Siège statutaire d'une entreprise - concurrence
Publication de la réponse au Journal Officiel du 8 février 2022, page 824
Question de :
M. Romain Grau
Pyrénées-Orientales (1re circonscription) - La République en Marche
M. Romain Grau attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur la concurrence entre pays occasionnée par le déplacement du siège statutaire d'une entreprise. L'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne du 25 octobre 2017 (aff. C-106/16 pollue-Wykonawstwo sp z o.o) juge que le déplacement de siège statutaire dans un autre État membre, même sans déplacement du siège réel et sans exercice d'une activité économique effective dans le pays d'accueil, relève de la liberté d'établissement. Il s'ensuit que la liberté d'établissement permet à une société de se rattacher à l'ordre juridique de son choix, pourvu que cet ordre soit prêt à l'accueillir. Il en résulte une concurrence entre systèmes juridiques qui profite au droit national le moins disant. Il lui demande s'il pense pouvoir contrarier ce mouvement et par quels moyens.
Réponse publiée le 8 février 2022
Pour encadrer les transferts de sièges sociaux des sociétés de capitaux, l'Union européénne a adopté la directive (UE) 2019/2121 du Parlement européen et du Conseil du 27 novembre 2019 modifiant la directive (UE) 2017/1132 en ce qui concerne les transformations, fusions et scissions transfrontalières. Cette directive complète les dispositions européennes relatives aux fusions transfrontalières et introduit deux nouvelles procédures relatives aux transformations et scissions transfrontalières. La procédure de transformation transfrontalière permet aux sociétés constituées conformément au droit d'un Etat Membre de se transformer en une société de forme juridique d'un autre Etat Membre, en y transférant au moins leur siège statutaire, tout en conservant leur personnalité juridique. La procédure de fusion transfrontalière permet aux sociétés européennes de fusionner avec une ou plusieurs sociétés d'autres Etats membres, par absorption ou création d'une société nouvelle. La procédure de scission permet aux sociétés européennes de se scinder en plusieurs sociétés localisées dans d'autres Etats membres ou d'effectuer des apports partiels d'actifs transfrontaliers. Compte tenu des risques d'optimisation du choix de la loi applicable à la société, cette directive a prévu un mécanisme de contrôle strict destiné à identifier, et, le cas échéant, bloquer les opérations réalisées à des fins abusives ou frauduleuses, comme par exemple le fait de chercher à échapper à des obligations fiscales et sociales. Ce mécanisme de contrôle permettra de faire obstacle aux sociétés écrans ou boite aux lettres (cf. considérant 35 directive 2019/2121). Il permet de protéger les salariés, les créanciers, les associés et les intérêts des Etats membres concernées, et repose notamment sur une autorité de contrôle compétente dans l'Etat membre de départ comme dans celui d'arrivée. Les trois opérations couvertes par la directive obéissent aux mêmes règles harmonisées mises en place à cette fin. Cette directive doit être transposée en France avant le 31 janvier 2023. En raison de la longueur du texte et de sa nature essentiellement technique, la voie d'une demande d'habilitation est envisagée pour réaliser cette transposition par ordonnance. Ce contrôle, qui consiste en des opérations de vérifications étendues pour lesquelles l'autorité compétente dispose d'un large éventail d'outils (recours à un expert, demande d'information et de documents complémentaires auprès des sociétés concernées, collaboration avec des services compétents en matière fiscale et sociale…) est réalisé par l'Etat Membre de départ de sorte que l'opération puisse être bloquée avant sa réalisation.
Auteur : M. Romain Grau
Type de question : Question écrite
Rubrique : Union européenne
Ministère interrogé : Économie et finances
Ministère répondant : Justice
Signalement : Question signalée au Gouvernement le 22 juin 2020
Dates :
Question publiée le 21 avril 2020
Réponse publiée le 8 février 2022