mises en place par le Gouvernement et soient appliquées par les opérateurs d'énergie. Elle lui demande s'il va prendre des mesures dans ce sens.

Texte de la réponse

En premier lieu, la trêve hivernale a été prolongée, en 2020, jusqu'au 10 juillet 2020 par l'ordonnance n° 2020-331 du 25 mars 2020 et la loi du 11 mai 2020, puis de nouveau en 2021, jusqu'au 31 mai par l'ordonnance n° 2021-141 du 10 février 2021 relative au prolongement de la trêve hivernale. La trêve hivernale protège les particuliers, puisque durant cette période, les règles prévues par l'article L.115-3 du code de l'action sociale et des familles s'appliquent et les fournisseurs d'électricité, de chaleur, de gaz ne peuvent procéder, dans une résidence principale, à l'interruption de fourniture, au motif d'un impayé. Les fournisseurs d'électricité peuvent cependant faire procéder à des réductions de puissance en cas d'impayés, sauf pour les clients bénéficiant du chèque énergie. Par ailleurs, à l'issue de la trêve hivernale, il convient de rappeler que d'autres protections s'appliqueront aux ménages en difficulté de paiement, puisque les pratiques des fournisseurs sont très encadrées avant toute coupure. En effet, l'annonce d'une possible coupure ou d'une réduction de puissance déclenche un processus d'évaluation de la situation du client, d'orientation vers les différentes aides disponibles, et d'étalement des paiements : en ce sens, elle fait office de signal d'alerte, et permet de déclencher un processus d'accompagnement pour aider le consommateur en difficulté. Deuxièmement, afin d'aider les ménages à payer leurs factures d'énergie pour le logement, l'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 a permis de prolonger la durée de validité des chèques énergie issus de la campagne 2019 jusqu'au 23 septembre 2020. Dans le contexte d'état d'urgence sanitaire, le lancement de la campagne 2020 du chèque énergie a par ailleurs été maintenu (les envois des chèques s'effectuant sur les mois d'avril et de mai), afin que les 5,5 millions de bénéficiaires pour cette année puissent utiliser rapidement leur chèque énergie. Ces chèques, d'un montant moyen de 150 €, et pouvant atteindre 277 € selon les revenus et la composition du ménage concerné, parviendront automatiquement aux ménages éligibles. Le ministère, l'Agence de services et de paiements et la Poste ont mis en œuvre les moyens nécessaires pour que l'envoi des chèques énergie se fasse dans les meilleures conditions à partir du début du mois d'avril et jusqu'au mois de mai 2020. Afin de permettre aux bénéficiaires d'utiliser plus rapidement leur chèque énergie, il leur est vivement recommandé de privilégier, lorsque cela est possible, une utilisation en ligne, le délai de traitement des chèques énergie adressés par courrier aux fournisseurs d'énergie étant susceptible d'être allongé pendant la période de crise sanitaire. Les 5 833 millions de ménages bénéficiaires du chèque énergie en 2021 (contre 5.5 millions de ménages en 2020) recevront leur chèque énergie entre la fin mars 2021 et la fin du mois d'avril 2021 (le calendrier d'envoi des chèques énergie par départements est disponible à ce lien : https://www.chequeenergie.gouv.fr/cms/api/uploads/calendrier-envois.pdf). Pour les bénéficiaires 2021 qui étaient déjà bénéficiaires du chèque énergie l'année dernière et qui ont demandé à ce que leur chèque soit automatiquement transmis à leur fournisseur cette année, ils recevront un courriel entre le 12 avril et le 23 avril, leur indiquant le montant de leur chèque énergie de cette année et confirmant la transmission du chèque énergie à leur fournisseur. Enfin, deux versements d'une aide exceptionnelle de solidarité ont été effectués à destination des ménages vulnérables : le premier en mai 2020 et le second en novembre 2020. Plus largement, certaines mesures d'aide à la diminution de la consommation d'énergie des ménages ont été apportées. L'État a en effet renforcé et facilité l'accès aux aides à la rénovation énergétique des logements, par exemple sur l'isolation, en particulier avec MaPrimeRénov'. Malgré le ralentissement induit par la crise sanitaire, plus de 190 000 dossiers ont été déposés en 2020. En outre, des « coup de pouce » ont également été créés via le dispositif des certificats d'économies d'énergie pour faciliter le changement des vieux radiateurs électriques ou le déploiement de thermostats avec régulation performante (plus d'information https://www.ecologie.gouv.fr/politiques/certificats-economies-denergie) et permettre ainsi de réduire les consommations liées au chauffage. Modifier la fiscalité des énergies ne permettrait pas de cibler les ménages précaires, étant donné que les taxes comme la TVA ou la TICGN sont des taxes proportionnelles, dont les taux ne peuvent donc pas être modulés pour tenir compte des revenus des ménages. En effet, la directive 2003/96/CE qui encadre la fiscalité énergétique ne permet pas d'introduire des taux différents entre les ménages (article 15 (1) (h) ). Or l'instauration d'un taux réduit ne constituerait donc pas une mesure ciblée à destination des ménages précaires, et risquerait donc d'être peu efficace. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement privilégie le recours aux mesures de soutien permettant de cibler les ménages vulnérables. Le soutien aux ménages en difficulté peut ainsi passer par d'autres moyens à caractère budgétaire, comme ceux que le Gouvernement a mis en œuvre et continuera à soutenir, par exemple le chèque-énergie. Pour poursuivre le soutien apporté aux ménages en difficulté, plusieurs ajustements ont été apportés pour permettre de faciliter l'usage du chèque énergie et de ses protections associées. La campagne 2021 du chèque énergie sera marquée par la mise en œuvre de la pré-affectation papier du chèque énergie : le bénéficiaire pourra désormais demander en cochant une case sur son chèque énergie papier à ce que son chèque soit directement transmis à son fournisseur les prochaines années (il peut effectuer également cette demande en ligne ou par téléphone). En outre, le chèque énergie pourra désormais être utilisé par l'ensemble des bénéficiaires résidents en EHPAD, en EHPA, en résidence autonomie, en ESLD ou en USLD. Enfin, les sous locataires en intermédiation locale pourront désormais bénéficier du dispositif s'ils remplissent les conditions de revenus, sur la base d'une demande portée par l'opérateur gestionnaire du logement intermédié.