15ème législature

Question N° 28706
de M. Hugues Renson (La République en Marche - Paris )
Question écrite
Ministère interrogé > Europe et affaires étrangères
Ministère attributaire > Europe et affaires étrangères

Rubrique > politique extérieure

Titre > Abus des forces de sécurité au nom de la lutte contre le covid-19 en Afrique

Question publiée au JO le : 21/04/2020 page : 2922
Réponse publiée au JO le : 21/07/2020 page : 4965
Date de changement d'attribution: 07/07/2020

Texte de la question

M. Hugues Renson attire l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur l'utilisation de la force pour imposer le confinement et le respect des règles sanitaires dans certains pays d'Afrique. En effet, il est particulièrement difficile dans des mégapoles ou des quartiers surpeuplés d'Afrique de faire respecter les confinements et restrictions aux déplacements afin de lutter contre le coronavirus. En conséquence, selon l'ONG Human Rights Watch (HRW), il y a une utilisation excessive de la force pour imposer le respect des règles. Coups de fouet ou de feu, gaz lacrymogène, violence ou humiliations sont observés. En Ouganda, la police a reconnu avoir blessé par balle deux hommes qui tentaient, selon elle, de s'opposer aux restrictions sur les déplacements. Au Kenya, un adolescent aurait été tué par des coups de feu qui auraient été tirés par la police. En Afrique du Sud, la police est accusée d'avoir abattu trois civils. En République démocratique du Congo, les images d'un policier frappant avec une matraque un homme à terre, qui hurle de douleur, ont circulé sur les réseaux sociaux. En Ethiopie, certains observateurs craignent que l'état d'urgence, déclaré le 8 avril 2020, n'entraîne des abus des droits de l'homme comme cela a auparavant été le cas. L'ONG HRW a donc appelé les gouvernements à rapidement enquêter sur les abus des forces de sécurité et violations des droits de l'Homme. Il lui demande ainsi si le Gouvernement suit la situation et quels moyens diplomatiques il compte utiliser afin d'éviter que la lutte contre la propagation du covid-19 en Afrique ne se fasse au détriment du respect des droits de l'Homme et que l'adoption de certaines mesures d'urgence ne viole des principes de l'état de droit, de la démocratie et des libertés fondamentales.

Texte de la réponse

Pour limiter la propagation du Covid-19, la plupart des partenaires africains de la France ont mis en place des règles de confinement exigeantes, qui peuvent varier dans leurs modalités géographiques ou temporelles. Ces mesures, nécessaires mais difficiles, présentent comme dans tous les autres pays des inconvénients sur le plan économique et social. Dans les quartiers défavorisés des villes africaines, où la population dépend pour sa subsistance de revenus générés au quotidien, cette situation a pu conduire localement à des tensions. La grande majorité de ces pays ont pris des mesures de solidarité pour soutenir les populations les plus vulnérables au cours des périodes de confinement (aide alimentaire, soutien financier). La France soutient ces mesures, à travers ses contributions aux agences humanitaires onusiennes et notamment au Programme alimentaire mondial ainsi qu'à travers son appui logistique à la continuité du travail des organisations non gouvernementales. Elle s'efforce également de rappeler toute l'importance de la préservation de l'accès humanitaire par les autorités malgré la mise en place de mesures restrictives. La France est résolument engagée en faveur du soutien économique international aux pays africains les plus vulnérables. Cet engagement, porté par la France devant le G7, le G20 et l'Union européenne, s'est traduit notamment par le moratoire sur les échéances de la dette publique des pays à faibles revenus, décidé par les ministres des Finances du G20 et qui vise à permettre à ces pays de dégager des marges de manœuvre pour les mesures sanitaires mais aussi sociales de réponse au Covid-19. Le ministère de l'Europe et des affaires étrangères suit de près et avec préoccupation les cas d'abus présumés des forces de sécurité, avec ses partenaires européens puisque la protection et la promotion des droits de l'Homme font partie intégrante du dialogue et de la coopération entre l'Union européenne et l'Afrique. Nous appelons les autorités des pays où des abus des forces de sécurité ont été constatés, à faire preuve d'exemplarité et à lancer des enquêtes pour que les violations ne restent pas impunies. La confiance que la population accorde aux forces de sécurité est un élément clé de la stabilité et de la cohésion sociale. C'est d'autant plus le cas pendant cette crise où des précautions exigeantes sont demandées à la population. Plus généralement, dans les enceintes multilatérales pertinentes, la France a rappelé que les mesures prises pour lutter contre la propagation du Covid-19 doivent être mesurées, proportionnées et limitées dans le temps. La Haute-Commissaire aux droits de l'Homme, Mme Michelle Bachelet, ainsi que le Secrétaire général des Nations unies, M. Antonio Guterres, ont appelé à "faire en sorte que l'état d'urgence ne soit pas utilisé pour réprimer l'opposition, faire taire les défenseurs des droits de l'Homme et les journalistes ou pour prendre toute autre mesure qui ne soit pas strictement destinée à répondre à la crise sanitaire".